Les Français ont une mauvaise image des Ehpad

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Une grande majorité de Français (84%) estiment que les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ne disposent pas de suffisamment de moyens. C'est ce qu'indique, entre autres, le « Baromètre santé 360 : Grand âge, dépendance et accompagnement du vieillissement » réalisé par Odoxa. 1 002 personnes âgée de 18 ans et plus ont été interrogées. L'enquête permet notamment de pointer le ressenti de la population générale, des plus de 65 ans, des aidants familiaux, ainsi que, en miroir, des professionnels (médecins, infirmiers, directeurs d’hôpitaux et d’Ehpad). Les enseignements principaux de ce sondage concernent trois axes :

– Premier axe :  l’accompagnement du vieillissement et la dépendance

Près de six Français sur dix (57 %) et surtout les trois-quarts (73%) des plus de 65 ans se sentent concernés à titre personnel par la question de la prise en charge du grand âge et de la dépendance. Or l’importance de ce sujet est très largement sous-estimée par les professionnels de santé, à l’exception notable des Directeurs d’hôpitaux et d’EHPAD. Mais tous – Français, médecins, infirmières et directeurs d’établissements – sont unanimes (neuf sur dix le pensent) pour estimer que la question de la santé et de l’accompagnement du vieillissement est importante, voire prioritaire. Plus de deux-tiers des Français (68%) jugent insatisfaisante la prise en charge actuelle de la santé et de l’accompagnement du grand âge et de la perte d’autonomie et autant de Français (65%) se disent inquiets de leur capacité actuelle ou future à accéder à l’ensemble des services/aides dont ils pourraient avoir besoin en vieillissant.

Si les Français ont une assez bonne image (60%) des personnels de santé, ils sont une large majorité (56% contre 44%) à avoir une mauvaise image de ces établissements. Pour 84 % d'entre eux, ces établissements manquent cruellement de moyens.

Les directeurs d’Ehpad ont une vision assez juste de cette perception schizophrène de nos concitoyens à l’égard de leurs établissements et de leurs personnels : 69% pensent que les Français ont une mauvaise image de leurs établissements et 84 % qu’ils ont une bonne image de leurs personnels.

S’agissant du secteur privé, les Français ont à la fois une assez bonne connaissance des services proposés (68% disent connaître l’existence des services testés) et, pour ceux qui les connaissent ont une bonne image sensiblement meilleure de ces services et de leurs personnels. Mais pour le public, comme pour le privé, le plus notable est le très important différentiel d’image (16 points) existant entre les établissements (moins bien jugés) et leurs personnels (nettement mieux jugés).

Les inquiétudes des Français concernant leur vieillissement portent essentiellement sur la santé (1er domaine d’inquiétude cité), et plus particulièrement sur les troubles cognitifs (Alzheimer, sénilité précoce…), pour lesquels les personnes interrogées estiment qu'il existe le moins de solutions de prise en charge.

– Deuxième axe : Vécu, problèmes rencontrés et craintes pour l’avenir

Adapter son domicile pour y rester plutôt que d’intégrer un établissement spécialisé constitue pour les Français comme pour les directeurs d’Ehpad la solution idéale… mais une troisième voie fait son chemin dans l’opinion : alterner entre présence à domicile et pouvoir aller de temps en temps dans un établissement. S’ils étaient atteints de troubles cognitifs, en revanche, les Français pensent qu’il leur faudrait intégrer un établissement spécialisé. Plus d’un Français sur deux (52% contre 48%) est inquiet concernant la façon dont il gérera son propre vieillissement. Cette part atteint six personnes sur dix dans les milieux les plus modestes. Les professionnels de santé ont tous bien conscience de ce niveau de préoccupation de nos concitoyens. A titre personnel, la perte d’autonomie constitue la principale inquiétude matérielle ou pratique des Français concernant leur vieillissement.

L’inquiétude est d’autant plus forte que plus de 8 Français sur 10 disent méconnaître les dispositifs de prise en charge de la perte d’autonomie ou ne pas savoir où s’adresser en cas de besoin. Pour les trois-quarts des Français, les dispositifs existants seraient à la fois complexes, peu efficaces, pas adaptés à leurs besoins et peu accessibles. Logiquement, dès lors, pour faire face à ces inquiétudes sur leur vieillissement et à leur insatisfaction (et méconnaissance) actuelle quant aux solutions existantes, 6 Français sur 10 ont déjà prévu des «  parades » pour anticiper les difficultés qu’ils craignaient avec leur vieillissement.

Les aidants-familiaux représentent près de 8 millions et demi de Français. Si leur poids en France est parfaitement bien estimé par les infirmières, il est largement sous-évalué par les médecins et les directeur d’hôpitaux. Aider les aidants devrait faire partie des priorités : plus de 8 aidants sur 10 ne bénéficient d’aucune aide et 1 sur 2 d’aucune solution de recours et ceux qui ont la « chance » d’en avoir comptent essentiellement sur leur famille ou leurs proches… Résultat, 7 aidants sur 10 ne s’estiment pas aidés par les pouvoirs publics.

– Troisième axe : Le attentes pour l’avenir

Les nouvelles technologies sont perçues comme un atout majeur pour l’amélioration de la santé et de la qualité des soins des personnes âgées. Tout comme leurs médecins, infirmières et directeurs d’hôpitaux et d’Ehpad, près des trois-quarts des Français sont aussi persuadés que la santé connectée constitue une formidable opportunité pour le maintien à domicile et pour améliorer la santé et la qualité des soins des personnes âgées. Les outils connectés sont déjà largement utilisés : 61 % des plus de 60 ans en utilisent au quotidien au moins un parmi les outils testés. Pourtant, plus de 8 Français sur 10 sont persuadés que leur usage est insuffisamment exploité par les professionnels de santé et les pouvoirs publics. Les professionnels de santé sont encore plus nombreux (9 sur 10) à le penser/constater… Résultat, les Français (84%) comme les professionnels de santé (84% à 92% selon les populations) plébisciteraient a mise en place d’un financement spécifique de l’Etat/la sécurité sociale pour les technologies d’aide au maintien à domicile.

Au-delà de l’amélioration et du développement des nouveaux outils (NT), les Français en appellent surtout à un accroissement de l’effort de la puissance publique. 9 Français sur 10 jugent que les politiques publiques ne sont pas adaptées aux défis du grand âge et de la perte d’autonomie, notamment car elles laissent selon eux un trop important «  reste à charge aux familles ». Pour les trois quarts des Français, le financement des actions en faveur du grand âge doit relever de la solidarité nationale bien plutôt que du privé et plus de 8 Français sur 10 s’inquiètent des difficultés rencontrées par certains départements pour financer l’APA. Les deux tiers des Français et les trois-quarts des plus de 65 ans seraient favorables à la création d’un « 5e risque » dédié au financement public de la prise en charge du vieillissement.

Dans le contexte budgétaire contraint actuel, la santé en général et la question plus particulière de l’accompagnement du grand âge constitueront l’un des grands enjeux sur lesquesl seront jugés nos nouveaux dirigeants politiques.

Source : Baromètre santé 360, grand âge, dépendance et accompagnement du vieillissement –  Odoxa, L'Opinion tranchée, réalisé en juin 2017 pour Orange, MNH, FHF, Ramsay générale de santé, Sciences-Po, le Figaro santé et France Inter

A lire sur le sujet : Personnes âgées, l'entrée en institution, n°217, avril 2017.