RTT à l’hôpital : la FHF dénonce un système ingérable !

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Douze ans après l'entrée en vigueur des 35 heures, la Fédération hospitalière de France (FHF) dresse un bilan sévère de leur mise en place à l'hôpital. Auditionné le 18 septembre dernier par la Commission d'enquête de l'Assemblée nationale relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail, Frédéric Valletoux, le président de la FHF s'appuie entre autres sur une enquête réalisée entre le 20 août et le 11 septembre auprès de 152 établissements.

– Concernant la mise en place des 35 heures à l'hôpital, il ressort de l’enquête menée une grande diversité dans l’application du décret de 2002, y compris pour des établissements présentant des caractéristiques similaires. « Cette hétérogénéité est le produit d’une méthode de concertation initiale biaisée par les perspectives d’attribution de moyens, contrainte par les délais et un climat social dégradé, et, la plupart du temps, sans réflexion préalable sur les organisations, soulignent les rapporteurs. La mise en place des 35 heures a été, dans la plupart des établissements, l’occasion d’une large concertation, avec comme objectifs principaux l’obtention de moyens et le maintien de la paix sociale. »L'enquête relève que les établissements dont les accords prévoient plus de 20 jours de RTT sont majoritairement des établissements ayant une activité principale en psychiatrie.

La FHF dénonce des impacts majeurs sur la situation financière des établissements et des effets délétères sur le contexte de travail : pénurie de temps médical, diminution des durées de séjour, développement de l'intérim… La transformation des activités du cadre de santé apparaisse sur ce point emblématique : « Celui-­ci, chargé – entre autres – de gérer les plannings dans les unités de soins – a vu son rôle grandement complexifié, faisant de lui la principale victime des 35 heures. Plongés, noyés dans les plannings de plus en plus complexes, ils ne sont plus que perçus comme des gestionnaires déconcentrés des temps de travail et non comme des animateurs d’une unité de soins. En outre, le cadre de santé doit désormais tenir compte du changement de paradigme à l’hôpital qui veut que le temps individuel prime dorénavant sur le temps collectif. Le cadre de santé a ainsi pu assister à une certaine démotivation des personnels pour le travail collectif qu’a pu engendrer une application stricte et uniformisée des 35 heures. »

Plus globalement, la FHF relèvent que « les créations de postes pour les professionnels paramédicaux, et la diminution du temps disponible, sans remplacement possible pour les médecins, ont eu pour double conséquence l’alourdissement sans précédent de la masse salariale des établissements, et la diminution de l’activité médicale. La conjugaison de ces effets a généré des difficultés financières extrêmement lourdes depuis 2002. Douze ans plus tard, les effets de ces protocoles sont délétères dans un contexte de financement à l’activité et de pénurie médicale. Si les besoins des patients et la présence au travail ont évolué, les organisations de soins sont restées les mêmes, générant une tension grandissante dans les services. La question de l’organisation du temps de travail à l’hôpital est donc devenue prioritaire. »

La FHF estime donc que la mise en place des 35 heures à l'hopital est incontestablement à l'origine de difficultés organisationnelles et financières, dont les hôpitaux peinent à se remettre, plus de 10 ans après. Elle précise que l'enjeu n'est plus de remettre en cause ou non cette réglementation mais de donner les moyens aux hôpitaux de recentrer les organisations de travail sur la prise en charge des patients. Elle suggère de créer une stratégie territoriale cohérente et réclame un soutien des pouvoirs publics pour la révision des accords locaux, « même si cette démarche est difficile et impopulaire". Ainsi l'alignement sur un plafond de 15 jours de RTT permettrait, au regard de la répartition de l'échantillon de l'enquête, de réaliser un gain de plus de 640 000 journées, soit 3 200 ETP, soit un gain potentiel de plus de 400 M d'euros.  Alors qu'un effort à hauteur de 5 milliards d'euros est demandé aux hôpitaux publics dans le cadre de l'effort national de maîtrise des dépenses publiques, la FHF estime que ce niveau d'effort ne pourra pas être atteint sans une interrogation sur les temps de travail et sur les organsiations de travail (sachant que le personnel représente 70% du budget d'un hôpital). Au final, toutes ces questions « figées par la loi des 35 heures, ne doivent pas être taboues ».