Dans sa newsletter de septembre 2023, le Groupement de coopération sanitaire (GCS) pour la recherche et la formation en santé mentale rencontre le Dr Philippe Delespaul, professeur en innovations dans les soins de santé mentale à l’Université de Maastricht, aux Pays-Bas. Ce qui lui semble important, « c’est d’améliorer le fonctionnement des équipes non pas en considérant où elles en sont par rapport à un fonctionnement idéal – ce qui amène de la frustration – mais en considérant qu’il y a plusieurs façons de délivrer de bons soins ».

• Pouvez-vous nous expliquer ce que sont les équipes ACT et FACT ?
« Commençons par les équipes ACT (Assertive Community Treatment – Equipe de suivi intensif dans la communauté/de proximité), qui sont davantage connues au niveau international. Ce modèle, initié aux Etats-Unis dans les années 1970, consiste en la création d’équipes mobiles de 10 équivalents temps plein (ETP) s’adressant à 100 usagers qui présentent des troubles de santé mentale sévères et ayant un risque important d’hospitalisation, sur un territoire d’environ 200 000 habitants. La différence avec une équipe mobile de gestion de crise est que l’équipe ACT s’attache à la continuité des soins et intervient aussi en dehors des crises. Le suivi par une équipe ACT s’inscrit dans une durée plus importante qu’une équipe de crise et c’est toujours la même équipe qui s’occupe des mêmes personnes. Les équipes FACT s’adressent quant à elles plutôt à environ 200 usagers, sur un territoire de 50 000 habitants environ, avec 10-12 ETP. Elle va prendre en charge à la fois les usagers ayant les troubles les plus sévères, mais également les personnes ayant besoin d’un soutien moins intensif, selon une proportion d’environ 20-80%. Les soins pour ces deux groupes sont combinés de façon flexible (le F de Flexible Assertive Community Treatment), permettant aux personnes dont l’intensité des troubles diminue de ne pas changer d’équipe, comme c’est le cas dans le modèle ACT. Les équipes FACT ont également une approche plus orientée vers le rétablissement, au-delà de la seule délivrance des traitements. Ces équipes sont responsables de l’ensemble des soins utiles à la personne, en la rencontrant dans son environnement et en s’appuyant ainsi plus facilement sur ses forces et capacités pour l’aider à mieux fonctionner. La composition de l’équipe est donc pluridisciplinaire : travailleur social, infirmier, pair-aidant, psychologue, psychiatre, addictologue, spécialiste de l’emploi, case-manageur, etc. L’idée générale avec ces équipes est à la fois d’éviter les hospitalisations et de favoriser l’insertion sociale, l’autonomie et la résilience. Leur intervention s’inscrit en conséquence sur une durée plus importante que celle des équipes ACT ».
« Nous nous sommes interrogés sur le profil des usagers pouvant être suivis par une équipe FACT dans le cadre d’un groupe de travail que j’ai présidé aux Pays-Bas. Nous avons regardé les critères de définition de la sévérité des troubles liés à la classification des psychoses, mais nous ne les avons pas trouvés satisfaisants, car certaines personnes peuvent souffrir d’une anxiété ou d’une dépression très invalidante. Même chose pour les notions de comorbidité ou de fonctionnement, puisque tous les problèmes de santé mentale ont un impact négatif sur ces critères. Nous nous sommes intéressés à la circularité entre la psychopathologie et le fonctionnement. »
Lire la suite en ligne : La lettre du GCS, n°87, octobre 2023.