La proposition de loi qui ouvre un accès direct aux IPA adoptée

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Malgré les protestations des représentants des médecins libéraux, l’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité en première lecture le jeudi 19 janvier 2023, l’ouverture d’un « accès direct » des patients aux infirmiers en pratique avancée (IPA). Il s’agit de l’une des dispositions d’une proposition de loi sur l’accès aux soins portée par la député du groupe Renaissance, Stéphanie Rist. Cette proposition de loi prévoit également d’instaurer un « accès direct » aux kinésithérapeutes, aux orthophonistes, assistants dentaires et podologues

L’article adopté dans la nuit de mercredi à jeudi vise à revaloriser le statut d’IPA en donnant la possibilité aux patients de se rendre directement chez ces paramédicaux sans passer en amont par un médecin, mais dans le cadre d’un « exercice coordonné » avec ce dernier. L’article 1er de ce texte, voté en première lecture par les députés par 62 voix contre 3, prévoit également la possibilité pour ces infirmiers de faire certaines prescriptions. Les députés ont aussi adopté un amendement du groupe La France insoumise (LFI), soutenu par le gouvernement, prévoyant que le décret déterminant les modalités d’une « primo-prescription » par ces IPA devra être pris en Conseil d’Etat après avis de la Haute Autorité de santé.

La proposition de loi de Stéphanie Rist, dont l’examen se poursuivait ce jeudi, prévoit également d’instaurer un « accès direct » aux kinésithérapeutes, aux orthophonistes, assistants dentaires et podologues. « Ce texte répond à deux objectifs : lutter contre les déserts médicaux et améliorer l’accès aux soins », a plaidé Mme Rist.

Reste à savoir si cette proposition de loi parviendra au terme de son parcours parlementaire en ayant conservé les avancées qu’elle prévoit. Étant donnée l’opposition du côté des syndicats médicaux – ne manquant pas de trouver un certain écho sur les bancs des deux chambres – rien n’est encore gagné…

Le contexte de la proposition de loi

L’objet de cette proposition de loi est d’accélérer le décloisonnement du système de santé, en faisant confiance aux professionnels et en leur offrant de nouvelles possibilités. L’article 1er permet ainsi d’ouvrir l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée (IPA) dans le cadre d’un exercice coordonné, pour que les patients puissent se rendre directement chez ces professionnels sans passer en amont par un médecin. Il permet aussi d’ouvrir la primo‑prescription aux IPA. Il crée aussi deux types d’IPA à savoir, les infirmiers en pratique avancée spécialisés et les infirmiers en pratique avancée praticiens, conformément aux recommandations d’un rapport de l’Igas de janvier 2022. L’IPA praticiens pourrait avoir pour mission d’intervenir en première ligne sur des pathologies courantes identifiées comme bénignes en soins primaires sur la population générale.

De leur côté, La Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières (FNESI) s’associe à trois autres fédérations représentant les kinésithérapeutes, les orthophonistes et les chirurgiens-dentistes pour soutenir la loi. Communiqué commun :

« Aujourd’hui, dans une sphère médicale en tension, où les problèmes démographiques viennent accentuer les fractures de ce système de santé déjà fragilisé, il est nécessaire d’enfin reconnaître les compétences de tous les professionnels. Il nous faut ouvrir aux professionnels concernés la possibilité d’exercer sans prescription médicale. Celle-ci est un verrou à l’accès aux soins, elle ne valorise pas leur expertise ni l’ensemble des connaissances acquises durant leur formation. Limiter l’accès par un médico-centrisme décisionnaire diminue grandement la capacité d’exercice et ne participe en rien à faciliter le parcours du patient.

Il est temps que l’égo et le corporatisme des professions de santé soient mis de côté. Pour répondre à un système de santé engorgé, libérons du temps médical. Travaillons en collaboration dans le cadre d’un exercice coordonné pluridisciplinaire. Cet exercice est le garant du bon fonctionnement de l’accès direct et de la primo-prescription. Il doit permettre un accès à un professionnel de santé dès que nécessaire.
Cette proposition de loi expose des solutions concrètes, efficaces et nécessaires pour pallier les problématiques que rencontrent les populations et le système de santé. Un changement de paradigme est primordial.

Ainsi la Fédération Nationale des Étudiant·e·s en Kinésithérapie (FNEK), la Fédération Nationale des Etudiants en Orthophonie (FNEO), la Fédération Nationale des Étudiant·e·s en Sciences Infirmières (FNESI et l’Union Nationale des Etudiants en Chirurgie Dentaire (UNECD) se positionnent pour cette proposition de loi, début d’une nouvelle vision réaliste des véritables besoins et solutions pour favoriser l’accès aux soins des populations.« 

L’Ordre national des infirmiers signe également avec la Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières (FNESI), l’Intersyndicale nationale des internes (ISNI) et l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes un communiqué commun pour soutenir la loi Rist.  » La prise en charge des patients doit être redéfinie pour prendre en compte l’ensemble des aspects indispensables à une prise en charge de qualité : médicaux, sociaux et familiaux. Les compétences doivent être redéfinies de manière concertée entre les différentes professions : médecins, infirmiers en pratique avancée, infirmiers diplômés d’état, kinésithérapeutes… Cette redistribution des compétences doit être consensuelle, et systématiquement sécurisée par une formation adaptée qui garantit une qualité uniforme dans la prise en charge des patients. (…) Nous sommes favorables aux transferts de compétence s’ils ne sont pas synonymes de baisse de la qualité des soins pour les patients, et si la formation initiale et continue est anticipée et co-construite entre les professionnels maîtrisant la compétence aujourd’hui et ceux qui la recevront demain. La proposition de loi de la rapporteure Stéphanie Rist va dans ce sens parce qu’elle repose sur un triptyque essentiel et efficace : la responsabilité de chacun des acteurs du soin, la coordination entre eux, et la formation pour garantir l’efficacité de la prise en charge.« 

Proposition de loi portant sur l’amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé