Un jardin thérapeutique pour personnes détenues

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Soignants et soignés ont aménagé à l’intérieur de la prison une cour arborée pour proposer des médiations d’extérieur.

Cette cour est un espace inédit en milieu carcéral. Elle permet de proposer des médiations thérapeutiques en extérieur pour les personnes détenues prises en charge à l’Hôpital de jour (HDJ) du Service médico-psychologique régional (SMPR) de Nantes. Au quotidien et en lien avec les objectifs individuels du contrat de soin de chaque patient, les infirmières proposent activités de jardinage, jeux en extérieur, temps conviviaux, médiation animale (le lieu abrite des poules, des poissons rouges… et accueille un chien une fois par semaine), enrichissant ainsi leur palette d’ateliers.

Le contexte

L'HDJ est une unité en charge des soins psychologiques et psychiatriques des personnes incarcérées sur la région. Il est situé au sein de la maison d’arrêt du centre pénitentiaire de Nantes. Il dispose de 20 cellules et accueille des personnes incarcérées souffrant majoritairement de troubles anxiodépressifs et de psychose, pour une prise en charge intensive de 30 jours en moyenne.

Lorsqu’en 2012, l’HDJ s’installe sur ce site, l’équipe découvre une cour de promenade grillagée, bétonnée, grise et vide. Rapidement, avec l’arrivée des premiers patients, les soignants décident d’investir ce lieu pour des médiations extérieures et initient des réunions mensuelles soignants soignés pour le penser collectivement. Il s’agit d’y créer des conditions favorables aux échanges thérapeutiques, d’aménager un espace « réhumanisé ». Petit à petit, différents travaux d’aménagement sont réalisés en commun.

Projet clinique

Les patients bénéficient d’un espace-temps de soin, dans un lieu différent de celui de leur incarcération, leur permettant de se ressourcer un temps. Il s'agit de créer des conditions favorables à des rencontres et à des échanges thérapeutiques : utiliser ce lieu comme un interstice où « être », ou « faire », dans des objectifs d’apaisement et de revalorisation visant à favoriser une stabilisation des troubles psychiques, une diminution des tensions, et à contribuer à la prévention d’actes auto-ou hétéro-agressifs chez les patients détenus.
Quelques exemples d’objectifs thérapeutiques individuels :
– Mobiliser les patients quotidiennement, lutter contre l’isolement carcéral, favoriser un apaisement psychique, trouver des moyens de se détendre et prévenir le risque suicidaire.
– Faire appel aux souvenirs, aux habitudes de l’extérieur, aux capacités individuelles.
– Prendre conscience et faire avec des éléments extérieurs non maîtrisables (météo, saisons, rythme de la nature, comportement animal…)
– Travailler sur l’immédiateté et la temporalité : respect du rythme des saisons.
– Travailler l’estime de soi, (être valorisé par le résultat obtenu) en créant du Beau et en l’entretenant.
– Réintroduire la nature dans un espace bétonné, être en lien avec le vivant (végétal ou animal) en s’engageant (individuellement ou en groupe) à « prendre soin de »
– Aide à la socialisation et à la responsabilisation.
Ces moments « dehors » s’inscrivent pleinement dans le travail soignant du SMPR, axé sur l’aide aux patients détenus à se réapproprier leurs parcours et à se projeter dans un avenir. Une impression de calme se dégage nettement de cet espace. Ce qui est en soi, déjà un élément fondamental du soin prodigué au SMPR. 

Dans l’altérité se rejouent des questions très personnelles. Chacun apprend à connaitre les autres en passant du temps avec eux en activité et à se re-connaitre à travers eux.

Depuis 2012, 30 à 35 patients psychotiques par an ont pu bénéficier de soins dans ce lieu hors du commun.