Le suicide première cause de mortalité maternelle jusqu’à un an après la grossesse

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Selon le rapport conjoint de l’Inserm et de Santé Publique France publié le 3 avril dernier sur les morts maternelles, le suicide est la première cause de mortalité maternelle considérée jusqu’à un an après la fin de la grossesse.

Entre 2016 et 2018, 272 morts maternelles ont été enregistrées en France, soit une mort tous les 4 jours et un ratio de mortalité maternelle (RMM) considérée jusqu’à un an de la fin de la grossesse de 11,8 décès pour 100 000 naissances vivantes, sans diminution par rapport aux périodes précédentes.

Avec environ 90 morts par an, soit 11,8 décès pour 100 000 naissances, « la France se situe dans la moyenne des pays européens », notent les auteurs de l’enquête.

Suicide : 45 décès sur les 272 enregistrés entre 2016 et 2018

Un résultat marquant est la place prépondérante des suicides et causes psychiatriques de décès qui se confirme pour la période 2016-2018, première cause de mortalité maternelle considérée jusqu’à un an (17 %), avec un RMM de 1,9/100 000 NV, soit environ un décès maternel de cause psychiatrique toutes les trois semaines in France.

Les auteurs précisent que le pic survient vers quatre à cinq mois après l’accouchement. Pour ce qui concerne le profil, il s’agit souvent de femmes à leur première grossesse et de femmes qui ont déjà eu des antécédents psychiatriques avérés ou des troubles du comportement alimentaire.

Il existe des inégalités socio-démographiques de mortalité maternelle :
– le risque de mortalité maternelle augmente avec l’âge des femmes de façon marquée à partir de 35 ans;
– la mortalité des femmes migrantes est 2 fois celle des femmes nées en France;
– les femmes socialement vulnérables sont 1,5 fois plus représentées parmi les femmes décédées.

« Territorialement, les Départements et région d’outre-mer (DROM) se distinguent par un niveau de mortalité équivalent à 2 fois celui de l’Hexagone. Les femmes nées en Afrique subsaharienne et les migrantes d’Outre-mer présentent un risque 3,1 et 2 fois plus élevé que celles nées en France.

Prévention, dépistage et prise en charge coordonnée

L’analyse du parcours des femmes décédées montre qu’une amélioration est possible, car plus de la moitié des décès maternels sont considérés comme probablement ou possiblement évitables et dans deux tiers des cas, les soins dispensés n’ont pas été optimaux. Les facteurs d’évitabilité identifiés mettent l’accent sur l’importance de la prévention, du dépistage, et de la prise en charge coordonnée et multidisciplinaire depuis la période préconceptionnelle jusqu’aux mois après l’accouchement, dans toutes les sphères de la santé de la femme. L’analyse qualitative des décès maternels a permis au comité d’experts de dégager 30 messages-clés ciblant les éléments des soins et de leur organisation à améliorer, en particulier pour une meilleure prise en compte de la santé mentale et cardiovasculaire dans l’accompagnement des femmes enceintes et ayant accouché.

Selon l’Inserm et Santé Publique France, « 60 % des décès maternels sont probablement ou possiblement évitables ».

Messages principaux en lien avec la prévention du suicide

– Au cours de la grossesse et du postpartum, le niveau de risque pour une femme, dans les 3 dimensions somatique, psychiatrique et sociale, est évolutif. Son évaluation est donc à répéter tout au long de cette période.
– Lors du suivi prénatal, les informations sur le contexte social, les conditions de vie et les antécédents de violences sont à recueillir de façon détaillée, au même titre que les antécédents médicaux classiques.
– Les dispositifs qui permettent d’établir ou rétablir une couverture sociale au cours de la grossesse sont déployés dès le premier contact avec le système de soins.
– L’échange d’informations et la coordination des soins entre l’équipe de maternité et les autres acteurs de soins est un facteur majeur d’évitabilité du décès chez les femmes atteintes d’une pathologie somatique ou psychiatrique préexistante ou découverte en cours de grossesse. Ils débutent idéalement en préconceptionnel et se poursuivent plusieurs mois après l’accouchement.
– L’état de grossesse, le postpartum et l’allaitement ne modifient pas la prise en charge selon les recommandations habituelles de bonne pratique clinique, sauf raison spécifique argumentée.
– Les facteurs de risque, personnels et familiaux, de dépression périnatale doivent être connus des professionnels de la périnatalité et recherchés tout au long du suivi de la grossesse et du postpartum

-L’implication de tous les acteurs de soins au contact des femmes pendant la grossesse et l’année qui suit l’accouchement dans le dépistage des symptômes de troubles mentaux est nécessaire, par l’interrogatoire et en s’aidant d’outils standardisés comme l’Edinburgh Postpartum Depression Scale (EPDS).

-Il est nécessaire d’informer les femmes enceintes, leur entourage, ainsi que le grand public, des signes de dépression périnatale, de leur fréquence et de l’importance de consulter rapidement en cas de symptômes.
– Les examens post‐mortem devraient être systématiquement envisagés en cas de mort maternelle sans cause évidente :

Selon l’Inserm et Santé Publique France, « 60 % des décès maternels sont probablement ou possiblement évitables ».

Mortalité maternelle en France : mieux comprendre pour mieux prévenir. Les morts maternelles en France 2016-2018 – 7e rapport de l’Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM) 2016-2018, Santé publique France, avril 2024.