Dépression, burnout… : la santé mentale des étudiants en médecine dans le rouge

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Lors d’un colloque dédié à la santé mentale des étudiants et internes en médecine qui s’est tenu le 27 octobre dernier à l’Assemblée nationale, les associations et syndicats de futurs médecins – Isni, Isnar-IMG et Anemf – ont dévoilé des résultats très inquiétants suite à une enquête menée entre mai et juin 2021 soulignant, une fois encore, que la santé mentale des étudiants et interne en médecine « ne cesse de se dégrader » et qu’il s’agit « d’un véritable enjeu de santé publique« .

Les chiffres issus de l’enquête nationale menée en 2017 par les associations et syndicats de futurs médecins étaient déjà éloquents : 66,2% des répondants montraient des symptômes d’anxiété pathologique et 27,2% des symptômes dépressifs sur les 7 derniers jours… Quatre ans après et trois réformes des études de médecine plus tard, et à la lumière de la pandémie COVID-19 qui a finit d’achever les troupes, les résultats d’une nouvelle étude sur la santé mentale des médecins*, version améliorée de l’enquête de 2017, dévoilés le 27 octobre lors d’un colloque à l’Assemblée nationale, à l’invitation des députés Thomas Mesnier, Stéphanie Rist et Anne Brugnera (LREM), montrent une réalité aussi affligeante qu’indiscutable : la santé des futurs médecins empire !

« Comment imaginer qu’un médecin sévèrement déprimé, épuisé ou même constamment harcelé puisse prodiguer des soins de bonne qualité ?« 

Les résultats sont sans appel : à des seuils comparables à 2017, 75% des étudiants en médecine et des internes montrent des symptômes d’anxiété pathologique et 39% des symptômes de dépression sur les 7 derniers jours précédant le questionnaire ! Les facteurs de risques sont statistiquement significatifs : des difficultés financières, un temps de travail excessif ou encore l’exposition à des violences, qu’elles soient psychologiques, physiques ou encore sexuelles, exacerbent le risque de dépression. Or, l’explosion du temps de travail, de même que les maltraitances, ont essentiellement lieu à l’hôpital.

Ils rappellent en effet que suite au rapport sur la qualité de vie des étudiants en santé du Dr. Donata Marra, en 2018, le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, et le Ministère des Solidarités et de la Santé, avaient officiellement pris 15 engagements à mettre en place pour la qualité de vie des étudiants en santé et créé le CNA (Centre National d’Appui à la qualité de vie des étudiants en santé) auquel ils ont promis moyens humains, financiers et évolutions, sans que ceux-ci se révèlent suffisants. Quelles sont les avancées réelles ? « En dehors de la création d’une plateforme téléphonique, qui ne figurait pas dans les mesures initiales, et de la campagne ministérielle autour de “Tolérance Zéro, Engagement Total”, qu’en est-il de la santé des futurs médecins ?« 

Le Dr Jacques Thibaut, sur twitter a posté ceci : « On est face à un système qui ne peut plus assurer ses ambitions, et qui n’a comme seule solution que de compter sur les sacrifices individuels de ceux qui le composent. Au prix de leur vie personnelle, leur santé et leurs rêves, tant que la barque continue d’avancer en apparence« . De son côté Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’innovation, l’a souligné – dans un euphémisme – face à ces chiffres : la détresse est encore grande chez les étudiants et internes en médecine « . Thomas Mesnier, Député & Conseiller départemental de la Charente – Rapporteur Général de la commission des Affaires sociales et Urgentiste, a reconnu la réalité :  » Vous cassez un tabou qui touche la chair des jeunes médecins (…) il faut probablement qu’on aille plus loin, le diagnostic nous l’avons, il faut agir maintenant . » Quant à Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, il affirmé, lors de son intervention à la tribune « qu’Il n’y a pas de bons médecins sans avoir des médecins heureux  » et « Nous sommes à vos côtés pour la suite . » Il a rappelé que l’enquête sur le temps de travail des étudiants de troisième cycle est close depuis la fin du mois de septembre et promis que « le résultat sera présenté dans les quinze jours. J’aurais l’occasion de proposer de nouveaux engagements. »

Une chose est sûre, la crise de l’hôpital est également celle de ses étudiants. Pour les représentants des futurs médecins, « ces chiffres traduisent une réalité humaine dont sont victimes de trop nombreux étudiants. Nous avons fourni des preuves, nous avons attendu, jusqu’au drame parfois, des engagements et des réponses fortes qui ne sont pas venues. Nous ne pouvons plus continuer d’attendre.« 

Isni, Isnar-IMG et Anemf portent une vingtaine de propositions pour lutter contre le mal-être étudiant, à l’échelon national mais aussi local et individuel. Il s’agit de déstigmatiser les troubles psychiatriques, infliger des sanctions aux établissements et aux services, ainsi qu’aux auteurs de maltraitances et de violences, assurer la présence de cellules d’écoute, ou encore garantir la confidentialité à l’étudiant.

Enquête réalisée par Isni, Isnar-IMG et Anemf entre mai et juin 2021 auprès de 11 754 répondants (soit 15% de réponses de l’ensemble des étudiants et interne en médecine).

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