La Haute Autorité de Santé publie son quatrième bilan annuel de retour d’expérience sur les évènements indésirables graves associés aux soins (EIGS). L’analyse des déclarations d’EIGS permet de les réunir par grands thèmes appelés regroupements. En 2020, 1081 EIGS ont été analysés par la HAS, ce qui porte à 3088 le nombre cumulé d’EIGS transmis depuis 2017. Ainsi, et comme les années antérieures, les regroupements les plus fréquents dans la base restent les EIGS en lien avec un contexte accidentogène (suicides et chutes de patients) ainsi que les erreurs médicamenteuses. Un chapitre est consacré aux EIGS en lien avec les neuroleptiques et les benzodiazépines.
Améliorer la qualité et la sécurité des soins est l’une des missions principales de la HAS, et c’est un enjeu majeur qui concerne tous les professionnels de santé exerçant en établissement, en ville ou dans le secteur médico-social. Le risque fait en effet partie de toute activité humaine, a fortiori dans un domaine complexe comme celui de la santé et tout professionnel de santé peut y être un jour ou l’autre confronté. C’est pourquoi la HAS promeut le développement d’une culture de la sécurité des soins qui soit partagée par l’ensemble des professionnels de santé.
« En 2020, les déclarations d’EIGS proviennent principalement des établissements de santé (83 %), puis du secteur médico-social (11 %), et enfin de la ville/domicile (3 %). Plus de la moitié des déclarations de l’année 2020 (51 %) proviennent des services de médecine, chirurgie et obstétrique ».
Dans la base des évènements remontés à la HAS : on constate que la proportion d’EIGS déclarés comme évitables reste élevée et majoritaire (56 % en 2020 contre 51 % en 2019). Les types d’EIGS qui reviennent le plus sont à nouveau les suicides (43 % des déclarations d’EIGS en lien avec un suicide ont eu lieu dans un autre secteur d’hospitalisation que le secteur psychiatrique selon le retour d’expérience national), les chutes et les erreurs médicamenteuses (cf. encadré cas particulier des neuroleptiques et benzodiazépines). Sur ces dernières, c’est l’erreur de dose de médicament qui est la plus fréquemment déclarée, devant l’erreur de médicament ou l’erreur de patient. Sur les 4 années de déclarations, les erreurs de doses représentent 47 % de l’ensemble des erreurs médicamenteuses déclarées (soit 169 erreurs de doses sur 362 erreurs médicamenteuses).
A retenir : La moitié des EIGS ayant conduit aux décès du patient sont évitables.

Chiffres clés L’analyse des EIGS de l’année 2020 dessine un portrait des personnes concernées et des circonstances de leur survenue : la majorité concerne des patients âgés de 60 ans et plus (54 %), survient lors d’un acte thérapeutique (80 %) plus qu’à l’occasion d’un acte diagnostique (12 %) et plutôt au cours des périodes de vulnérabilité que sont la nuit, le week-end et les jours fériés (58 %). Les établissements de santé demeurent ceux qui déclarent le plus (83 %), puis viennent les structures médico-sociales (11 %) et les professionnels exerçant en ville (4 %).
EIGS en lien avec les neuroleptiques et les benzodiazépines
Dans l’ensemble de la base EIGS, au 31 décembre 2020, 37 EIGS liés aux neuroleptiques et benzodiazépines ont été retrouvés.
Les neuroleptiques – Au total, 14 déclarations mettent en évidence des EIGS en lien avec des traitements par neuroleptiques ou neuroleptiques + associations. Ces EIGS concernent des hommes dans 57 % des cas. Les patients âgés de 60 à 80 ans représentent 38,5 % des cas. L’EIGS a conduit au décès dans 1 cas sur 2 et a été estimé évitable (« évitable » à « probablement évitable ») par le déclarant dans 79 % des cas. À l’origine de ces EIGS, il s’agit :
‒ d’erreurs liées à un surdosage (n = 6) ;
‒ d’erreurs liées à une absence de suivi thérapeutique dont l’absence de réévaluation du traite-ment neuroleptique et la sous-estimation du risque de fausse route ou d’occlusion intestinale chez un patient suivant un traitement par neuroleptiques (n = 4) ;
‒ d’erreurs d’identitovigilance chez des patients présentant des troubles cognitifs (n = 4).
Un exemple : décès des suites d’une occlusion intestinale d’une patiente hospitalisée en psychiatrie pour schizophrénie, traitée par clozapine.
Les benzodiazépines ou dérivés des benzodiazépines -Au total, 15 déclarations mettent en évidence un EIGS lié à des traitements par benzodiazépines ou dérivés des benzodiazépines. Ces EIGS concernent des hommes dans 47 % des cas. Les patients âgés de 60 à 80 ans représentent 29 % des cas. L’EIGS a conduit au décès du patient dans 13 % des cas et a été estimé évitable (« évitable » à « probablement évitable ») par le déclarant dans 60 % des cas. À l’origine de ces EIGS, il s’agit :
‒ d’erreurs liées à des surdosages soit par une prescription inadaptée, une erreur de posologie, soit par une erreur dans la programmation du dispositif médical (n = 7) ;
‒ d’erreurs de médicaments (n = 6) ;
‒ d’erreurs d’identitovigilance (n = 2).
Un exemple : Erreur de dose par erreur de programmation de pompe pour du midazolam chez un patient de plus de 70 ans, la nuit, dans un contexte de surcharge de travail.
Quid des tentatives de suicide
La HAS mène un travail spécifique sur les tentatives de suicides dont le rapport intégral sera publié en 2022. Le retour d’expérience national rapporte des résultats préliminaires et cibles de premières préconisations, notamment :
- deux axes d’amélioration pour les hôpitaux généraux que sont la modification de l’environnement hospitalier (sécurisation des locaux) et la formation des professionnels de soin ;
- accompagner les soignants et les équipes dans ces situations traumatisantes (seconde victime) ; la postvention doit être un élément indispensable de l’accompagnement des équipes et proches.

Selon la HAS, « la démarche de déclaration des EIGS constitue un levier essentiel pour comprendre les circonstances de survenue des EIGS, et pour permettre collectivement de les éviter, de réduire leur gravité, voire leur récurrence ; et de sortir ainsi de la culture de la faute ».
Pour aller plus loin
*Analyser les évènements indésirables graves associés aux soins pour agir sur la sécurité du patient, HAS, 20 janvier 2022, communiqué de presse
*Rapport annuel d’activité 2020 sur les évènements indésirables graves associés à des soins (EIGS), HAS, 20 janvier 2022
*Un condensé du rapport annuel sur les événements indésirables graves associés aux soins (EIGS), Année 2020, HAS, 20 janvier 2022