La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté dénonce des mesures de restriction disproportionnées qui portent atteinte à l’intimité.
Dans les lieux de privation de liberté, comment concilier respect de l’intimité et obligation de surveillance ? Dans ce nouveau rapport thématique, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) explore la façon dont les personnes peuvent se préserver (ou non) du regard d’autrui, via de nombreuses situations de vie quotidienne, et dénoncent des pratiques non respectueuses de l’intimité, ou disproportionnées, y compris en psychiatrie.
- Vivre sous le regard des autres. Cette dimension est en cause par la conception même des lieux, qui facilite la visibilité des patients. Des pratiques intrusives de surveillance (caméra dans les espaces collectifs et en chambre d’isolement) sont dénoncées.
- Se faire fouiller. En psychiatrie, la question de « la préservation de l’intimité est posée à chaque fois que plusieurs soignants restent dans la chambre d’isolement pendant que le patient est aidé à revêtir un pyjama ». Plus globalement, la « fouille » des effets personnels et des chambres ne doit pas être banalisée.
- Être soumis à la force et à la contrainte. Le recours à la contrainte physique, quelle qu’en soit la forme, entraîne par nature le risque de violences sur les personnes. Dans ce registre, les pratiques « ne doivent intervenir qu’en dernier recours, après épuisement des autres moyens. »
- Ne pas pouvoir préserver son intériorité, en lien avec l’intrusion potentielle quasi-permanente des personnels ou d’autres patients.
- Satisfaire ses besoins élémentaires d’hygiène sans intimité. Les patients ne peuvent souvent pas fermer à clé leur chambre ni leur espace sanitaire. « Dans les chambres d’isolement, les sanitaires, quand ils sont attenants, sont presque toujours fermés et inaccessibles au patient sans en faire la demande aux soignants. »
- Être privé de ses biens. Les patients peuvent être défaits de certains objets, sans justification suffisante.
- Endurer l’absence de confidentialité des soins : « Les médicaments sont fréquemment distribués devant tous, pendant les repas ou à l’entrée de la salle de soins ». Aucune modalité de surveillance et de contrainte ne doit porter atteinte à l’intimité des patients pendant les soins.
- Être entravé dans ses relations avec l’extérieur. Alors que le téléphone portable est devenu le moyen courant d’entretenir des relations affectives et sociales, son retrait « systématique à l’entrée des patients en soins sans consentement est souvent la règle ».
- Ne pas pouvoir mener sa vie affective et sexuelle. « Dans la plupart des services de psychiatrie, un leitmotiv revient : “les patients ne sont pas là pour ça” », relèvent les contrôleurs, pour qui ce sujet doit faire l’objet d’une réflexion institutionnelle.
L’intimité au risque de la privation de liberté, CGLPL, éd. Dalloz, 2022, téléchargeable gratuitement sur www.cglpl.fr