Mobilisation pour une pluralité des pratiques psychothérapeutiques !

FacebookXBlueskyLinkedInEmail

Les associations de psychologues, psychiatres et professionnels des soins en santé mentale ont très vivement réagi à l’amendement qui visait, à compter du 1er janvier 2026, à ne plus rembourser les soins, actes et prestations se réclamant de la psychanalyse ou reposant sur des fondements théoriques psychanalytiques. Une mobilisation qui a porté ses fruits puisque cet amendement a été retiré le 24 novembre !

Début octobre, la Haute Autorité de Santé (HAS) a indiqué avoir engagé une réflexion pour rendre certaines recommandations opposables pour une durée limitée dans le temps, notamment celle à venir sur les troubles du spectre autistique relative aux interventions et au parcours de vie de l’enfant et de l’adolescent. Une mesure depuis longtemps réclamée par les associations du champ de l’autisme, fermement opposés aux méthodes psychanalytiques. Cette perspective provoque un tollé chez les psychologues et les psychiatres. Communiqué.

Un amendement sénatorial (N°159 rect. bis PLFSS) veut supprimer dès le 1er janvier 2026 tout financement public des pratiques se réclamant de la « psychanalyse » que ce soit en Centre Médico-Psychologique (CMP), dans le cadre de Mon Soutien Psy, dans le secteur médico-social ou en exercice libéral.


Que l’on ne s’y trompe pas ! A travers cet amendement 159, certains tentent une nouvelle fois de transformer la Haute Autorité de Santé (HAS) en instance prescriptive, en donnant à ses recommandations un caractère quasi-opposable, notamment pour les soins aux troubles neuro-développementaux (TND) ou aux troubles anxieux et dépressifs.
Une telle évolution marquerait une rupture grave : elle ferait basculer la HAS hors de son rôle, en substituant une norme administrative à l’appréciation clinique des professionnels – pourtant indispensable à tout soin digne de ce nom.
Il faut le rappeler fermement : les recommandations de la HAS ne sont faites que pour éclairer, jamais pour contraindre. Ni la loi, ni le Conseil d’État, ni l’histoire même de la santé publique n’ont jamais souhaité une médecine d’État où la pratique clinique devrait se soumettre à un protocole unique.

L’amendement 159 vise à imposer, sous couvert de « qualité », une vision réductrice du soin psychique, alignée sur un modèle somatique qui ne peut s’appliquer mécaniquement aux troubles mentaux. C’est une tentation idéologique, qui sacrifie la complexité et la pluralité des approches au profit d’une orthodoxie méthodologique appauvrissante.
Derrière ce mouvement se profile une volonté de normaliser, externaliser, protocoliser : faire disparaître la clinique au profit de procédures. Une telle dérive ferait peser un coût immense sur les patients comme sur les praticiens.

Nous appelons donc clairement au rejet de l’amendement 159. Pour que la HAS reste ce qu’elle doit être : un espace d’éclairage, non un instrument de contrainte ; un lieu de pluralité scientifique, non une autorité normative.
Pour que le soin psychique demeure libre, responsable et à la hauteur de la complexité humaine.

Pour le Conseil national professionnel de psychiatrie (CNPP) (1)  » Ce texte repose sur une conception réductrice du soin psychique, envisagé comme une série d’indicateurs objectivables. Il ignore ainsi la diversité des fondements théoriques de la psychologie et de la psychiatrie, la complexité des situations cliniques, qui échappent à toute normalisation unique, mais également les résultats solides de la recherche soulignant que la qualité de la relation thérapeutique constitue un déterminant central de l’efficacité des soins.
La pluralité des pratiques n’est pas un luxe : c’est une condition essentielle pour adapter la prise en charge aux besoins singuliers des patients. Chercher à établir une hiérarchie contraignante des approches, sous prétexte de standardiser le soin, traduit une méconnaissance profonde des réalités de la pratique clinique (…)
(…) Les professionnels de la psychiatrie n’ont à aucun moment été consultés, alors même que les décisions envisagées pourraient transformer durablement leurs pratiques. Une telle méthode interroge la manière dont sont élaborées les politiques publiques. Le déficit de concertation fragilise à la fois leur qualité et leur légitimité (…)

(…) Aussi, face à ces enjeux majeurs, la communauté des professionnels de la psychiatrie appelle les sénateurs à rejeter cet amendement en séance publique et d’ouvrir un dialogue avec les organisations professionnelles sur les orientations futures du soin psychique ».


Olivier BONNOT et Mircea POLOSAN, Président et Vice-président du CNUP – Choisir Psychiatrie
Marie-José CORTES, Présidente du Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux (SPH)
Claude FINKELSTEIN, Présidente de la Fédération Nationale des Associations d’usagers en Psychiatrie (FNAPSY)
Pascale GIRAVALLI, Présidente de l’Association des Secteurs de Psychiatrie en Milieu Pénitentiaire (ASPMP)
Thierry GODEAU, Président de la Conférence nationale des Présidents de Commissions Médicales d’Établissement de Centres HospitaliersJean-Paul LANQUETIN, Président d’honneur de l’Association pour le Développement de la Recherche en soins en Psychiatrie (ADRPsy)
Christophe LIBERT, Président de l’Association des Psychiatres Infanto-juvéniles de secteur sanitaire et médico-social (API)
François PACAUD, Président de la Fédération Française des Psychologues et de Psychologie (FFPP)
Annick PERRIN-NIQUET, Présidente du Comité d’Etudes des Formations Infirmières et des Pratiques en Psychiatrie (CEFI-Psy)
Marie-Noëlle PETIT, Présidente de l’Association Nationale des Psychiatres Présidents et Vice-Présidents de Commissions Médicales d’Etablissements des Centres Hospitaliers (ANPCME)
Françoise PILLOT-MEUNIER, résidente de l’Association Nationale pour la Promotion des Soins Somatiques en Santé Mentale (ANP3SM)
Charles-Olivier PONS, Président de l’Union Syndicale de la Psychiatrie (USP)
Rémi SALOMON, Président de la Conférence nationale des Présidents de Commissions Médicales d’Établissement de Centres Hospitaliers Universitaires
Christophe SCHMITT, Président de la Conférence nationale des Présidents de Commissions Médicales d’Établissement de Centres Hospitaliers Spécialisés
Norbert SKURNIK, Président par intérim de l’Intersyndicale de la Défense de la Psychiatrie Publique (IDEPP)
Olivier TELLIER, Président de l’Association Française des Unités pour Malades Difficiles (UMD)
Elie WINTER, Présidente de l’Association Française des Psychiatres d’Exercice Privé – Syndicat National des Psychiatres Privés (AFPEP-SNPP)


(1) A propos du Conseil National Professionnel de Psychiatrie : Créé en 2014 à la demande du gouvernement, le
CNPP représente l’ensemble des professionnels de la psychiatrie dans leurs diverses modalités d’exercice. Il a
notamment pour mission d’être l’interlocuteur privilégié des pouvoirs publics dans la coordination des réflexions en
ce qui concerne l’amélioration des processus de prise en charge, de la qualité des soins et de l’expertise
professionnelle. Le CNPP regroupe :
-Collège National des Universitaires de Psychiatrie (CNUP)
-Fédération Française de Psychiatrie (FFP)
-Collège National pour la Qualité des Soins en Psychiatrie (CNQSP)
-Syndicat des Psychiatres Français (SPF)
-Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux (SPH)
-Union Syndicale de la Psychiatrie (USP)
-Syndicat Universitaire de Psychiatrie (SUP)
-Syndicat National des Psychiatres Privés (SNPP)
-Syndicat des Psychiatres d’Exercice Public (SPEP)
-Intersyndicale de Défense de la Psychiatrie Publique (IDEPP