La réforme de la tarification des établissements et services médico-sociaux (ESMS), dite réforme Serafin-PH, arrive en 2019 à une étape importante. En effet, le 14 novembre, le Costrat Serafin-PH (comité stratégique) se réunit sous la présidence de Sophie Cluzel, Secrétaire d’État auprès du Premier ministre chargée des Personnes handicapées, pour définir les orientations que pourrait prendre le nouveau modèle de tarification des ESMS et élaborer la nouvelle feuille de route 2020-2021. En fonction du scénario retenu, l’impact sur les ESAT sera plus ou moins important, souligne l'Association nationale des directeurs et cadres d'ESAT (Andicat), qui précise sa position dans un communiqué.
Andicat, dès le départ, s’est interrogée sur la pertinence de cette réforme appliquée aux ESAT. En effet, depuis la convergence tarifaire, 90 % des ESAT en France ont un coût moyen d’environ 12 000 € à la place. Seuls 10 % des ESAT sont concernés par des écarts importants à la hausse ou à la baisse. Il aurait sûrement été pertinent, dans un premier temps, d’analyser avec ces structures les raisons de ces écarts plutôt que de mettre en œuvre une réforme en profondeur qui parait difficilement applicable aux ESAT.
Il nous parait également important de rappeler le glissement de la réforme qui est passée, au nom du virage inclusif, de la question de « comment financer les ESMS » à « qui finance-t-on ? ».
Trois scénarii ont été étudiés dans le cadre du Groupe Technique National :
• 1er scénario : financement des opérateurs sur la base d’un droit de tirage individuel, à partir des caractéristiques de la personne.
Dans ce scénario, les caractéristiques des personnes sont recueillies dans le cadre de l’évaluation dela situation individuelle et permettent de déterminer un panier de prestations qui pourra être personnalisé ou « standardisé ». Les opérateurs seront financés en fonction des prestations servies.
• 2ème scénario : financement des ESMS à partir des caractéristiques de la personne et de l’ESMS.
Dans ce scénario, la prise en compte des caractéristiques des personnes et des caractéristiques de l’ESMS permet d’asseoir et d’objectiver l’allocation de ressources à la structure.
• 3ème scénario : financement mixte
C’est un scénario qui propose un mixte des deux premiers, associant à la fois un financement des opérateurs via un droit de tirage individuel sur un périmètre restreint (cf. 1er scénario) et un financement des ESMS sur l’ensemble du périmètre restant (cf. 2ème scénario).
Ce scénario nécessite de délimiter le périmètre des prestations directes qui rentreront dans le droit de tirage individuel.
Là encore, ANDICAT s’interroge sur les premier et troisième scénarii étudiés. Dans ces deux modèles, le financement des opérateurs se ferait via un droit de tirage individuel : « Le droit de tirage représente l’ensemble des accompagnements dont la personne peut bénéficier suite à l’évaluation de sa situation personnelle. Ces accompagnements deviennent alors effectifs lorsque la personne utilise son droit de tirage en l’activant auprès d’un opérateur qui lui délivre une réponse. En contrepartie, l’opérateur perçoit un financement (en l’occurrence un financement public). »
Le financement des opérateurs sur la base d’un droit de tirage risque d’engendrer plusieurs effets pervers :
• La complexité du système pour les personnes en situation de handicap, surtout pour les moins autonomes.
• La dérégulation du secteur médicosocial par la mise en concurrence accrue par l’arrivée d’opérateurs privés.
• L’inégalité selon les territoires de l’accès effectif aux droits par le renforcement des inégalités entre les milieux urbains et les milieux ruraux.
Ces deux modèles apparaissent difficilement applicables au regard du statut du travailleur d’ESAT, le travailleur étant bénéficiaire de prestations dans le cadre de son accompagnement, mais aussi producteur de biens et de services pour lequel il touche une rémunération. Andicat continuera d’être vigilante sur les suites de la réforme de la tarification SERAFIN-PH et reste ouverte à la réflexion sur un modèle simple, spécifique, réaliste et applicable aux ESAT.