Le projet de loi sur la fin de vie introduit une aide à mourir strictement encadrée

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Le projet de loi sur l’accompagnement des malades et de la fin de vie du Gouvernement va être débattue au Parlement à partir du 27 mai. Il comprend 21 articles et prévoit notamment la création de « maisons d’accompagnement » pour les personnes en fin de vie et l’accès à « une aide à mourir » strictement encadrée. Elle concerne les personnes atteintes d’une maladie incurable avec un pronostic vital engagé, en capacité d’exprimer leur volonté de façon libre et éclairée, ce qui exclut les patients souffrant de troubles psychiatriques graves qui altèrent leur discernement au moment de la démarche. Le site Vie publique détaille le projet.

Soins d’accompagnement et directives anticipées

Le projet de loi rénove l’approche de la prise en charge de la douleur et de la fin de vie, en intégrant la notion de soins palliatifs définie par le code de la santé publique, dans celle plus englobante de « soins d’accompagnement ». Ces soins couvrent d’autres soins que les soins palliatifs (prise en charge nutritionnelle, accompagnement psychologique, musicothérapie, massage…) et plus globalement toutes les mesures mis en œuvre pour répondre aux besoins des malades et de leurs proches aidants.

Une nouvelle catégorie d’établissement médico-social, dénommée « maison d’accompagnement », est créée. Il s’agira de structures intermédiaires entre le domicile et l’hôpital qui accueilleront et accompagneront les personnes en fin de vie et leur entourage. Celles-ci pourront y être admises lorsque le retour à domicile, à la suite d’une hospitalisation, n’est pas possible, ou encore lorsque la prise en charge à domicile ou en établissement médico-social ne s’avère pas adaptée, afin d’éviter une hospitalisation. Ces maisons seront financées par l’Assurance maladie et par un forfait journalier à la charge des personnes accueillies. 

Les patients, dans le cadre de l’annonce d’une maladie grave, pourront systématiquement bénéficier d’un temps d’échange sur l’anticipation, la coordination et le suivi de leur prise en charge globale et d’un plan personnalisé d’accompagnement. 

Les conditions dans lesquelles les directives anticipées peuvent être formulées sont améliorées. Les bénéficiaires d’un plan personnalisé d’accompagnement pourront l’annexer à leurs directives anticipées. Toute personne pourra, en outre, enregistrer ses directives anticipées dans l’espace numérique de santé et accorder un accès à un proche aidant. 

L’aide à mourir

Le second volet du projet de loi concerne l’aide à mourir. Elle consistera à autoriser et à accompagner la mise à disposition à une personne qui le demande d’une substance létale, pour qu’elle se l’administre elle-même ou, si elle n’en est pas capable, se la fasse administrer par un médecin, un infirmier ou un proche ou une personne volontaire de son choix. 

Les personnes qui pourront demander cette aide devront être :

  • majeures ;
  • françaises ou résidents étrangers réguliers et stables en France ;
  • aptes à manifester leur volonté de façon libre et éclairée ; 
  • atteintes d’une maladie grave et incurable avec un pronostic vital engagé à court ou à moyen terme ;
  • victimes de souffrances réfractaires (qu’on ne peut pas soulager) ou insupportables. 

Les personnes devront être capables de prendre leur décision en ayant conscience de la portée et des conséquences de leur choix, ce qui exclut les personnes souffrant d’une maladie psychiatrique qui altère leur discernement au moment de la démarche. Quant à la notion de court terme ou moyen terme, l’exposé des motifs du gouvernement précise que selon la Haute autorité de santé, « On parle de pronostic vital engagé à court terme lorsque le décès du patient est attendu dans quelques heures à quelques jours ». Le moyen terme se compte, quant à lui, en semaine ou mois. 

Le projet de loi définit ensuite l’ensemble de la procédure de l’aide à mourir (demande, examen, décisions du médecin, délais, renoncement) et les droits de la personne (date de la mort, droit de mourir accompagné et hors de son domicile). L’aide à mourir sera prise en charge par l’Assurance maladie

Une clause de conscience est instituée pour les professionnels de santé qui refuseraient de participer à la procédure d’aide à mourir. Ils devront renvoyer la personne vers un confrère. 

Les professionnels qui seraient volontaires pour participer à l’aide à mourir pourront se déclarer auprès d’une nouvelle commission, qui centralisera leurs coordonnées. Cette nouvelle commission,placée auprès du ministre chargé de la santé, sera également chargée du contrôle et de l’évaluation du dispositif d’accompagnement à l’aide à mourir

La Haute autorité de santé (HAS) et l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) seront chargées d’évaluer les substances létales qui seront utilisées pour l’aide à mourir.  Ces produits seront insérés dans un circuit spécifique et sécurisé.

Plusieurs décrets d’application sont prévus. 

Enfin, le texte obligera les contrats d’assurance décès, y compris en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi, à couvrir le risque de décès en cas de mise en œuvre de l’aide à mourir. Il s’agit de prévenir toute exclusion de couverture de l’aide à mourir, notamment liée à une éventuelle assimilation au suicide.

Le projet de loi doit être désormais discuté au Parlement. Il sera débattu en séance publique par les députés à partir du 27 mai, avant d’être transmis au Sénat.  

Le gouvernement a annoncé ne pas engager la procédure accélérée sur le texte (procédure qui permet, à l’issue d’une seule lecture par les deux chambres, de convoquer une commission mixte paritaire pour aboutir à un texte de compromis). 

Contexte
Ce projet de loi, annoncé par le chef de l’État, répond à une demande sociétale. Il a été précédé d'un avis du Comité consultatif national d’éthique qui s'est dit favorable en 2022 à une "aide active à mourir" strictement encadrée, à condition que soient parallèlement renforcés les soins palliatifs.
Cet avis a ouvert les débats de la Convention citoyenne sur la fin de vie, qui s'est prononcée en avril 2023 pour une ouverture conditionnée d'une aide active à mourir, et plus précisément à la fois du suicide assisté et de l’euthanasie. Les 184 citoyens de cette Convention ont considéré que le cadre législatif actuel était insuffisant. Ils ont également souhaité que soient proposés des soins palliatifs "pour toutes et tous et partout".
Plusieurs pays occidentaux, dont certains voisins, ont déjà légiféré sur la question de la fin de vie (Belgique, Espagne, Autriche, Suisse, Pays-Bas, Luxembourg, Canada, certains États américains...). Ils autorisent l'euthanasie et/ou le suicide assisté. 

• Le site Vie publique rappelle le parcours du projet de loi et son contenu.

• Lire aussi sur le site du ministère de la Santé : Fin de vie, vers l’évolution du cadre actuel de la loi qui rappelle le contexte et les consultations