Autisme : 1 famille sur 2 mécontente de la prise en charge !

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Une enquête réalisée par la fondation Fondamentale en association avec Doctissimo auprès de 700 familles touchées par l'autisme dresse un état des lieux de la prise en charge particulmièrement sombre.

De la première consultation au diagnostic : le délai reste trop long
La Haute Autorité de Santé (HAS) recommande que le diagnostic de l’autisme ou d’un autre trouble envahissant du développement (TED) soit posé avant les 3 ans de l’enfant, pour instaurer le plus tôt possible une prise en charge adaptée
et en optimiser ainsi les bénéfices. Après la première consultation, les outils diagnostiques devraient permettre de statuer dans un délai de 9 à 12 mois. Or, si l’âge moyen de détection des symptômes intervient autour de 2,3 ans (résultat issu du premier volet de notre enquête), le diagnostic est posé, en moyenne, 20 mois plus tard !
 
Le diagnostic plus rapide au sein d'équipes pluridisciplinaires
Notre enquête révèle que le délai diagnostique dépend étroitement de la suite donnée au premier contact médical. Le diagnostic est plus rapide si la famille est orientée vers un psychiatre de secteur ou un Centre de Ressource Autismes (CRA). Il sera globalement plus long s’il s’agit d’un psychiatre libéral ou d’un psychologue.

Une prise en charge qui manque de coordination
Le suivi de la prise en charge se caractérise par une incroyable multiplicité des acteurs impliqués et un réel manque de coordination , dont souffrent les parents au quotidien. " J'ai eu le sentiment, et malgré tout ce qui est mis en place, que les choses se font très lentement et qu'on a l'impression de vivre un vrai parcours du combattant. Lesprofessionnels font ce qu'ils peuvent, mais il y a un manque évident de moyens adaptés et de coordination de l'ensemble ",avoue le père d’un enfant autiste. Dans la majorité des cas, ce sont les psychiatres de secteur (libéral, CMP et CMPP : 25,4%), hospitaliers (14,6%) et CRA (12,7%) qui assurent le suivi. "
"Si le suivi est majoritairement assuré en psychiatrie de secteur et hospitalière et en CRA, c’est parce que s’y trouvent des équipes pluridisciplinaires qui peuvent coordonner la prise en charge ", explique le Pr Manuel Bouvard, responsable du CRA Aquitaine au CHS Charles Perrens à Bordeaux et du Centre Expert FondaMental Autisme de haut niveau. Pourtant, de nombreux autres professionnels s’occupent eux aussi du suivi. Comment expliquer une telle situation ? "
Ces résultats rendent compte du manque de lisibilité et d’organisation des acteurs impliqués, constate le professeur. Pour assurer la meilleure prise en charge possible, il faudrait pouvoir identifier/créer un acteur de référence susceptible de coordonner tous les professionnels (orthophoniste, psychomotricien, psychologue, etc.) impliqués dans le projet de soin".
 
Des stratégies variées, majoritairement conformes aux recommandations
Preuve de cette organisation défaillante, la prise en charge tarde parfois à se mettre en place, comme en témoignent plusieurs parents : " C'est bien beau de faire un diagnostic tôt chez un enfant mais si derrière, la mise en place d'un
programme prend des mois, c'est du temps perdu…". On identifie 6 grandes stratégies thérapeutiques, qui ne sont pas exclusives l’une de l’autre : orthophonie, psychomotricité, programme éducatif (ABA, Teach, PECS…), psychothérapie d'inspiration psychanalytique, TCC, traitement médicamenteux. ..
La sur-représentation de l’orthophonie et de la psychomotricité témoigne d’une cohorte jeune (84 % des répondants sontparents d’un enfant de moins de 18 ans). En effet, ces prises en charge sont les plus accessibles et constituent, avec les
programmes éducatifs, les stratégies de référence chez les enfants de moins de 12 ans, notent les experts de la FondationFondaMental. Par ailleurs, seuls 12,5 % des patients ont bénéficié de thérapies comportementales et cognitives (TCC). Près de 20 % des patients ont suivi un programme éducatif de type ABA, Teach, PECS." Les prises en charge citées sont globalement conformes aux recommandations de la Haute Autorité deSanté.
 
L’approche psychanalytique perdure malgré son désaveu par la HAS
La psychanalyse a longtemps été le traitement de référence de l’autisme en France, une "spécificité nationale" très décriée. Ce n’est qu’en 2012 que la HAS a défini les méthodes psychanalytiques comme étant "non consensuelles". Mais d’après notre enquête, 20,6 % des patients ont suivi une psychothérapie d’inspiration psychanalytique.
 
Une prise en charge qui évolue dans le temps
D’après nos résultats, près d’un patient sur 2 (49,5%) a vu sa prise en charge évoluer. En moyenne, les patients de l’enquête ont changé 2,2 fois de prise en charge. Le plus souvent, c’est au profit d’approches cognitivo-comportementales
(programme d’éducation structurée – ABA, Teach, PECS – dans 31.4 %) et une psychothérapie cognitive comportementale (dans 11 % des cas).  Une évolution encourageante et qui va dans le sens des recommandations de prise en charge.
 
Une famille sur 2 mécontente de la prise en charge de leur enfant
Interrogés sur leur satisfaction par rapport à la prise en charge dont bénéficie leur enfant,près de la moitié des répondants (44,4 %) se déclarent mécontents !
 
Parmi les nombreux points à améliorer :
• La formation des enseignants ("que les enseignants y soient également sensibilisés ou mieux, soient formés"), et des professionnels (" il faudrait que les personnes qui s'occupent de lui au quotidien soient des éducateurs spécialisés formés
spécifiquement aux méthodes éducatives structurées" ; "nous souhaiterions que l'IME soit formé à la méthode ABA" ),
• Les aides financières ("donner des moyens financiers aux parents pour s'occuper de leur enfant plutôt que des sommes inutiles et beaucoup plus importantes aux hôpitaux de jour le plus souvent incompétents en matière d'autisme" ; "
faciliter l’accès aux programmes d’éducation structurée type ABA et qu’ils soient pris en charge par la Sécu"),
• Le soutien psychologique des familles ("il faudrait que les parents puissent bénéficier d’un soutien moral"),
• Le manque de place dans les structures spécialisées (" notre fils a 26 ans et ne bénéficie d’aucune prise en charge faute de places" ; "il faudrait que les SESSAD puissent accueillir plus d'enfants autistes…" ; "il faut des structures adaptées
aux enfants autistes partout en France et surtout des places pour tous"),
•Et le manque de coordination de la prise en charge.