Le 10 mars 2025, l’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité en première lecture une loi qui réforme la profession infirmière autour de cinq missions socles. L’article 1 introduit en particulier les notions de « consultation infirmière » et de « diagnostic infirmier ». Le débat se poursuivra au Sénat pour un vote la deuxième quinzaine de juin, dans le cadre d’une procédure accélérée.
« Il est temps de faire confiance à ces professionnels de santé que sont les infirmiers et de leur dire haut et fort qu’ils sont essentiels dans la prise en charge des Français », a plaidé le député de Seine-et-Marne et président de la commission des affaires sociales Frédéric Valletoux (Horizons ), promoteur de cette proposition de loi avec sa collègue Nicole Dubré-Chirat (Ensemble pour la République). La proposition de loi sur la profession infirmière, examinée le 10 mars 2025 en soirée à l’Assemblée nationale, en procédure accélérée, visait à « reconnaître les missions des infirmiers et l’évolution de leurs compétences », alors que « les difficultés d’accès aux soins et le manque de personnel soignant sont des sources d’inquiétudes pour de nombreux patients et praticiens, en particulier dans les territoires ruraux où la désertification médicale est forte », a précisé la députée.
« En permettant aux infirmiers de réaliser des consultations de premier recours, de renouveler des traitements ou d’effectuer des actes des dépistages sans prescription systématique, ce texte offrira aux patients une porte d’entrée supplémentaire vers le système de soins plus accessible et plus rapide »,
François Gernigon, député Horizons
Depuis des semaines, les représentants de la profession étaient consultés pour argumenter en faveur d’une adoption massive et rapide de cette loi attendue depuis des années. Les députés les ont favorablement écoutés et entendus puisqu’ils ont voté, en première lecture, et à l’unanimité, cette proposition de loi qui va transformer le métier infirmier, lui donnant de nouvelles missions et prérogatives.
Pour rappel, le texte liste en effet cinq missions socles
: la réalisation de soins infirmiers curatifs, palliatifs, relationnels et destinés à la surveillance clinique
, le suivi du parcours de santé des patients et leur orientation, la prévention
, incluant dépistage et éducation thérapeutique, la participation à la formation
des pairs et la recherche.
Autre évolution attendue, mais peu appréciée par les syndicats médicaux, le texte crée la « consultation infirmière »
et la notion de « diagnostic infirmier
« . Ces deux notions ont fait l’objet de débats vifs, mais un amendement du Gouvernement a finalement permis de les conserver et préciser. Le texte donne également aux infirmiers l’autorisation de prescrire
certains produits dont la liste sera définie par arrêté. Concernant les infirmiers en pratique avancée (IPA), de nouveaux terrains d’exercice apparaissent : les services de protection maternelle et infantile (PMI), de santé scolaire et d’aide sociale à l’enfance.
« Les infirmiers mènent déjà des entretiens en tête à tête sans pouvoir parler de consultation, précise Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI). Ils peuvent prescrire des vaccins, des substituts nicotiniques ou des dispositifs médicaux comme des pansements. Mais pas du paracétamol, pourtant en vente libre. Ce texte nous donne un cadre légal, en corrigeant certains non-sens pratiques, qui peuvent induire des pertes de chances pour les patients. »
Pas de 4e année pour la formation initiale infirmière
La préconisation du Conseil National Professionnel Infirmier (CNPI) sur la formation initiale infirmière avec l'ajout d'une quatrième année de professionnalisation sur le modèle du « docteur junior » afin de consolider l’apprentissage académique et pratique en milieux cliniques, leviers d’employabilité et de fidélisation, n'a pas été retenue. Quatre syndicats (Convergence Infirmière CI ; Coordination Nationale Infirmière CNI ; Syndicat National des Infirmières Conseillères de Santé SNICS et Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI) avaient déposé un amendement* en ce sens.
Les députés ont notamment approuvé à une très large majorité des amendements du député des Bouches-du-Rhône Hendrik Davi (écologiste) et de la députée de la Sarthe Elise Leboucher (La France insoumise) demandant l’ouverture d’une négociation sur la rémunération des infirmiers lors de la publication et de l’actualisation de l’arrêté fixant la liste des actes et soins qu’ils réalisent.
« Une étape essentielle franchie pour un meilleur accès aux soins et une valorisation méritée de ces 600 000** professionnels infirmiers indispensables. Il y a encore un long chemin à parcourir, on va y arriver, on y croit », a affirmé, satisfaite, la rapporteure Nicole Dubré-Chirat. Yannick Neuder, ministre de la Santé, a souligné que « fruit de deux ans de concertation avec les soignants, parlementaires et acteurs du secteur, cette loi répond aux attentes du terrain« . Il espère que le texte puisse être rapidement voté au Sénat, puis définitivement dans les deux chambres, pour « ensuite enclencher (…) les négociations conventionnelles à partir du mois de septembre ».
Dans la presse
- "PPLInfirmier. Victoire pour la profession à l'Assemblée Nationale : Les ESI restent vigilants sur des propositions déconnectées de la réalité du terrain " ; Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières, 11 mars 2025.
- "Victoire ! Dans la nuit du 10 mars, les députés ont voté à l'unanimité la « loi infirmière ». Après 20 ans d'attente, nous saluons cette loi, qui porte les espoirs de la profession, et nous remercions les députés qui ont su intégrer les attentes des organisations infirmières". Thierry Amouroux, SNPI. 11 mars 2025.
- "L’Ordre National des Infirmiers se félicite de l’adoption en première lecture à l’Assemblée nationale de la proposition de loi sur la profession d’infirmier. L’Ordre National des Infirmiers appelle dorénavant les sénateurs à se saisir sans plus attendre du texte adopté hier – et en procédure accélérée - pour l’examiner et l’adopter à son tour." Communiqué du 11 mars 2025
- "Le Syndicat UNIPA vous informe "des avancées récentes concernant la reconnaissance et l’évolution de la profession infirmière, tout en alertant sur l’urgence de décisions à prendre pour garantir un accès aux soins optimisé pour la population". Communiqué à lire sur le réseau X , 11 mars 2025.
- "Proposition de loi sur la profession d'infirmier adoptée à l’Assemblée Nationale. Et aucun amendement problématique pour la profession n’a été adopté. C’est une belle avancée. Maintenant, direction le sénat où cela risque d’être plus compliqué. La vigilance est de mise !" Vincent Lautard. 11 mars 2025
- Retrouvez l'interview de JohnPinte, Président du Sniil (infirmiers libéraux) sur SudRadio ce matin à propos de la loi infirmière. 11 mars 2025.
- "Nouvelles missions, consultation infirmière, droit de prescription : les députés votent à l'unanimité une réforme du métier d'infirmier", LCP, assemblée nationale , 11 mars 2025.
*Amendement suivant : Est inséré après l’alinéa 15 l’alinéa suivant : « Un décret en Conseil d’État précise les modalités de formation initiales des infirmiers sur 4 années dont une de professionnalisation ».
**Démographie infirmière : 565 553 infirmiers au 1er mars 2025, d’après le communiqué de l’Ordre national des Infirmiers, 11 mars 2025.
• Proposition de loi sur la profession d’infirmier, n° 654, déposée le mardi 3 décembre 2024. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, sur la profession d’infirmier le 10 mars 2025, T.A. n° 65.