Quels seront les comportements alimentaires des plus de 70 ans d’ici 2030. Quels seront les produits consommés ? Quels critères d’achat seront essentiels aux yeux des personnes âgées de 70 ans ou plus : bio ? local ? végétarien ? Quels seront les lieux de prise de repas ? Comment s’approvisionneront-elles en produits alimentaires ? L’Institut Nutrition et le Credoc nous délivre un rapport pour y répondre.
D’aujourd’hui à demain, des aînés plus nombreux, plus individualistes et moins fragiles
En 2030, les personnes âgées de plus de 70 ans seront 12,3 millions en France métropolitaine. Les enjeux liés aux modes de consommation alimentaires concernent d’abord la prévention et la lutte contre la dénutrition. 10 % des personnes âgées de 70 ans ou plus à domicile et 40 % de celles résidant en institution sont en effet concernées. Mais la manière de s’alimenter dépasse cette seule question pour contribuer à l’insertion des personnes fragiles dans un réseau de sociabilité et procurer du plaisir et du bien-être. Ces enjeux vont se poser à des populations de septuagénaires et d’octogénaires différentes de celles que nous connaissons aujourd’hui. En effet, avec l’arrivée à ces âges des individus issus des premières générations de baby-boomers, les modes de consommation alimentaires des septuagénaires vont intégrer des attitudes et des comportements plus individualistes, plus revendicatifs, mais aussi une plus grande conscience de l’importance de l’alimentation dans la prévention des effets du vieillissement que ce qui prévaut aujourd’hui parmi les personnes âgées de 70 ans ou plus.
En 2030, les personnes âgées de 70 ans ou plus devraient représenter 12,3 millions d’individus en France métropolitaine.
Sur la décennie 2020-2030, l’état de santé des 70 ans ou plus devrait continuer de s’améliorer, entraînant un allongement de l’es-Dans le même temps, le nombre de personnes âgées dépendantes devrait croître à un rythme relativement faible. Le service statistique du ministère de la Santé estime ainsi que le nombre de personnes âgées dépendantes devrait s’établir entre 1,4 et 1,6 million d’individus en 2030, contre 400 000 personnes dépendantes de plus, à comparer à la croissance de 2,5 millions de personnes âgées de 70 ans ou plus sur la période.
Les conséquences de la crise sanitaire liée à la COVID-19 devraient ralentir la croissance du pouvoir d’achat des 70 ans ou plus. La proportion de personnes isolées chez les 70 ans et plus devrait progresser au cours de la décennie, conséquence de la jeune génération de retraités, de l’éloignement géographique pourcentage d’individus n’ayant pas eu de descendance dans les jeunes générations de septuagénaires.

Dans quels mondes vivrons les 70 ans et plus en 2030 ?
Dans un contexte où les déficits publics se seront beaucoup creusés pour faire face aux conséquences de la pandémie de la COVID-19 sur le système de santé, les entreprises et les ménages, la question de la stratégie des pouvoirs publics vis-à-vis des publics âgés fragiles à l’aune de 2030 mérite d’être posée. Deux types d’actions publiques ont ainsi été retenus qui déterminent deux scénarii différents en 2030 :
– En 2030, des actions collectives pour les personnes en perte d’autonomie ou dépendantes les plus fragiles : concentrer les actions publiques à destination en perte d’autonomie ou dépendantes, les plus fragiles économiquement ou en termes de sociabilité.
– En 2030, une incitation à la responsabilité individuelle : inciter les 70 ans ou plus à l’adoption de comportements de prévention – s’appuyer sur leur responsabilité individuelle ou celle de leur famille quel que soit le niveau de fragilité sociale et économique des aînés.
Quels enjeux en termes d’alimentation pour les plus de 70 ans en 2030 ?
En vieillissant, les troubles du comportement alimentaire, notamment la perte d’appétit, peut entraîner une dénutrition qui se traduit par des risques importants de carences. 400 000 personnes âgées à domicile et 270 000 en Ehpad souffrent de dénutrition. Les personnes âgées de 70 ans ou plus sont en effet celles qui couvrent le moins leurs besoins nutritionnels. Les nutriments identifiés comme présentant des risques de déficiences sont les (Oméga 3, DHA, Oméga 6) pour les capacités cognitives et les protéines pour les risques de sarcopénie. Lutter contre la dénutrition des personnes âgées, notamment celles en perte d’autonomie ou dépendantes passe par de multiples actions. Elles concernent les quantités d’aliments proposées, l’amélioration de leur qualité nutritionnelle, une quantification des nutriments, calories, protéines, vitamines, minéraux, une modification des textures ou la proposition de compléments également l’environnement des prises alimentaires à travers l’agencement et l’ambiance de la salle à manger ou de restauration (design des assiettes, des tables, couleur des murs, ambiance musicale, température…). La taille des ustensiles importe également. Si les assiettes sont grandes en comparaison, les portions alimentaires seront perçues comme petites et seront donc plus facilement consommées. Enfin, le rôle des aidants, leur présence auprès des personnes âgées, la formation reçue pour dépister et prendre en charge les personnes dénutries jouent un rôle essentiel.
Adopter des comportements alimentaires de prévention du vieillissement ou intégrer une dimension de médicalisation de l’alimentation, peuvent-ils aller de pair avec la valorisation du plaisir gustatif ?
Plus instruits, ayant été confrontés pour la plupart au vieillissement de leurs parents, conscients qu’ils vivront plus longtemps que les générations précédentes, les plus de 70 ans capitaliseront en 2030 plusieurs conditions favorables à l’adoption de comportements de prévention des effets du vieillissement. L’attention portée à la nutrition pourrait ainsi être de plus en plus forte parmi les plus de 70 ans. Conjugué au vieillissement croissant de la population, le fait que les aînés dépendants seront nettement plus nombreux à résider à leur domicile peut avoir cependant un impact fortement négatif sur leur état de santé en augmentant le risque de dénutrition, si, en parallèle, la prise en charge des aidants (familiaux, professionnels) n’est pas suffisante.
Une alimentation adaptée aux nouveaux besoins : il s’agira d’imaginer des dispositifs permettant de proposer une alimentation adaptée aux besoins nutritionnels l’homogénéisation des pratiques et solutions de repas.
En pratique, quelle alimentation pour les plus de 70 ans en 2030 ?
– Pour la minorité d’aînés fragiles restés à leur domicile, des bénévoles regroupés au sein d’un tissu associatif dense inciteront à fréquenter des lieux de restauration sociale autogérés.
– Une ouverture des restaurants des EHPAD pour les personnes en perte d’autonomie restées à domicile également de prendre les repas au sein de ces établissements sans y résider.
– Bio et local : l’intérêt pour les produits locaux, de saison et l’agriculture biologique sera plus fort qu’aujourd’hui parmi ces populations.

Un premier scénario protecteur des plus fragiles devant prendre en compte l’individualisation des pratiques alimentaires pour éviter le risque d’un rejet des jeunes générations d’aînés face au risque de standardisation de l’alimentation. Un deuxième scénario pour inciter les plus de 70 ans à adopter des comportements de consommation alimentaires prévenant les conséquences du vieillissement. Dans ce dernier, l’enjeu sera d’autant plus important qu’il s’agit ainsi de contribuer à ce que les personnes puissent vivre dans de bonnes conditions de santé à leur domicile le plus longtemps possible. Les entreprises de l’agroalimentaire devront valoriser dans leurs actions marketing les aliments ayant un impact en termes de prévention santé. Des gammes d’alimentation bien-être, d’alimentation tonus. Les plus de 70 ans autonomes souhaiteront vérifier que leurs apports nutritionnels sont garantis. Un Silverscore qui visera à apporter des informations nutritionnelles spécialement adaptées aux septuagénaires. Pour les personnes âgées dépendantes ou en perte d’autonomie restant à leur domicile (solution privilégiée dans ce scénario), le rôle des aidants s’avèrera essentiel.
Le fait maison aura continué de se développer même s’il ne dominera sans doute pas les préparations des repas des plus de 70 ans autonomes. La livraison de repas ne sera une solution largement utilisée que si elle correspond aux goûts des aînés en perte d’autonomie, à leur manière de préparer les repas, et qu’elle est adaptée à leurs problèmes de santé.

• Que mangeront nos aînés en 2030 ? Rapport de l’Institut Nutrition et du Crédoc, octobre 2022 (PDF)