La Halle Saint-Pierre propose le 15 octobre un spectacle intitulé Le plancher de Jeannot. Le plancher de Jeannot est un texte – étrangement creusé, gravé, sculpté sur le plancher de sa chambre où il finira par mourir d’inanition – par un homme de 33 ans, cinq mois durant, les cinq mois qui suivent la mort de sa mère. Protestation d’innocence, mais aussi réquisitoire délirant destiné à un tribunal invisible.
Du choc de sa rencontre avec le Plancher de Jeannot, Perrine Le Querrec a écrit un livre, Le Plancher.
Jean, dit Jeannot, est né en France en 1939. Jean, dit Jeannot, a une biographie courte et accidentée. De ses années d’enfance à son engagement en Algérie, de la mort par pendaison de son père à sa claustration volontaire avec mère et sœur, Jean dit Jeannot va échapper à la raison et au monde réel.
En 1971 la mère meurt et les deux enfants, Jeannot et Paule, obtiennent l’autorisation de l’enterrer à l’intérieur de la maison.
Dès lors, Jeannot devient le plancher. Il se couche dessus, cesse de se nourrir, il a autre chose à faire : graver son réquisitoire, s’écrire à lui-même, creuser ses mots. Et y mourir, cinq mois plus tard.
Pour l’auteure, écrire Le Plancher, c’est côtoyer la folie au plus près, s’autoriser la débauche du mot brut, de la syntaxe, emprunter des chemins de réflexion et d’écriture inédits, braver les interdits. C’est aussi donner un corps et une voix à celui dont chacun s’est détourné.
Précision de l’auteure
Ma première rencontre avec le plancher de Jeannot date de 2005, à la bibliothèque François Mitterrand. Hall Est, ce n’est pas le silence qui m’accueille, mais une clameur, un hurlement. Le plancher se dresse dans la lumière, trois surfaces creusées, martelées, saignées à blanc. Je m’approche, aucune paroi ne me sépare de lui, inutile de lever la tête, il est là, devant moi, attaque ma rétine, mon système nerveux, je lis, ne comprends pas, me perds, j’entends les coups, je vois Jeannot sans même encore connaître son histoire, je vois Artaud crever la page d’écriture de son marteau. Je rencontre Jeannot l’Écrivain. Plus tard, le plancher est démonté, exposé dans plusieurs lieux d’art brut, c’est Jeannot l’Artiste. Encore plus tard, le laboratoire pharmaceutique qui l’a acquis le dévoile aux représentants comme avertissement si l’on ne consomme pas ses médicaments, c’est Jeannot le Schizophrène. Depuis plusieurs années le plancher est visible rue Cabanis, contre un mur de l’hôpital Sainte-Anne. Mal exposé, mal conservé, il attend depuis 3 ans une salle qui doit lui être consacrée. C’est Jeannot le Coupable, celui qui encombre, la société, les mémoires, ce sont ceux dont on se détourne, ce sont les lits supprimés des hôpitaux psychiatriques, ce sont les SDF abandonnés, les malades abusivement enfermés en prison, tous les fragiles, les différents, les marginaux, les furieux –
Ben Herbert Larue nous offrira une traversée musicale et sensible du livre de Perrine Le Querrec.
Depuis ses premiers pas dans l’écriture, Ben Herbert Larue, fondateur de la Cie Ô Clair de Plume et du groupe Nouvelle Nocturne, n’a cessé de défendre « l’émotion par les mots », qu’ils soient chantés, murmurés ou déclamés, sur scène ou dans la rue. Il prête son corps et sa voix pour nous offrir avec force ses « mots passants », multipliant les tons et les discours autour d’un imaginaire musical et théâtral qui renvoie sans cesse vers l’ailleurs.
Le spectacle sera précédé d’une intervention de Béatrice Steiner, psychiatre, psychanalyste, qui resituera Jeannot et son plancher dans son contexte historique et psychiatrique.
Dimanche 15 octobre 2017 à 15 h – Halle Saint Pierre – à l’auditorium – 2, rue Ronsard – 75018 Paris
Tarif spectacle : 10€
Réservation conseillée : 01 42 58 72 89
http://www.hallesaintpierre.org/2017/06/06/le-plancher/