Plus qu’une traductrice, une infirmière bilingue, en conjuguant compétences cliniques et connaissances culturelles, peut jouer un rôle de médiatrice dans la relation soignant-soigné. C’est ce que montre une étude réalisée par Krishny Mariadas, infirmière en pratique avancée (IPA) à l’EPS de Ville-Evrard. Son travail a remporté le Prix du meilleur poster lors de la Journée d’automne de la pratique avancée et des sciences infirmières en psychiatrie et santé mentale du Vinatier.
La diversité croissante de la population met le système de santé au défi de fournir des soins de qualité malgré la présence d’une barrière linguistique et culturelle. L’interprétariat est alors reconnu comme une nécessité et un levier particulièrement important en santé mentale pour permettre la communication entre les patients migrants et les soignants.
Toutefois, en pratique, le rôle de ce tiers dans la consultation médicale peut être flou et susciter des tensions : son intervention introduit un troisième acteur dans la relation soignant-soigné. Il existe peu de travaux sur la distinction entre les différents types d’interprètes ou sur l’impact de la collaboration avec une infirmière bilingue en tant qu’interprète sur la qualité des soins psychiatriques.
C’est dans ce contexte que Krishny Mariadas, IPA, EPS de Ville Evrard (93), a réalisé une étude qualitative pour explorer le vécu des psychiatres concernant les effets du recours à des interprètes professionnels ou à des infirmières bilingues travaillant en psychiatrie sur la qualité des soins des patients migrants allophones dans le cadre de leurs consultations. Huit entretiens semi-dirigés ont été conduit auprès de psychiatres.
Une fonction de médiatrice à valoriser
L’analyse met en évidence que l’interprète est une personne ressource mais l’interprétariat reste complexe particulièrement dans le domaine de la psychiatrie et de la santé mentale et impose plusieurs prérequis et compétences spécifiques.
– Différents besoins de formation ont été identifiés : former les interprètes professionnels à la spécificité de la psychiatrie et les psychiatres à la compétence culturelle.
– Les bénéfices du recours aux infirmières bilingues sont multiples car elles permettent de mieux distinguer ce qui relève de l’expression d’une culture donnée sans lien avec des symptômes psychiatriques d’une symptomatologie psychiatrique qui n’aurait pas les mêmes manifestations et interprétations en Occident. Elles allient alors la compétence culturelle et la compétence clinique et occupent une fonction de médiatrice. Néanmoins, leurs interventions nécessiteraient d’être pensées officiellement et valorisées au niveau institutionnel.
• En savoir plus : L’interprétariat en santé mentale : de l’interprète professionnel à l’infirmière bilingue, Krishny Mariadas, Mouhanad Alquntar, EPS de Ville Evrard, Poster, 2024, voir en pdf. Contact : k.mariadas@epsve.fr