Des chercheurs en robotique développent des outils dans l’autisme de l’enfant

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En lien avec le Service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent de la Pitié-Salpêtrière, une équipe de chercheurs en robotique développe différents outils pour la prise en charge des enfants souffrant d'autisme. L'apport de la robotique pourrait permettre de mieux repérer les troubles, via l'analyse automatisée des comportements en jeu dans les interactions sociales, et proposer des jeux pour améliorer ces interactions.

Avec PIRoS (Perception, interaction, robotiques sociales), au sein de l'Institut des systèmes intelligents et de robotique (Isir) (La Sorbonne), le professeur Mohamed Chetouani, informaticien de formation, titulaire d'une thèse en traitement du signal, a créé la première équipe française de recherche intégrée en robotique sociale. Entouré de cliniciens et d’experts de l’intelligence artificielle, il a réussi à mettre les technologies de l’information et de la communication au service des enfants atteints de troubles du spectre autistique (TSA).

Analyser les comportements grâce au traitement du signal social

« Si les psychiatres analysent depuis longtemps les comportements des enfants pour identifier des signes précoces de TSA, il reste néanmoins difficile et fastidieux de mesurer en même temps les gestes, les postures, le ton de la voix, les expressions faciales, l’imitation, etc., des parents et des enfants durant leurs interactions », indique Mohamed Chetouani. Pourtant, c’est en mesurant plus précisément ces interactions que les chercheurs pourront améliorer le diagnostic encore trop tardif de ce trouble évalué en moyenne à l’âge de 3 ans.

La robotique est alors utilisée pour analyser de manière automatisée les comportements en jeu dans les interactions sociales. « Lorsque deux individus communiquent, ils signifient leur attention par des regards, des sourires, des gestes, des sons, etc. C’est ce que l’on nomme la synchronie. En modélisant le comportement d’un ou plusieurs individus, nous pouvons analyser ce phénomène », explique Mohamed Chetouani.

En exploitant des films familiaux, les chercheurs ont ainsi montré comment la synchronie des interactions parent-enfant permettait de distinguer précocement des bébés à devenir autistique de bébés sans trouble autistique. « Nous avons ensuite voulu créer nos propres situations expérimentales, précise le chercheur, en ouvrant à la Pitié-Salpêtrière des salles équipées de caméras et de micros pour analyser finement les interactions sociales dans des environnements contrôlés. »

Dans cet espace expérimental, Mohamed Chetouani a mis en place, avec ses confrères, des projets de recherche regroupant des étudiants en sciences de l’ingénieur et des étudiants en psychiatrie, orthophonie ou psychologie. Grâce à ce travail interdisciplinaire, les chercheurs ont pu enrichir leurs études en confrontant des mesures cliniques classiques des interactions sociales avec des mesures objectives issues du traitement du signal.

Des serious games pour améliorer les interactions sociales des enfants

Dans le cadre de ces recherches, l’équipe PIRoS a également pu tester des solutions concrètes pour aider les enfants souffrant d’un TSA à développer leurs habiletés sociales. Ils ont créé des serious games destinés à entraîner des compétences spécifiques comme la reconnaissance des émotions, l’imitation ou l’attention conjointe. Ils ont ainsi développé un programme sur tablette où l’enfant, après avoir appris à associer une expression, une posture ou un geste à une émotion, est invité à la reproduire. Grâce à un algorithme de reconnaissance émotionnelle, le logiciel JE Mime est alors capable de donner en temps réel au joueur un retour sur la qualité de son imitation. 

Autre jeu développé par l’équipe, le logiciel GOLIAH permet, quant à lui, de travailler l’imitation et l’attention conjointe à l’aide de deux tablettes connectées (l’une pour l’enfant, l’autre pour les parents ou le thérapeute). Dans ce jeu, l’enfant, pour évoluer, a besoin de communiquer avec un tiers. Le logiciel est également capable de mesurer les interactions de l’enfant. Consultables à distance par le thérapeute, les données recueillies par le logiciel permettent ensuite au médecin de mieux adapter le travail thérapeutique à faire pendant les séances à l’hôpital, à l’école ou à la maison.

« L’idée n’est pas qu’il devienne bon sur le jeu de la tablette, mais améliore globalement ses interactions sociales », rappelle Mohamed Chetouani.