Soins sans consentement : « Non au fichage des patients »

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« Non au fichage des patients, non à une psychiatrie policière, oui à une psychiatrie soignante » : Dans un communiqué, l'Association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (ASPMP) réagit au récent décret autorisant les traitements de données personnelles des personnes suivis en soins psychiatriques sans consentement (lire notre article).

« En août 2017, l’ASPMP faisait un communiqué intitulé : « La psychiatrie n’est pas la 4e force de sécurité de la France », réagissant à des propos du ministre de l’Intérieur. Ce que le ministre de l’Intérieur n’a pas pu faire directement, la ministre de la Santé l’a fait en signant le décret n° 2018-338 du 23 mai 2018 autorisant les traitements de données à caractère personnel relatifs au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement (1).

Ce décret fait suite à la mesure 39 du plan national de prévention de la radicalisation de février 2018 (2) qui prévoit pour mobiliser les professionnels de la santé mentale « d’actualiser les dispositions existantes relatives à l’accès et à la conservation des données sensibles contenues dans l’application de gestion des personnes faisant l’objet d’une mesure de  soins psychiatriques sans consentement (HOPSY) ».

Ainsi, sous le prétexte de lutter contre la radicalisation, avec le préjugé fréquemment répandu qu’il faut être  un malade mental pour se lancer dans une radicalisation religieuse terroriste, alors que les études font largement état d’une absence de maladie mentale chez ces personnes, tous les patients en soins sans consentement font devoir faire l’objet d’un signalement au préfet, avec un panel extrêmement impressionnant d’autorités qui vont être systématiquement informées.

Si le préfet a obligatoirement connaissance des personnes qui font l’objet de soins sur décision du représentant de l’État (SDRE), il n’est pas acceptable qu’une personne hospitalisée sans son consentement, sur décision du directeur de l’établissement de santé (soins sur demande d’un tiers/SDT), fasse l’objet d’un fichage auprès de la préfecture. Pourquoi une personne hospitalisée sans son consentement parce qu’elle présente un état dépressif, qu’elle peut vouloir se suicider doit-elle faire l’objet d’un signalement au préfet ?

La stigmatisation de la maladie mentale, la difficulté à faire changer les représentations sur la psychiatrie ont encore de « beaux jours » devant elle en confondant maladie mentale et risque terroriste. Dans un passé récent, le pouvoir politique avait souhaité assimiler la maladie mentale à la délinquance. La mobilisation des professionnels l’avait fait reculer. Les professionnels de la santé mentale et les usagers doivent poursuivre cette mobilisation.

Enfin, alors que le gouvernement clame son désir profond et « sincère » d’associer la société civile à la réforme du pays, ces dispositions s’imposent sans concertation, sans même informer les instances pilotées par lui, notamment le comité de pilotage de la psychiatrie.

Recours et mobilisations diverses ne vont pas se faire attendre. »

1– https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2018/5/23/SSAP1811219D/jo/texte
2– https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2018/02/2018-02-23-cipdr-radicalisation.pdf