La Haute Autorité de Santé (HAS) est revenue sur la distinction entre les notions d’expérience patient et de savoir expérientiel à l’occasion d’un webinaire. Un guide est également disponible.
L’expérience patient et le savoir expérientiel, deux formes d’expression fondées sur l’expérience, « sont souvent utilisées de façon imprécise », a rappelé la Haute Autorité de Santé (HAS) lors d’un webinaire, le 11 décembre 2025. Elle avait consacré un guide à cette question (paru au mois de juin 2025), pour permettre aux professionnels de « renforcer l’engagement et la participation des patients ou des personnes accompagnées au sein des établissements et services sociaux, médico-sociaux, ainsi que des établissements de santé ».
Substrats communs et différences
L’expérience patient et le savoir expérientiel ont en commun l ’expérience, « qui sert de fondement à la fois à l’expérience patient et à l’acquisition de savoirs expérientiels », souligne la HAS qui définit les deux notions : « L’expérience patient se réfère à la perception de la qualité d’un soin ou d’un accompagnement ; le savoir expérientiel désigne les connaissances acquises par la réflexion sur l’expérience directe ».
« Pour certains, il y a savoir expérientiel dès lors qu’il y a expérience. La distinction entre expérience et savoir expérientiel est alors réduite, voire inexistante », observe la Haute Autorité de Santé. « Pour d’autres, l’expérience nécessite une élaboration pour devenir, dans certaines conditions, un savoir expérientiel. Dans ce guide, une distinction est faite entre expérience et savoir expérientiel. Les savoirs expérientiels se développent par la réflexion et sont donc appris. Ils peuvent progressivement passer de l’implicite à l’explicite ».
Distinction des deux notions
- Pour différencier les deux concept, l’expérience patient se définit, plus précisément, comme « la perception des personnes concernées de la qualité de leurs soins ou de leur accompagnement ». Cette perception est recueillie par les professionnels afin d’améliorer leurs pratiques et leur organisation, détaille le guide de la HAS. Il ne s’agit pas de l’ensemble des expériences ou des connaissances acquises par les patients ou les personnes accompagnées au cours de leur vie avec une maladie ou dans une situation sociale spécifique. Ainsi, « prendre en compte l’expérience patient » revient à « mesurer la perception de la qualité d’un accompagnement ou de soins et entreprendre des actions d’amélioration (notamment d’amélioration de l’accueil, de la qualité des soins et de la qualité de vie des professionnels) ».
La HAS propose également des conditions méthodologiques et éthiques, pour mieux prendre en compte l’expérience patient : légitimer et valoriser la parole des personnes ou encore former les professionnels à l’accueillir. Concernant les conditions éthiques, la HAS invite à reconnaître les personnes concernées comme des ressources pour améliorer les pratiques et les organisations ou interroger la finalité des actions : développer la démocratie sanitaire plutôt que moderniser les relations avec les usagers.
- Le concept de savoir expérientiel désigne, lui, des savoirs fondés sur l’expérience. Le guide de la HAS en donne deux définitions :
Pour Ève Gardien, Maître de conférences en sociologie à l’université de Rennes, « c’est la connaissance acquise par la réflexion sur l’expérience directe, la pratique personnelle ou l’engagement actif dans des expériences concrètes, par opposition à la connaissance théorique ou académique ». Ève Gardien développe également la notion de « savoir expérientiel rare », issu de la réflexion sur les expériences rares, « c’est-à-dire les expériences vécues, remarquables, peu ou pas communes, et donc généralement peu connues et mal comprises. » Le savoir expérientiel est « généralement individuel, mais aussi parfois collectif », précise-t-elle encore.
Pour Baptiste Godrie, professeur à l’École de travail social de l’Université de Sherbrooke (Canada), « les savoirs expérientiels renvoient à un ensemble de savoir-faire, savoir-dire ou savoir-être caractérisés par leur dimension pragmatique, c’est-à-dire orientés vers ce qui marche du point de vue des personnes concernées. L’expérience vécue est convertie en savoirs expérientiels mobilisables en situation, au fil de processus sociaux qui transforment son statut épistémologique ».
La HAS développe également des conditions méthodologiques pour mieux prendre en compte le savoir expérientiel : favoriser le développement des capacités d’agir, comme les pratiques de rétablissement, créer un cadre respectueux, sécurisant et structuré ou encore se former à recueillir et interroger la parole des personnes concernées.
Valoriser ces formes d’expression
Une fois cette distinction clarifiée, le guide incite les professionnels, à « valoriser et reconnaître toutes les formes d’expression liées à l’expérience des personnes concernées, qu’il s’agisse d’un avis, d’une perception, d’une connaissance ou d’un savoir », et à « recueillir et mobiliser cette expression dans une démarche partenariale entre professionnels et personnes concernées, afin de mieux partager le pouvoir de décision. La reconnaissance de la valeur de la parole des personnes concernées et le partenariat avec elles représentent des enjeux cruciaux pour l’innovation et l’amélioration du système de santé ». Pour le compléter, une recommandation de la HAS précisera le rôle des pair-aidants, aux mois de mai ou juin prochains.
Retrouvez l’intégralité du guide de la HAS Expérience patient et savoir expérientiel : deux notions à clarifier pour renforcer l’engagement ou la participation – Guide pour les secteurs social, médico-social et sanitaire ; juin 2025.
Le webinaire de la HAS sera également bientôt disponible en ligne.









