L’histoire des compétences en formation

FacebookXBlueskyLinkedInEmail

Que penser de la formation par les compétences qui remplace la formation par les connaissances ? Le site de l’association des responsables de formation (AFFEN) propose en accès libre un article de Stéphane Diebold sur cette question.

La formation par les compétences est une valeur sûre de la formation. Elle s’est déployée au début de notre siècle, à tel point qu’elle devient même synonyme de formation. Avec un quart de siècle de référence, il est possible de porter un regard distancié sur la naissance de ce concept et surtout de son actualité. Que penser de la formation par les compétences qui remplace la formation par les connaissances ? L’économie de la connaissance laisse place à l’économie de la compétence. S’agissait-il d’une véritable révolution, et quel avenir porter à ce concept pour préparer l’économie de demain ? L’entreprise, doit-elle encore mettre la compétence au cœur de ses parcours de formation ou doit-elle promouvoir une nouvelle forme de formation ? Que faut-il en penser ?

1, L’histoire de la compétence

Le père fondateur de la gestion par les compétences est dans les années 70, le psychologue américain David McCelland qui travaillait sur la performance individuelle. Malgré quelques expérimentations industrielles, la France a pris le virage de la compétence en 1984 avec la CEGOS qui a organisé un colloque sur le thème « La bataille des compétences, l’éducation professionnelle permanente au cœur des stratégies de l’entreprise » (Yves Cannac et CEGOS, Editions Hommes et techniques, 1985). Le virage conceptuel fut engagé et c’est en 1999 que le virage opérationnel avec l’ouvrage du sociologue français Philippe Zarifian « Objectif compétence » un cadre conceptuel global qui permet un passage de la « cotation du poste » à « l’évaluation de l’individu » qui occupe ce poste. En 1998, le CNPF, lors des Journée Internationale de la formation, propose comme bannière à l’ensemble des journées le livre de Philippe Zarifian, reprenant d’ailleurs son titre « Objectif compétences ». Il donne ainsi une caisse de résonnance à la gestion par les compétences dans l’organisation et bien sûr dans la formation.

« La compétence est une intelligence pratique des situations qui s’appuie sur les connaissances » (Zarifian ;1999). Si l’on reprend l’étymologie de la compétence, il s’agit de la rencontre, rencontre entre la connaissance et l’action, il s’agit donc de l’aptitude à transformer la connaissance en réalité, une connaissance mise en situation, savoir et faire. C’est à partir de ce moment que le responsable de formation a commencé à se faire appeler responsable des compétences. C’est l’illustration de la montée en puissance de l’individu dans le processus de formation, avec son corollaire, la responsabilisation de l’apprenant qui devient acteur de ses propres apprentissages. Le point d’orgue de cette politique est la loi Borloo, 18 janvier 2005 la GPEC, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. L’avenir, la prévision appartient aux compétences. On peut noter qu’outre le fait que la GPEC a peu prévu, que la compétence a été abandonné en 2017 au profit des parcours professionnels, la GEPP. Toutes les modes passent…

D’ailleurs si la compétence née dans les années 70/80 est concurrencée par un nouveau concept, le talent. D’où vient cette nouvelle mode ? D’un rapport McKinsey, 1997, qui lance « la guerre des talents » (https://www.researchgate.net/publication/284689712_The_War_for_Talent). Le concept est relativement flou, mais répond à une nouvelle problématique dans la performance des collaborateurs, la montée en puissance des soft skills. Les responsables de formation commencent déjà à s’appeler responsable des talents. Et cela à une certaine cohérence, dans un monde en disruption le faire ce que l’on connaît n’est plus suffisant, il faut faire aussi ce que l’on ne connaît pas. Autrement dit, s’adapter, les talents sont des compétences anticipées. La formation s’étoffe de nouvelles formes avec la standardisation du changement. D’ailleurs, le numérique le Big data et la prédictibilité ouvre des perspectives nouvelles, mais la standardisation sociale reste à faire.

Lire la suite