La synchronisation des temps à l’hôpital reste un déterminant de la qualité de vie au travail

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Travail d'équipe, synchronisation des temps médicaux et non médicaux mais aussi qualité de vie au travail. Ces trois notions se rejoignent et font l'objet d'un travail d'accompagnement de l'Anap, qui actualisera en 2017 un guide méthodologique à ce sujet. Elle envisage aussi un changement des cultures tant au niveau régional que territorial.

L'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap) sortira d'ici avril prochain une nouvelle version de son guide Synchroniser les temps médicaux et non médicaux, initialement publié en juillet 2014. Cette actualisation comprendra la méthodologie et les outils du projet, enrichis du retour d'expériences de la trentaine d'établissements accompagnés par l'agence de 2014 à 2016. L'annonce en a été faite ce 16 janvier à l'occasion d'un colloque à Paris intitulé "Soigner le travail d'équipe dans l'intérêt du patient". Une rencontre à voir comme un point d'étape avant la diffusion du document.

Le travail d'équipe. "Avec le recul, on peut s'étonner de ce sujet qui est une base du travail hospitalier", a déclaré Chantal de Singly, présidente du conseil d'administration de l'Anap. Certes, a-t-elle continué, aujourd'hui, "la synchronisation, ça marche mais au prix d'ajustements permanents, usants et fatigants". Et d'ajouter aussitôt que "c'est possible". Anne-Marie Armanteras-de Saxcé, directrice générale de l'offre de soins, a quant à elle souligné que ce sujet mérite "méthode, consensus et concertation". Car le travail en équipe est un déterminant de la qualité et de la sécurité des soins. Exigence vis-à-vis du patient et levier d'efficience, a-t-elle poursuivi, c'est également un levier de la qualité de vie au travail. En cela, cette problématique entre en convergence avec le programme national consacré.

Trois victimes de la désynchronisation

Fabienne Bousrez et Stanislas Johanet, en charge de ce projet à l'Anap, ont rappelé les enjeux de la désynchronisation des professionnels autour du patient. Le sujet reste aujourd'hui caché derrière d'autres préoccupations, ont-ils expliqué. Car les dysfonctionnements organisationnels sont souvent rapportés au manque de moyens, les comportements individuels étant davantage mis en avant plutôt que de questionner les organisations, et parce que les marges de progrès sont visibles surtout chez les autres. Pourtant, il y a bien trois victimes de cette désynchronisation :

  • le patient d'abord puisqu'elle porte préjudice à la qualité et à la sécurité des soins (retard à la décision, à la prise en charge, à la sortie ; diminution du temps d'information au patient ; risques d'erreurs liées aux interruptions de tâches, à la pression de production ou au déficit de communication…) ;
  • l'équipe ensuite du fait de la désorganisation du travail (difficulté à planifier l'activité), de la perte de solidarité dans l'équipe (tendance à l'individualisme, perte de temps de convivialité) ou encore du stress professionnel, de la dévalorisation et de la démotivation qu'elle engendre ;
  • la structure enfin car elle crée de la dette sociale, qu'elle cause une perte de capacité de prise en charge, qu'elle allonge inutilement la durée des séjours, qu'elle détériore l'image de l'établissement, etc.

Des solutions souvent simples et banales

"Le principal ennemi dans cette histoire est la fatalité", a insisté Stanislas Johanet. À partir du moment où vous prenez conscience des enjeux, la moitié du chemin est fait. Il faut alors en parler en équipe et ne pas hésiter à intégrer le patient dans la démarche. Ensuite les solutions à appliquer sont parfois les plus simples et les plus banales, a souligné Frédéric Boiron, directeur général du CHU de Saint-Étienne (Loire) et président de l'Association des directeurs d'hôpital (ADH). Il a ainsi cité deux exemples : la mise en place d'une cellule interméd pour une résolution de problèmes entre pairs ou bien l'utilisation d'une application de gestion des remplacements qui peut aboutir à la création d'une équipe de territoire volontaire.

D'autres solutions prendront plus de temps à se mettre en place. Michel Claudon, président de la commission médicale d'établissement (CME) du CHU de Nancy (Meurthe-et-Moselle), a ainsi évoqué la réflexion actuelle pour intégrer un module spécifique sur la qualité et la sécurité des soins autour du parcours patient dans la formation initiale des praticiens et le développement de formations au management pour le corps médical. Le changement culturel étant difficile dans le monde hospitalier, l'Anap envisage dès lors de diffuser cette pensée au travers l'échelon régional, via les ARS notamment, mais aussi au niveau territorial grâce aux groupements hospitaliers de territoire (GHT).

Pia Hémery, Hospimédia du 16 janvier 2017