Une étude française intitulée « Prévalence et incidence des formes précoces de démence et comorbidités associées » menée à partir du système national des données de santé (SNDS) vient d’être publiée dans la revue PLoS Med1. Elle apporte notamment un éclairage utile sur les comorbidités.
La démence, dont la maladie d’Alzheimer est la cause la plus fréquente, est un enjeu de santé publique compte-tenu du vieillissement de la population. Si la démence concerne en majorité les personnes âgées, voire très âgées, il existe des formes précoces pouvant survenir avant l’âge de 65 ans. On estime que de 6 à 10 % des cas de démence surviennent entre 60 et 65 ans.
Ces résultats montrent la contribution importante des maladies cardio- et neuro-vasculaires, métaboliques, neurologiques (autres que la démence), psychiatriques et des lésions cérébrales traumatiques dans les différences d’incidence observées entre les hommes et les femmes. La fréquence plus élevée de la démence chez les hommes mérite d'être étudiée plus en détail afin de clarifier le rôle des facteurs de risque et des comorbidités associées au sexe ainsi que les différences d'accès aux soins selon le sexe.
Ces démences à début précoce (en anglais, young-onset dementia – YOD) se caractérisent par une plus grande fréquence de symptômes atypiques que les formes survenant aux âges plus avancés. Les troubles du comportement (psychose, troubles de l’humeur…) sont souvent au premier plan alors que les troubles cognitifs ne sont pas systématiquement rapportés. Les conséquences personnelles, familiales et sociales de ces démences précoces sont dévastatrices. Les personnes atteintes sont le plus souvent en âge de travailler et leur maintien en emploi est rapidement remis en question.
Dans l’étude qui vient de paraître, réalisée à partir du système national des données de santé, la prévalence et l'incidence de la démence chez les personnes âgées de 40 à 64 ans ont été estimées, par âge et selon le sexe. Les taux standardisés de prévalence et d'incidence étaient respectivement de 109,7/100 000 et 24,4/100 000 personnes-années. Appliqués à la population générale, ces taux permettent d’estimer, le nombre total de cas de démences précoces à 24 000 personnes en France en 2016 et le nombre de cas incidents à 5 300. La prévalence et l’incidence augmentaient avec l’âge et étaient plus élevées (de respectivement 33 % et 39 %) chez les hommes que chez les femmes.
Deux des auteurs de cette étude, Laure Carcaillon-Bentata, Santé publique France, et Alexis Elbaz, Inserm, soulignent « qu’il est important de pouvoir quantifier le poids de cette pathologie afin d’adapter le système à la prise en charge médico-sociale spécifique de ces formes de démences précoces. Peu de données sont actuellement disponibles sur cette pathologie chez les sujets jeunes en France, et les facteurs de risque restent largement méconnus« .
L’intégration dans le SNDS de la Banque Nationale Alzheimer (BNA), constituée de la remontée exhaustive d’informations sur tous les patients vus dans des centres mémoire en France, constitue un enjeu attendu pour la surveillance et l’épidémiologie des démences.
1- Carcaillon-Bentata L, Quintin C, Boussac-Zarebska M, Elbaz A (2021) Prevalence and incidence of young onset dementia and associations with comorbidities: A study of data from the French national health data system. PLoS Med 18(9): e1003801. https://doi.org/10.1371/journal.pmed.1003801