Lorsque la personne souffrante n’est pas ou plus à même de donner son avis, exigence pourtant requise au regard du respect de l’intégrité du corps humain (1), le corps médical peut se retrouver démuni. En 1998, le Comité consultatif national d’éthique s’était penché sur le sujet (2), jetant les bases de ce qui allait devenir en 2022 la personne de confiance (3).
Le texte de loi définit précisément le rôle et les missions de cet acteur. Soulignons que le législateur na jamais voulu créer une relation tripartite entre l’hôpital, le patient et la personne de confiance le patient, et lui seul, décide de la place qu’il souhaite lui accorder.
La personne de confiance revêt un rôle secondaire, consultatifs, s’apparentant à un soutien pour le patient et à une aide pour le corps médical dans la prise de décision lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté.
L’obligation d’informer le patient
Toute personne majeure (4) peut ainsi, sans obligation aucune, désigner par écrit une personne de confiance : un parent, un proche ou le médecin traitant. L’hôpital a l’obligation d’informer le patient lors de son admission de cette possibilité. la loi ne précise pas la qualité des professionnels chargés de la délivrance de cette informations administrative, mais une attention particulière doit être portée à cette démanche, afin que le malade puisse bien comprendre et appréhender les mission de ce tiers. Ce point est devenu d’autant plus important que la personne de confiance s’est vue attribuer au fil des années des missions sensibles concernant la fin de vie.
En psychiatrie, l’information peut être différée selon l’état de santé de la personne admise en soins sans consentement (5). À ce stade, il n’est pas rare que le patient ne perçoive pas l’importance du rôle de cette personne et propose de désigner un autre patient, voire un professionnel de santé : « j’ai confiance en toi », confie-t-il, ce qui n’est bien-sûr pas l’esprit du texte. il faut donc respecter la temporalité du patient, et l’informer à bon escient. Des outils peuvent être pensés : à l’EPSM de Lille-Métropole, un triptyque de présentation du concept (6) peut ainsi être remis au patient pour l’aider dans sa réflexion. Toutes les actions doivent être tracées dans le dossier du patient. Notons que pour les patients en soins libres (7), l’information ne peut être différée.
Missions
Dans le secteur sanitaire, les missions dépendant de l’état de santé du patient. Si le patient est apte à exprimer sa volonté, la personne de confiance pourra, selon son souhait, assister aux entretiens médicaux et l’accompagner dans ses démarches. Si le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, elle sera consultée.
Elle n’est cependant titulaire d’aucun droit spécifique et n’est pas juridiquement habilitée à accéder aux informations administratives et médicales. Ainsi, elle ne peut pas consulter le dossier médical du patient. Par ailleurs, c’est seulement sans le cas où l’intéressé n’est pas à même d’exprimer sa volonté que des informations ciblées nécessaires à la prise de décision peuvent être communiquées à la personne de confiance.
Cet interlocuteur n’est pas davantage autorisé à connaître l’identité des visiteurs ni des accompagnateurs lors des autorisations de sortie de courte durée de moins de 12 heures. Ces précisions sont importantes car il est classiquement observé que la personne de confiance s’estime fondée à solliciter des informations relatives au déroulement du séjour. De même, elle peut tendre à imposer sa présence au cours des entretiens médiaux. Le psychiatre peut alors s’appuyer sur les dispositions du Code de la santé publique pour limiter l’exercice de ce droit, pour des raisons « nécessitées par (l’)état de santé et la mise en œuvre (du) traitement » (8). Une telle limitation ne peut être décidée qu’au cas par cas et doit être proportionnée à son objet.
Évolution du concept
Le rôle de la personne de confiance a évolué au fil des années selon le cadre juridique de prise en soins :
– 2005 : nouvelles missions dans le cadre de la fin de vie (9).
– 2011 concernant les personnes en soins sans consentement, la personne de confiance peut accompagner le patient dans le cade des autorisations de sortie de courte durée (ASCD) n’excédant pas 12 heures (10).
2015 : missions nouvelles concernant l’accompagnement du résident médico-social (11).
2016 : modification de la loi Léonetti de 2005 ouvrant la possibilité pour le majeur protégé de désigner une personne de confiance, recueil de la signature du patient et de la personne désignée au sein du formulaire de désignation. Dans ce contexte précis, on observe que les personnes désignées sont parfois réticentes à signer un document officiel concernant une personne hospitalisée en psychiatrie et qu’elles se posent des questions sur leurs responsabilités et le cadre juridique de l’hospitalisation.
personne de confiance / personne à prévenir
La réglementation prévoit l’identification dans le dossier du patient d’une personne à prévenir, à distinguer de la personne de confiance (13). Son rôle n’est pas légalement défini. Sa désignation renvoie à des usagers hospitaliers permettant de disposer des coordonnées d’un proche. Elle peut être sollicitée par l’équipe médicale pour tout évènement dans le cadre d’une prise en soins notamment en cas d’aggravation de l’état de santé de la personne hospitalisée.
Pour bien cerner la différence entre ces rôles, retenons que :
- une seule personne de confiance peut être désignée ;
- plusieurs personnes à prévenir peuvent être désignées ;
- rien n’interdit de désigner la même personne.
Durée de la désignation
La législation précise clairement la durée du mandat de la personne de confiance dans le cadre d’une hospitalisation : « Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, (…) il est proposé au patient de désigner une personne de confiance (…). Cette désignation est valable pour la durée de l’hospitalisation, à moins que le patient n’en dispose
autrement. » (14). Une réflexion convient d’être menée autour de l’exercice du droit de désigner une personne de confiance dans le cadre de soins ambulatoires. Ce contexte peut être l’occasion de sensibiliser le patient à l’exercice de ce droit. La désignation peut être anticipée et tracée dans le dossier du patient. Tel est le sens des dispositions légales suivantes : « Dans le cadre du suivi de son patient, le médecin traitant s’assure que celui-ci est informé de la possibilité de désigner une personne de confiance et, le cas échéant, l’invite à procéder à une telle désignation. » (15). Le législateur tend de plus en plus à décliner des dispositifs d’anticipation en permettant au patient majeur apte à exprimer sa volonté de pouvoir préciser ses souhaits : les directives anticipées (en vue de l’arrêt éventuel de traitement) (16), le mandat de protection future (17), la possibilité de s’opposer de son vivant à l’accès au dossier médical par les ayants droit (18), le
don d’organes (19). Dans le cadre de prise en soins longue, il convient néanmoins de réinterroger le choix de la personne de confiance en vue de s’assurer de son maintien. À tout moment, le patient peut révoquer la désignation de son
choix et nommer un nouvel interlocuteur. Le caractère révocable de la désignation constitue une autre difficulté pratique en psychiatrie. Le patient souffre en effet de troubles qui peuvent affecter sa pensée et le conduisent à changer souvent d’avis. La question du sens viendra naturellement se poser. Un proche tente aussi parfois de « s’auto-désigner », ce qui n’a aucune valeur juridique. Précisons enfin que la personne de confiance est libre d’accepter ou non la désignation et que rien ne s’oppose à ce qu’elle se désiste au moment où elle le souhaite.
Valériane Dujardin-Lascaux,
Juriste, EPSM Lille-métropole,
Marine Le Guen,
Responsable des affaires juridiques, EPSM de Ville Evrard.
1– L’article 16-3 du Code civil dispose : « Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui. Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. ».
2– Avis n° 58 du 12 juin 1998, « Consentement éclairé et information des personnes qui se prêtent à des actes de soin ou de recherche ».
3– Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : création du concept de personne de confiance pour le secteur sanitaire, Article L.1111-6 du Code de la santé publique. « Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin. Elle rend compte de la volonté de la personne. Son témoignage prévaut sur tout autre témoignage. Cette désignation est faite par écrit et cosignée par la personne désignée. Elle est révisable et révocable à tout moment. Si le patient le souhaite, la personne de confiance l’accompagne dans ses démarches et assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions. Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, ou dans un hôpital des armées ou à l’Institution nationale des invalides, il est proposé au patient de désigner une personne de confiance dans les conditions prévues au présent article. Cette désignation est valable pour la durée de l’hospitalisation, à moins que le patient n’en dispose autrement. Dans le cadre du suivi de son patient, le médecin traitant s’assure que celui-ci est informé de la possibilité de désigner une personne de confiance et, le cas échéant, l’invite à procéder à une telle désignation. Lorsqu’une personne fait l’objet d’une mesure protection juridique avec représentation relative à la personne, elle peut désigner une personne de confiance avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué. Dans l’hypothèse où la personne de confiance a été désignée antérieurement à la mesure de tutelle, le conseil de famille, le cas échéant, ou le juge peut confirmer la désignation de cette personne ou la révoquer. ».
4– L’article L.1111-6 susvisé exclut de facto la personne mineure.
5– L’article L.3211-3 du Code de la santé publique dispose, en son premier alinéa : « Lorsqu’une personne atteinte de troubles mentaux fait l’objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée. (…) ».
6– Triptyque conçu par Valériane Dujardin-Lascaux, proposé par l’EPSM Lille Métropole en ligne sur le site internet de l’AdESM, www.adesm.fr.
7– L’article L.3211-2 du Code de la santé dispose : « Une personne faisant l’objet de soins psychiatriques avec son consentement pour des troubles mentaux est dite en soins psychiatriques libres. Elle dispose des mêmes droits liés à l’exercice des libertés individuelles que ceux qui sont reconnus aux malades soignés pour une autre cause. Cette modalité de soins est privilégiée lorsque l’état de la personne le permet. ».
8– Article L.3211-3 du Code de la santé publique.
9– Loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie.
10– Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.
11– Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement.
12– Loi n° 2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.
13– « Le dossier comporte l’identification du patient ainsi que, le cas échéant, celle de la personne de confiance définie à l’article L.1111-6 et celle de la personne à prévenir. (…). » Article R1112-3 du CSP.
14– Article L.1111-6 du Code de la santé publique.
15– Précisions inscrites au sein du quatrième alinéa de l’article L.1111-6 du Code de la santé publique.
16– Articles L.1111-11 et suivants du Code de la santé publique.
17– Articles 477 et suivants du Code civil.
18– Article L.11110-4 du Code de la santé publique.
19– Articles L.1211-1 et suivants du Code de la santé publique.