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Le propre de l’être humain est de penser et tout le droit moderne est fondé sur l’idée de cette pensée libre et autonome. C’est dire que la loi n’autorise le juge à entrer sur ce terrain qu’avec beaucoup de prudence.
Si l’entretien formalisé suppose une rupture avec et dans le quotidien. L’entretien « informel » s’inscrit dans le mouvement, dans le courant de la vie institutionnelle. Il se niche dans les zones de moindre résistance. Il contourne des défenses qu’il faut avoir repérées.
Accueillir l’informe, trouver une capacité à « jouer », à inventer une modalité d’échange avec le patient, est au coeur de la rencontre clinique prise dans le tumulte douloureux des problématiques psychotiques.
C’est bien la qualité « d’être » du soignant, c’est-à-dire sa « qualité de présence » qui constitue le principe actif de son action thérapeutique et cela, même dans les contacts impromptus, informels que le quotidien sécrète en permanence.
Quand Mylène offre, en préambule de la visite à domicile, une tasse de thé aux infirmières, elle offre bien plus que cela. Elle leur donne accès à son intimité et à son étrangeté…
L’informel dans les soins infirmiers en psychiatrie est un thème incontournable car il signe l’écart entre activité réelle et saisie d’activité, entre soins programmés et actions informelles. Une recherche en soins infirmiers devrait répondre à la nécessité d’asseoir ces pratiques sur des données probantes.
L’informel n’est pas le « sans forme ». Il est « ce qui ne se réduit pas à une forme ». Il est germe de vie que contient toute formalité, à condition d’en savoir la précarité pour encore mieux s’appuyer dessus. C’est le pari permanent de la psychothérapie institutionnelle.
L’art du tissage, comme l’art du soin, repose sur la dextérité et l’originalité du tisseur/soigneur à entrelacer les fils. Avec Julien, la parole s’est intercalée dans les fils de son gri-gri pour remplir les vides de son étoffe…
C’est avant tout dans une stratégie de liens sociaux qui se redessinent, et que le patient peut réapprivoiser, par exemple, avec la « pause cigarette », que l’écoute informelle prend toute son envergure.
Ce que les mots ne disent pas, le corps l’exprime souvent dans sa réalité immédiate. Nos sensations, nos émotions sont donc à la base de notre discours, c’est ce que décrit André Guittet dans son ouvrage paru aux éditions Armand Colin. Extraits choisis du chapitre « Interagir ».