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34e Conférence de la Fédération européenne de psychanalyse (FEP)
Parce qu’à notre époque les nouvelles réalisations technologiques évoluent de manière exponentielle, le thème de « réalités » est devenu plus pertinent que jamais. La question de « l’analyse à distance » pendant la période du confinement est devenue pour beaucoup entre nous – selon l’endroit où nous vivons dans le monde – non seulement une possibilité mais la seule alternative pour le traitement psychanalytique. Cela a changé et intensifié la question séculaire de la nature de la réalité. Bien entendu, en tant que psychanalystes, nous nous intéressons surtout à la réalité psychique, un concept que Freud avait déjà commencé à développer en 1895 avec sa distinction entre la « réalité de pensée » et la « réalité extérieure » qui l’avait amené à cette formulation : «Donc la pensée comportant un investissement d’indications de la réalité cogitative ou d’indications verbales est la forme la plus haute et la plus sûre du processus mental de cognition» (Esquisse d’une psychologie scientifique).
Freud a de plus adopté une perspective internaliste, le point de vue de la première personne (« je suis, je sens, je pense »), et affronté le problème de savoir comment l’appareil psychique contrôlé par le principe de plaisir et les pulsions peut en même temps être encore adapté à la réalité. Il a cru trouver la réponse en combinant rationalisme et empirisme. Nous adhérons maintenant davantage à la « perspective de l’interprète ou du tiers », au sens où Cavell l’entend, et adoptons donc un point de vue externaliste. Cette perspective d’un tiers intègre le facteur de l’influence forte du domaine social qui relie l’individu à l’expérience des jeux de langage (voir Wittgenstein, 1958) et de comportement avec le monde des autres locuteurs. Dans les interactions d’un enfant avec ses parents, le développement du langage et la signification du monde qui y est associée ne peut être séparée des actions interactives et, par là même, se forment des niveaux tant non symboliques que symboliques de la réalité psychique en lien avec les affects associés.
La signification et la réalité du monde se trouvent communiquées via un langage émotionnellement teinté et publiquement partagé qui, en même temps, laisse à l’enfant de l’espace pour la création de ses propres fantasmes, avec lesquels il peut à son tour avoir une influence sur son environnement. Ainsi, une réalité dialectique se développe. La méthode psychanalytique suit également un modèle de processus et se sert de la compréhension interactionnelle du point de vue du tiers afin de rendre possible un sentiment de réalité mentale et affective chez ceux qui y prennent part, mais surtout chez le patient. À la fois le fantasme et l’imagination font partie de cette réalité […].
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