Raf (Valeria Bruni Tedeschi) et Julie (Marina Foïs), un couple au bord de la rupture, se retrouvent dans un service d’Urgences proche de l’asphyxie le soir d’une manifestation parisienne des Gilets jaunes. Leur rencontre avec Yann (Pio Marmaï), un manifestant blessé et en colère, va faire voler en éclats les certitudes et les préjugés de chacun. À l’extérieur, la tension monte. L’hôpital, sous pression, doit fermer ses portes. Le personnel est débordé. La nuit va être longue… Ce scénario est celui du dernier film de Catherine Corsini intitulé « La fracture », en salle le mercredi 27 octobre 2021.
La réalisatrice Catherine Corsini le raconte ainsi : « En tombant et en me retrouvant la nuit du 1er décembre 2018 aux Urgences de l’hôpital Lariboisière, j’ai trouvé la clé d’entrée du film et comment la faire résonner avec le climat social ambiant. Toute la nuit, j’ai observé le ballet de l’organisation hospitalière, la tension des soignants débordés souvent attentifs mais n’ayant pas toujours le temps d’être aimables, les patients réunis dans la salle d’attente, avec des chocs physiques plus ou moins importants, des angoisses, le besoin de se confier à quelqu’un… C’est d’autant plus criant à l’hôpital Lariboisière, qui est proche des gares et brasse une population assez miséreuse, des personnes de passage, des toxicos, des cas psychiatriques, des mineurs isolés… Après avoir vécue cette expérience, je me suis dit que cette arène des Urgences était le lieu idéal pour raconter ce qui me préoccupait. Plonger un couple de femmes d’un milieu social aisé dans cet endroit pouvait donner lieu à des échanges, des confrontations, et rendre compte des contrastes et des fractures de la société« .
« Il était complexe de trouver le ton et l’équilibre du film, qui est sur le fil entre comédie et tragédie humaine et sociale, qui mêle le documentaire à la fiction ».

Et de poursuivre : « Toutes les infirmières que j’ai croisées m’ont dit qu’elles riaient beaucoup entre elles. Elles ont besoin de cet humour cathartique pour tenir et pour supporter parfois des choses très dures. De la même manière, le film devait amener de l’humour pour ne pas sombrer dans le misérabilisme, la simple dénonciation de ce que l’on sait déjà. Je pense que cette jubilation par le rire fait qu’on est encore plus saisi par les blessures et par la dureté de ce que vivent les Gilets jaunes blessés, à travers lesquels sont montrés les violences policières. Et leur absurdité. Les policiers sont des fonctionnaires de l’État, et ils tapent sur des gens qui vont être soignés par… des fonctionnaires de l’État ! »
« Travailler avec de vrais soignants m’a permis d’être toujours juste. Leur rapidité, leur manière d’utiliser le matériel médical ramène là encore quelque chose de la vie et du mouvement de l’hôpital et surtout leur engagement. Ils m’ont donné de la légitimité ».
« Je voulais que le social et l’intime résonnent. La crise des Gilets jaunes a poussé la société à se remettre en question. Mes personnages sont peut-être dans un confort de vie mais pas dans un confort de couple. Il a suffi d’un événement comme cette chute, puis de cette nuit passée à l’hôpital, pour que tout d’un coup les choses soient remises en perspective. (…) C’est peut-être un peu utopique et naïf mais j’avais envie de faire un film qui ressemble à ce que je ressens de notre société, à ce que j’aimerais qu’elle devienne : une société dans l’ouverture plutôt que dans le rejet ou la position de force. J’avais envie de donner une visibilité à l’idée d’un avenir à la fois plus humain, démocratique et respectueux » conclut la réalisatrice.
« Par son entremise, l’hôpital devient ainsi subrepticement le personnage principal ».
Et vous retrouverez Caroline Estremo, infirmière aux urgences, qui joue son propre rôle !
• La Fracture, de Catherine Corsini, avec Valéria Bruni-Tedeschi, Marina Foïs, Pio Marmaï et Aïssatou Diallo Sagna, drame, 1h38, en salle le 27 octobre 2021. Crédit photos : Carole Béthuel.
