Covid-19 : un essai clinique sur l’effet anti-viral d’un neuroleptique, la chlorpromazine

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A l'hôpital Sainte-Anne, des chercheurs ont montré l'effet antiviral d'un neuroleptique, la chlorpromazine, sur le COVID-19. S’appuyant sur des résultats prometteurs obtenus dans une expérimentation in vitro, ils lancent le premier essai clinique chez l’homme.

Depuis le début de l’épidémie du COVID-19, les services de soins en psychiatrie constatent une faible prévalence de formes symptomatiques et sévères du COVID-19 chez les patients atteints de troubles psychiques. Pourtant, les populations concernées présentent des tableaux cliniques (surpoids, troubles cardio-vasculaires) les plaçant a priori dans les catégories « à risque ». Au sein du pôle hospitalo-universitaire parisien du 15e arrondissement, cette observation est documentée : alors qu’en moyenne 19% du personnel médico- soignant a contracté le COVID-19, seuls 3 % des patients hospitalisés ont été dépistés positifs. Des retours similaires, témoignant également d’une faible occupation des unités COVID+ dédiées en psychiatrie, ont été rapportés de Chine, d’Italie, d’Espagne et d’autres hôpitaux de l’Hexagone.

C’est à Sainte-Anne, au sein du site-même où ont été expérimentés les premiers neuroleptiques, par les Prs Jean Delay et Pierre Deniker en 1952, que les équipes s’interrogent : les psychotropes auraient-il une action antivirale efficace contre le COVID-19 ? Afin d’y répondre, les médecins-chercheurs, en partenariat avec l’Institut Pasteur dont le GHU Paris est affiliated hospital, lancent le projet reCoVery : Repositionnement de la chlorpromazine dans le traitement du COVID-19. Il s’agit de la première étude mondiale sur le sujet. Elle cible la chlorpromazine, le 1er médicament antipsychotique, encore largement utilisé de nos jours dans le traitement des troubles relevant de la bipolarité ou de la schizophrénie.

Ce que l'on sait. Dans la course à la recherche sur le COVID-19, ce sont les stratégies de repositionnement de molécules connues et autorisées sur le marché qui priment, compte- tenu de l’urgence à développer des thérapeutiques. Des recherches in-vitro impliquant la chlorpromazine ont déjà été menées en 2014 et 2018 sur le MERS-CoV et le SARS-CoV-1 (virus responsables des anciennes épidémies de coronavirus et très proches de l’actuel SARS-CoV- 2). La chlorpromazine agirait comme un inhibiteur de l’entrée du virus dans les cellules, ou endocytose. Ce phénomène serait opérant à des stades précoces, mais aussi tardifs, de l’infection.

Ce que l’on cherche. ReCoVery est la première étude visant à analyser l’effet thérapeutique de la chlorpromazine sur le COVID-19. Elle s’appuie sur une expérimentation in-vitro réalisée en collaboration avec l’Institut Pasteur qui vient de rendre ses conclusions, confirmant l’effet antiviral de la chlorpromazine sur le SARS-CoV-2 (publiées sur le site de science ouverte Medrxiv).

A présent, un second volet de l’étude, épidémiologique, va être conduit au sein du GHU Paris, fondé sur les sérologies, afin d’étayer les observations cliniques concernant les patients contaminés mais peu symptomatiques (étude CLEVER).

Un troisième volet, majeur, dont le GHU est aussi promoteur et dont le PHRC est en cours d’obtention, prendra la forme d’un essai clinique de la chlorpromazine chez des patients hospitalisés en unité Covid+. L’essai sera randomisé et multicentrique, en collaboration avec l’APHP et la clinique de l’Alma.

Le premier traitement antipsychotique de l’histoire pourrait donc jouer un rôle clé dans la lutte contre la prolifération d’une pandémie. Une perspective aussi prometteuse sur le plan scientifique que puissante dans un registre plus symbolique, réconciliant le somatique et le psychique.

Recherche Covid 19 ReCoVery. Effets anti-viraux de la chlorpromazine confirmés in vitro : le GHU Paris/Sainte-Anne lance la première étude sur l’homme, Communiqué du GHU Paris psychiatrie et neuroscienecs du 4 mai 2020.

Investigateur scoordonnateurs
Dr Marion Plaze, MD PHD, Université Paris Descartes, Chef de service, Pôle Hospitalo- Universitaire Paris 15ème, GHU Paris psychiatrie&neurosciences, site Sainte-Anne Responsables scientifiques 
Pr Fabrice Chrétien, MD PHD, Institut Pasteur, Chef de service Pôle Neuro Sainte-Anne, GHU Paris psychiatrie&neuroscience
Pr Raphaël Gaillard, MD PhD, Université Paris Descartes, Chef du Pôle Hospitalo – Universitaire Paris 15ème, GHU Paris psychiatrie&neurosciences, site Sainte Anne.