Un rapport du Sénat dresse un bilan de la prise en charge des troubles psychiatriques afin de préparer l'arrivée de grands textes de snaté publique et d'organisation des soins.
« Malgré une actualité souvent tragique et une vingtaine de rapports publiés depuis dix ans, la psychiatrie française n’a été abordée par la loi que sous l’angle de la dangerosité des malades, optique très restrictive », regrette d’emblée Alain Milon, rapporteur de la Commission des affaires sociales du Sénat, qui estime qu’une nouvelle impulsion politique est nécessaire. Il recommande d’intégrer la lutte contre les troubles mentaux dans la loi de santé publique prévue pour 2013.
Le sénateur pointe un défaut d’évaluation de la prévalence des troubles mentaux. À ce titre, il remet en cause les termes de « santé mentale » pris au sens de « bien-être psychologique » : « La psychiatrie et les psychiatres n’ont pas vocation à traiter l’ensemble du malaise social », dénonçant en particulier certains troubles de comportement de l’enfant qui conduiraient à l’encombrement croissant des consultations en psychiatrie au détriment de la prise en charge rapide des malades les plus lourds.
Le rapport souligne aussi les problèmes de budget du secteur, redonnant les chiffres de la Cour des comptes, qui notait en 2012 une disproportion entre un nombre d’actes d’hospitalisation bien supérieur à celui des prises en charge en ambulatoire qui concernent pourtant 86 % des malades. Il reconnaît qu’un programme important d’investissements a été mis en œuvre mais appelle à donner au système les moyens de fonctionner, à dépasser l’urgence et à définir une stratégie globale permettant de mettre en adéquation les moyens et les missions.
Enfin, le rapport rappelle que la disparition de la base juridique du secteur, qui n’est plus défini dans le code de la santé publique, reste source de confusion alors que cette entité demeure le cadre de l’action de terrain.
Les 11 propositions du Sénat
1. Intégrer la lutte contre les troubles mentaux à la prochaine loi de santé publique.
2. Organiser une concertation avec les praticiens et les associations de malades et de famille pour que la prochaine loi sur l’accès aux soins comporte des choix clairs et acceptables pour tous sur l’avenir du secteur et de la coordination des soins.
3. Mettre en place un programme de développement des réseaux de soins en psychiatrie
4. Mettre en place des case managers non-médecins chargés du suivi d’un patient dans son parcours sanitaire et médico-social.
5. Intégrer un conseil des familles et des usagers à l’organisation des établissements psychiatriques.
6. Fixer avec la Haute autorité de santé un calendrier de réunions de consensus aboutissant à l’élaboration de recommandations de bonnes pratiques.
7. Organiser la prise en charge somatique des personnes atteintes de troubles mentaux.
8. Garantir un tronc commun de la spécialisation en psychiatrie assurant la formation à l’ensemble des techniques de prise en charge.
9. Assurer le financement des projets de recherche en psychiatrie par une agence centrale sur le modèle de l’Institut national du cancer.
10. Renforcer la formation continue des pédiatres et des généralistes pour leur permettre de prendre en charge rapidement les dépressions et de détecter les troubles psychiatriques. Encourager le dialogue avec les psychiatres et les centres experts.
11. Mettre en place un Observatoire des suicides rattaché à l’Institut de veille sanitaire.
- La prise en charge psychiatrique des personnes atteintes de troubles mentaux. Rapport d’information n° 249, décembre 2012, A. Milon, Commission des affaires sociales du Sénat. www.senat.fr