« Ricochet » est un travail de recherche mené par une équipe de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes)1, qui vise à objectiver à l’échelle nationale les variations du recours à l’isolement et à la contention mécanique en psychiatrie entre établissements et à en identifier les principaux facteurs. Dans la continuité des précédents travaux, et notamment du projet Plaid-Care, il s’agit notamment d’éclairer les résultats quantitatifs par des éléments qualitatifs. Résultats attendus fin 2024.
Contexte scientifique
Le champ de la psychiatrie reste caractérisé par des pratiques privatives de liberté controversées dont l’isolement et la contention mécanique. Ces dernières, qui se situent au croisement d’enjeux thérapeutiques, éthiques et légaux, constituent des pratiques de dernier recours destinées à répondre à des situations de crise et ne devant ainsi être mises en œuvre qu’à titre exceptionnel, de façon proportionnée et graduée, après échec de mesures moins restrictives, avec une durée limitée et sur la base d’arguments cliniques. Certaines de ces pratiques, comme la contention, n’ont cependant pas démontré de bénéfices thérapeutiques propres et comportent des risques pour les personnes du fait de possibles effets indésirables (déshydratation, problèmes circulatoires et cutanés, atrophie musculaire, stress post traumatique, aggravation des symptômes du trouble psychique…). En conséquence, la limitation de leur usage figure à l’agenda politique international. Rappelons qu’en France, le recours à l’isolement et à la contention en psychiatrie n’est autorisé que dans le cadre de soins sans consentement et est encadré par des recommandations de la Haute Autorité de santé depuis 2017. Sa réduction figure par ailleurs parmi les objectifs de la Feuille de route ministérielle santé mentale et psychiatrie soutenue par un cadre législatif à visée dissuasive, dont la complexité de mise en œuvre pour les équipes soignantes est régulièrement soulignée. Pour accompagner ces évolutions récentes, un nouveau recueil obligatoire des mesures d’isolement et de contention mécanique a été mis en place auprès des établissements de santé à partir de 2018. Il ouvre désormais de nombreuses perspectives pour mieux documenter l’usage de ces mesures et faciliter une évolution adéquate des pratiques.
Objectifs
Dans ce contexte, la recherche intitulée RICOCHET – Recours à l’Isolement et à la COntention en psyCHiatrie entre ETtablissements – vise à objectiver à l’échelle nationale d’éventuelles variations du recours à l’isolement et à la contention mécanique en psychiatrie entre établissements et à en identifier les principaux facteurs associés (caractéristiques des personnes prises en charge, des offreurs de soins et de leur environnement) – pouvant ainsi éclairer des politiques publiques soutenant les équipes soignantes dans la mise en œuvre des ambitions politiques de réduction du recours à la contrainte en psychiatrie.
Méthode
Nous mobilisons comme source de données principales le Recueil d’informations médicalisé en psychiatrie (Rim-P). Ce recueil regroupe les données administratives et médicales permettant de suivre la consommation de soins hospitaliers dans le champ de la psychiatrie. D’autres bases de données seront également mobilisées pour caractériser l’offre de soins et les territoires, notamment la Statistique annuelle des établissements de santé (SAE), le Fichier national des établissements sanitaires et sociaux (Finess) et les bases de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
Pour l’analyse des variations entre établissements, une approche positive qui consiste à comparer les pratiques aux pratiques moyennes selon une base de référence fondée sur « ce qui est » sera préférée à une approche normative, qui consiste à comparer les pratiques à une norme de bonne pratique clinique (« ce qui devrait être »), en l’absence de « juste » niveau de recours établi et consensuel pour les mesures d’isolement et de contention mécanique en psychiatrie.
Résultats attendus
Cette recherche permettra de caractériser l’étendue des variations du recours aux pratiques d’isolement et de contention mécanique en psychiatrie à l’échelle nationale en France, et d’en informer les différentes parties prenantes – ce qui représente un préalable indispensable à une réduction de ces variations. Par ailleurs, cette recherche permettra d’identifier des leviers pouvant être mobilisés par des politiques ciblées pour soutenir et faciliter le travail des équipes soignantes dans la mise en œuvre des objectifs de réduction du recours aux pratiques d’isolement et de contention en psychiatrie souhaités par les pouvoirs publics.
1- Equipe Irdes : Esther Touitou-Burckard, Coralie Gandré, Magali Coldefy (Irdes), en collaboration avec le consortium Plaid-Care – Psychiatrie et liberté individuelles : étude d’établissements caractérisés par un moindre recours à la coercition – Question d’économie de la santé (QES), n° 269, juin 2022.
• D’après le résumé des auteurs, Irdes.