« Sociologie des violences sexuelles au sein de l’Église catholique en France (1950-2020) » : l’enquête de l’Inserm

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Depuis une trentaine d’années, la parole se libère concernant les violences sexuelles impliquant des représentants de l’Église catholique. De nombreux pays ont mis en place des commissions d’enquêtes pour évaluer l’ampleur du phénomène et mieux l’appréhender.

En France, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a été mise en place le 13 novembre 2018 par Jean-Marc Sauvé, vice-président honoraire du Conseil d’État, à la demande de la Conférence des Évêques de France (CEF) et de la Conférence des religieux et religieuses de France (CORREF). Après près de trois ans de travail, le rapport de la CIASE a été rendu public le 5 octobre 2021.

Afin de mieux caractériser la population des personnes ayant été abusées et d’étudier les logiques sociales et institutionnelles qui auraient favorisé ces violences, la CIASE a sollicité la sociologue-démographe Nathalie Bajos, directrice de recherche Inserm et spécialiste des enquêtes sur la sexualité et le genre. Avec son équipe, elle a mené une enquête détaillée sur le sujet, qui vient alimenter le rapport final de la CIASE.

216.000. C’est le nombre de mineurs qui auraient été victimes de violences sexuelles dans l’Eglise entre 1950 et 2020, selon l’enquête en population générale menée par l’Inserm auprès de 28 010 personnes âgées de 18 ans et plus, représentatives de la population française. 
Si l’on ajoute les violences sexuelles commises par des laïcs au sein d’institutions religieuses, ce chiffre pourrait même s’élever à 330.000 victimes. L’Eglise est le milieu où, après les cercles familiaux et amicaux, la prévalence des violences sexuelles est la plus élevée. La majorité des victimes étaient des garçons âgés de 10 à 13 ans au moment des faits.

L’enquête de l’Inserm a comporté trois volets :

  • Un « appel à témoignage » qui s’est déroulé d’octobre 2019 à janvier 2020, qui a permis de collecter 1 627 questionnaires remplis par des personnes confrontées à une ou plusieurs situations d’abus sexuels dans l’Église (dont 1 448 personnes mineures au moment des faits et personnes majeures dites “vulnérables”) issues de toute la France.
  • Une enquête qualitative sur la base d’entretiens semi-directifs en face à face a permis d’explorer plus finement les relations de la personne agressée avec l’auteur de l’agression (confiance, rapports hiérarchiques…), les circonstances de survenue des violences, les réticences à parler, les réactions des personnes informées (famille, membres de l’Église) et les raisons du non-recours au droit.
  • Une enquête sur les violences sexuelles en population générale. Elle a été conduite entre le 25 novembre 2020 et le 28 janvier 2021 auprès d’un échantillon par quotas de 28 010 personnes de plus de 18 ans interrogées par internet. Cette enquête a permis d’estimer la prévalence des violences sexuelles perpétrées par un membre du clergé catholique, de la comparer à celles des violences commises dans d’autres sphères de socialisation (famille, école, activités sportives, autres religions…) et enfin d’apprécier la spécificité sociale et démographique des répondants au premier volet “appel à témoignage”.

Communiqué Inserm du 5 octobre 2021