06/09/2021

La compagnie « Scène ouverte » présente sa nouvelle comédie musicale

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Après Les Ombres des Anges en 2010, Cité Solo en 2013 et Fêlures en 2017, la compagnie Scène ouverte prépare une nouvelle comédie musicale, Monopol.com. Quatre représentations sont prévues, les 25 et 26 septembre à Checy (45) et les 9 et 10 octobre à Orléans. Save the date !

Dans cet article, l’association présente sa démarche, qui met la dynamique coopérative soignants-soignés au premier plan.

En 2005, au centre de jour thérapeutique M. Parienté (EPSM-45 Georges Daumézon), quelques patients, trois professionnels (assistante sociale, infirmière, cadre) et une infirmière libérale s’engagent dans la création de l’association Scène ouverte. Le Directeur de l’hôpital, un psychiatre, des professionnels, des soignés et des élus saluent l’initiative. L’objectif est de « gérer et promouvoir des moyens d’action visant la réhabilitation sociale des personnes en difficultés psychiques, par le biais d’activités artistiques », (…) pour « désenclaver le malade et sa famille des enfermements psychiatriques ».

Pour Scène ouverte, le regard négatif porté sur les personnes éprouvant des souffrances psychologiques doit changer. « Malades mentaux », « malades ou handicapés psychiques », « personnalités borderline » et autres « bipo »… ont suffisamment de difficultés existentielles : elles ne doivent pas subir, en plus, la mésestime et le rejet d’autrui. Le conseil d’administration, ouvert à tous, est composé de soignés, de professionnels de la santé et de personnalités « hors psychiatrie ». Un bulletin des adhérents est rédigé et diffusé 4 fois par an.

En juin 2007, après quelques tentatives pour se joindre à des groupes musicaux locaux, le petit groupe Scène ouverte décide d’engager l’écriture d’une comédie musicale. Il invite des gens de la « société civile » à le rejoindre. Ce sera un succès avec Les ombres des anges, la publication du livre, d’un CD et d’une vidéo. Trois autres comédies suivront.

Scène ouverte, c’est la volonté de briser la relation fermée du couple soignés-soignants autant que l’image sociale négative et discriminante que supportent les personnes souffrant de troubles psychiatriques. Pour y réussir, l’association fabrique en coopération de toutes et de tous, un « objet spectacle » où chaque participant.e peut retrouver sa trace et son histoire entremêlées à celles des autres. 

Fabrication du groupe

C’est à partir des histoires de vies des participants de leurs parcours et de multiples improvisations que, peu à peu, une comédie se compose. Des idées s’assemblent quand d’autres sont écartées. On garde, on rejette, on précise, on améliore et après bien des échanges, le texte prend forme et l’on finit toujours par le valider. Parfois, l’exercice peut prendre beaucoup de temps. La composition d’un tableau ou d’une chanson peut s’étaler sur plusieurs mois. Il ne s’agit surtout pas d’abandonner ! 

Cette forme d’écriture et de mise en saynètes et la disparité des acteurs nécessitent le recours au « temps long », en veillant à ce que chacun puisse à son tour prendre la parole. Lors de nos « rencontres de répétitions », nous accueillons beaucoup de participants : certains ne sont que passagers qui viennent voir, sans s’engager plus avant. 

La troupe se stabilise ensuite à une trentaine de personnes. Des contacts multiples (individuels, institutionnels (hôpitaux, cliniques, foyers de vie, ESAT…), médias) et réguliers soutiennent l’engagement de chacun.

Favoriser la relation à l’autre 

La visée de Scène ouverte n’est donc pas de se servir de techniques de rééducation, de remédiation, de réadaptation, ni de réapprentissage des acquisitions sociales qui feraient défaut aux malades. Ses animateurs rejoignent R. Gori quand il souligne le fait que « (…) la simple adaptation à une réalité purement formelle, technique et instrumentale conduit le monde et l’humain à la facticité, à la vie inauthentique, aux âmes mortes, exsangues de tout potentiel de création » (1). Scène ouverte invite à découvrir des histoires collectives avec l’intention et l’espérance de vouloir transformer le monde ! Pour y parvenir, l’association favorise un « regroupement » de gens différents à l’occasion d’une tâche commune : la création de spectacles. « Regrouper », c’est la volonté d’opposer à la dissociation psychotique et l’association avec les autres. Il s’agit donc d’un véritable soin social.

L’association prend ses appuis sur les enseignements de la psychothérapie institutionnelle, plus précisément avec les travaux de G. Daumézon, R. Gentis et d’H. Torrubia à Fleury-les-Aubrais.

Par la simplicité de son accueil chaleureux, par la place qu’elle laisse à ses contributeurs, parce qu’elle favorise l’entraide et la participation, Scène ouverte façonne, tout au long de l’année, un collectif soignant. Les contenus comme les représentations publiques montrent les capacités créatives, musicales et théâtrales des comédiens, ils permettent aussi d’interroger la folie et ses traitements médicaux autant que sociaux.

« L’oeuvre, c’est le produit du travail accompli, celui dont on peut être fier et qui conforte l’identité [professionnelle] de celui qui la fait. » (2)

En résumé, c’est pour favoriser la relation à l’autre (3) que Scène ouverte propose une inscription sociale à l’extérieur des centres de soins et ce, sur un mode ludique, mêlant improvisations, jeux de rôles, histoires de vies, actualités, pathologies, musiques et finalement création d’une comédie musicale. Une variation du statut social des soignés prend forme. C’est la progression du malade-handicapé-incapable au comédien-chanteur-acteur.

Réalisée sur plusieurs années, l’œuvre est ensuite proposée à de nombreux spectateurs (environ 2 000 pour chaque spectacle) qui applaudissent la performance. Moments de reconnaissance sociale, indispensables à la reconnaissance de soi. De plus, administrateurs et comédiens proposent des débats-chansons auprès de différents publics : collèges, lycées, universités, écoles professionnelles, municipalités, Semaine d’information en santé mentale (SISM), etc.
Les interrogations concernant nos folies sont alors partagées par le plus grand nombre ! 

Un travail régulier et soutenu

Répétitions chaque jeudi (2h50) au théâtre d’Orléans. Elles sont complétées au théâtre Gérard Philipe Orléans La Source et au lycée Voltaire, plusieurs samedis sur toute la journée et quelques dimanches. À la suite de deux (ou trois) années d’élaboration en autogestion, une année est consacrée à la mise en scène sous la direction d’un professionnel et d’un « intervenant chants ». Chaque répétition bénéficie d’un compte-rendu diffusé à la troupe, aux intervenants et aux administrateurs.

Après Les Ombres des Anges en 2010, Cité Solo en 2013 et Fêlures en 2017, mai 2018 voit la préparation d’un nouveau spectacle Monopol.com, qui a déjà nécessité environ 500 heures de travail. « Un grand jeu qui nous emporte, nous les pions pris dans la tourmente sociale.  Entre humour et tragédie, jeux et colères, Monopol.com dit notre mal-être et nos espoirs d’un monde où la solidarité serait la norme et dans lequel les exclus retrouveraient leur place »

Monopol.com
Mise en scène : M. Lefèvre
Accompagnateur chants : F. Gateau
Costumes : A. Koerber Ribéron
Vidéo : P. Martin.

LES PROCHAINES REPRÉSENTATIONS PUBLIQUES EN 2021

25 et 26 septembre Chécy 45430 Espace George Sand
09 et 10 octobre Orléans 45100 Maison des Arts et de la Musique 

Durée 1h20
Tarif d’entrée : libre

Renseignements/réservations 06 07 70 93 93 

Scène Ouverte réalise un travail avec les citoyens. Elle est soutenue par la ville d’Orléans, la Scène Nationale Théâtre Orléans, la ville de Chécy, le CDNO, le lycée Voltaire de La Source, le département du Loiret, l’EPSM45, la MGEN Loiret, la région Centre-Val de Loire, la Ci° Offshore, la Ci° Jolie Môme de St Denis La Plaine…

Retrouvez les actualités sur la page Facebook de l’association Scène ouverte, Contact sceneouverte@yahoo.fr

1– Gori (R.) « La fabrique des imposteurs ». Actes Sud. 2015 (p. 248).  
2– Aubert (N.). « Le culte de l’urgence – La société malade du temps ». Flammarion 2003 (Champs essais mars 2019 – p. 94). 
3– Cf. H. Torrubia (H.). « La psychothérapie institutionnelle par ‘gros temps » qui écrit : « Il faudrait presque écrire ‘soi’ et ‘autre’: ‘soi(s)’ et ‘autre(s)’, tellement le singulier s’inscrit dans la pluralité de chacun des autres, et la pluralité des autres dans des singularités individuelles. Sans que pour autant nul n’y perde de son ipséité. » [càd lui-même ; le sujet dans sa singularité, sans confusion avec un autre »] in « Actualité de la psychothérapie institutionnelle » sous la dir. de DELION (P) Matrice Pi 1994.  

Pack MEDIATIONS

N° 154 Théâtre et psychiatrie
N° 172 Le cadre thérapeutique
N° 189 Des jeux pour soigner en psychiatrie
N° 226 Des activités "thérapeutiques"
N° 236 Les groupes de parole
N° 255 Médiation animale en psychiatrie

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