Aborder un sujet délicat voir tabou, à savoir le suicide chez les adolescents, est un défi de taille que s’est fixé Nick Cheuk Yick-him, réalisateur et scénariste hongkongais. Pour l’écriture de ce film intitulé « Une page après l’autre », en salle le 21 janvier 2026, il puise son inspiration dans son vécu, de son enfance à ses années universitaires, et traite d’une vague de suicides juvéniles à la fin des années 2010
L’histoire débute ainsi : suite à la découverte d’une lettre de suicide, un enseignant se lance à la recherche de l’élève qui aurait pu l’écrire. Cette enquête le replonge alors dans son propre passé. « Hong Kong est une ville où la pression sociale est énorme, explique le réalisateur. On a l’impression que dès notre naissance, nous sommes constamment comparés aux autres et contraints de rivaliser. C’était déjà le cas quand j’étais enfant, et vingt ans plus tard, je me rends compte que la société n’a pas changé du tout : le taux de suicide chez les étudiants continue d’augmenter chaque année. Je me suis demandé ce qui rendait les Hongkongais si malheureux. Outre les problèmes liés à l’éducation et à la famille d’origine, je pense que la réticence à parler du suicide est également un problème ».
« Peut-être que ce n’est qu’en commençant à en parler que les choses pourront s’améliorer, afin que davantage d’enfants comprennent qu’ils méritent d’être aimés et compris. »
Le film nous balade entre le présent et le passé : reviviscence de la jeunesse douloureuse de l’enseignant plongé dans sa mémoire familiale, et enquête au présent, dans l’espace scolaire, où l’espoir d’une rédemption demeure le fil conducteur par la libération de la parole. Les questions sont posées : comment se projeter sereinement dans le futur lorsque l’on est différent, que l’on ne peut réussir selon les schémas attendus ? Comment faire face à un père, violent, qui brime l’enfant qui ne réussit pas, sans tenter de l’écouter et de comprendre sa différence. Comment se remettre de cette souffrance, celle d’un manque de mère, soumise à l’autorité du père et qui musèle son amour ? Et comment accepter de regarder en face le frère que l’on n’a pas su être ? Comment grandir, espérer, réparer l’autre quand on est soi-même brisé ?


« J’ai fixé une ligne directrice : en parler avec amour, empathie, ouverture d’esprit et sans jugement. Le but de ce film n’est pas de critiquer qui que ce soit, mais de permettre aux personnes qui souffrent de se sentir comprises et respectées ».
Aller au-delà de la pudeur des sentiments, trouver le chemin de l’ouverture et du dialogue, ce film brise les codes de ce qui est attendu dans une société où l’exigence rime avec souffrance. Le pire peut être évité si l’ouverture d’esprit l’emporte sur le jugement. Le poids du silence nous bouleverse car il a aussi un prix : celui d’une vie sacrifiée.
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• Une page après l’autre, un film de Nick Cheuk Yick-him, drame, 95 minutes. Sortie au cinéma le 21 janvier 2026.
Bernadette Fabregas









