La souffrance psychique des exilés, une urgence de santé publique

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À l’occasion de la Journée mondiale des Réfugiés, le 20 juin, le Centre Primo Levi et Médecins du Monde publient le rapport « La souffrance psychique des exilés. Une urgence de santé publique ». Tous deux engagés dans l’accueil et le soin des personnes exilées, ces deux organismes dressent un tableau alarmant de la situation, assorti de nombreux exemples, et s'appuient sur de bonnes pratiques pour émettre des propositions pour une réponse de santé publique adaptée à l’enjeu majeur que représente la santé mentale de ces personnes. Les enseignements du rapport sont repris dans un communiqué.

Un contexte de souffrances psychiques graves

Les structures d'accueil voient arriver sur le sol français des personnes brisées. Par les violences qu’elles ont vécues dans leur pays d’origine, mais aussi sur leur parcours d’exil, et pour beaucoup d’entre elles encore sur le sol européen. La souffrance psychique constitue un très lourd fardeau, qui empêche bien souvent les exilés d’avancer. Pourtant, à leur arrivée, ce ne sont pas un accueil et des soins qui leur sont proposés, mais un tunnel rempli d’obstacles de toutes sortes. Lorsque la précarité et l’hostilité redoublent les effets des traumatismes, voire en créent de nouveaux, ces personnes entrent dans un cercle vicieux dont il devient très compliqué de sortir.

Par ailleurs, le projet de loi asile et immigration (actuellement en cours d'examen au Sénat) durcit considérablement l’accès au séjour et à l’asile, ainsi que les conditions d’accueil et d’expulsion des exilés en France, dont beaucoup sont durement éprouvés. Les effets induits de la procédure dite de Dublin viennent aggraver la situation de ces personnes. Les équipes professionnelles, salariées ou bénévoles qui tentent d’assurer au mieux leur accompagnement s’en alarment : l’offre de soins en santé mentale est très limitée voire inexistante selon les régions. Les équipes se retrouvent seules et impuissantes face à des troubles qui, sans prise en charge adaptée, ne peuvent que s’aggraver et même rejaillir sur elles.

Le Centre Primo Levi et Médecins du Monde formulent différentes recommandations pour :

– L’amélioration des conditions de vie et d’accueil des personnes, dans le respect des droits humains fondamentaux ;

– La protection effective des mineurs non accompagnés (MNA) ;

– La production de savoirs, de données et d’enquêtes concernant les personnes exilées, leur parcours et leur souffrance psychique ;

– La promotion du travail en réseau et de la pluridisciplinarité (social, juridique, médical, somatique et psychologique / psychiatrique) dès le premier contact ;

– La promotion et le financement du recours à l’interprétariat professionnel ;

– L’amélioration des connaissances et la prise en compte des effets des troubles psychotraumatiques ;

–  La facilitation de l’accès à une couverture maladie ;

– La proposition d’un bilan de santé somatique et psychique permettant les examens de dépistage à toutes les personnes obtenant l’AME ;

– Le renforcement des dispositifs facilitant l’entrée dans le soin (PASS, EMPP, dispositif de proximité, mobile…) ;

– Le développement de la formation et de l’information des professionnels de santé, du secteur social et des personnes sur les lieux d’accueil des exilés ;

– Le renforcement et l’adaptation des structures de prise en charge, la psychiatrie hospitalière et de secteur.

  • La souffrance psychique des exilés, une urgence de santé publique. Médecins du monde, Centre Primo Levi, juin 2018, 36 pages, en téléchargement.