Le premier épisode psychotique (PEP) est un trouble sévère pouvant inclure des idées délirantes, des troubles cognitifs et des conduites suicidaires. Il évolue dans la majorité des cas vers une schizophrénie. De nombreux travaux montrent que la rapidité de la prise en charge initiale du PEP réduirait le risque d’évolution péjorative et impacterait de manière décisive le pronostic à court et à long terme (1) (lire aussi Santé mentale n° 209, juin 2016). La rapidité de cette prise en charge peut être mesurée par la durée de psychose non traitée, ou DUP (Duration of Untreated Psychosis), intervalle de temps entre l’apparition des premiers symptômes psychotiques francs d’une part et l’initiation d’une prise en charge psychiatrique adéquate d’autre part. Une DUP inférieure à 6 mois est considérée comme un facteur de bon pronostic. Ainsi, la DUP constitue un indicateur facilement mesurable, robustement lié au pronostic et potentiellement modifiable, ce qui a conduit à sa large utilisation pour guider le développement de programmes d’identification précoce.
De grandes disparités existent à travers le monde, entre différents pays et même différentes régions. Ainsi, si la DUP est en moyenne de 14,8 mois, elle est plus courte dans les pays occidentaux, surtout ceux qui ont développé des programmes destinés aux PEP (2). La France accuse un retard anormalement marqué, avec une DUP moyenne d’au moins 18 mois (3).
Plusieurs éléments peuvent contribuer à expliquer cet état des lieux en France : absence de programme de soins spécifiques destiné aux PEP dans la grande majorité des centres psychiatriques, stigmatisation importante des maladies psychiatriques, opacité de fonctionnement des soins psychiatriques et méconnaissance de son organisation, en particulier par le réseau de soins premiers recevant en première ligne les patients présentant un PEP. A ce jour, il n’existe pas en France de programme systématique conçus pour identifier rapidement les patients PEP et hâter leur prise en charge spécialisée.
L’objectif de cette étude est de montrer l’impact d’une intervention facilitant l’accès aux soins spécialisés des PEP sur la réduction de la DUP. Cette intervention consiste en un programme d’identification précoce des PEP, le programme PRESTO, ciblant spécifiquement 3 étapes déterminantes dans la réduction de la DUP (voir schéma) :
– Information de la population générale sur les troubles psychotiques
– Connaissance des acteurs de première ligne (APL : médecins généralistes, médecine scolaire et universitaire, maison des adolescents, réseaux associatifs, éducateurs, SAMU, pompiers…) sur le PEP et sa prise en charge
– Articulation entre APL et soins spécialisés psychiatriques.
De surcroit, cette étude cherchera à analyser les facteurs d’implémentation d’une telle intervention en vue d’une possible généralisation et pérennisation.
L’étude se déroulera dans 5 centres (Clermont-Ferrand, Lyon, Montpellier, Nîmes, Saint-Etienne) composés chacun d’un territoire incluant un centre PEP spécialisé et défini selon le bassin de prise en charge de ce centre. L’étude doit être mise en place courant 2020 et portera jusqu’en 2024.
1– Marshall M., Lewis, S, Lockwood, A, et al (2005). Association between duration of untreated psychosis and outcome in cohorts of first-episode patients : a systematic review. Arch. Gen. Psychiatry 62, 975-983. 2– Connor C., Birchwood M., Freemantle et al (2016). Don’t turn your back on the symptoms of psychosis : the results of a proof-of-principle, quasi-experimental intervention to reduce duration of untreated psychosis. BMC Psychiatry 16, 127. 3– Fond G., Boyer L., Andrianarisoa M., et al. (2017) FACE-SZ (FondaMental Academic Centers of Expertise for Schizophrenia) group. Risk factors for increased duration of untreated psychosis. Results from the FACE-SZ dataset. Schizophr Res. 2017 ;195:529-533.
- Contact : Pr Éric Fakra, Éric.Fakra@chu-st-etienne.fr.