En phase aiguë d’un AVC survenant dans l’hémisphère droit, la grande majorité des patients présente des signes de négligence gauche (la partie gauche de notre corps fonctionnant avec l’hémisphère droit et vice versa). Ces patients se comportent comme si la moitié gauche du monde n’existait plus. Ils ne mangent pas ce qui se trouve dans la moitié gauche de l’assiette, se cognent dans les meubles situés à gauche, ne se rasent ou ne se maquillent pas la partie gauche du visage. Ils récupèrent également moins bien de leurs déficits moteurs que les patients touchés à l’hémisphère gauche. Certains d’entre eux récupèrent avec le temps, mais l’amélioration spontanée de la négligence est loin d’être la règle : au moins un tiers des patients présentant ce trouble en phase aiguë continueraient à en présenter les signes plus d’un an après leur lésion. Cela souligne l’enjeu clinique à identifier les facteurs prédictifs de la persistance de la négligence, afin de proposer une rééducation adaptée aux patients chez lesquels ce trouble risque de devenir chronique.
Des chercheurs de l'Inserm ont publié des résultats de recherche sur cette « négligence spatiale unilatérale », qui montrent que les deux hémisphères peuvent en partie se compenser l’un l’autre en cas de lésion, grâce à des mécanismes, dits de « plasticité cérébrale », encore peu connus. Les résultats suggèrent cependant que cette compensation nécessite que les deux hémisphères « se parlent » via des connexions – faisceaux de matière blanche formés par les prolongements des neurones – non lésées.
Les chercheurs ont suivi l’évolution de la négligence dans le temps chez 45 patients avec lésions vasculaires de l’hémisphère droit. Des méthodes avancées d’imagerie par résonance magnétique ont permis d’étudier l’état les fibres de substance blanche qui permettent aux différentes régions du cerveau de communiquer entre elles, ainsi que les deux hémisphères. Tous les patients négligents avaient des atteintes dans les voies de communications entre la partie antérieure et la partie postérieure de l’hémisphère droit ; les patients avec négligence persistante plus d’un an après la lésion présentaient, en plus, une atteinte de la partie postérieure du corps calleux, la connexion qui permet aux deux hémisphères de communiquer entre eux. L’hémisphère gauche (sain) doit donc pouvoir communiquer avec l’hémisphère lésé (droit), afin d’apprendre à compenser les déficits visuo-spatiaux provoqués par la lésion cérébrale. Les patients avec atteinte du corps calleux sont à risque de négligence chronique, et devraient donc bénéficier d’un accès prioritaire aux traitements de rééducation.
D'après le communiqué de l'Inserm, www.inserm.fr