Selon une recherche, la santé mentale des personnes qui sont ou ont été prostituées est (très) détériorée : 62.5% présentent des symptômes de stress post-traumatique, 51% des symptômes dépressifs et 72% ont un sommeil troublé voire très agité. L’écrasante majorité fait aussi état de grande fatigue, de tristesse, et de troubles alimentaires (72%).
L’état de santé des personnes qui sont ou ont été en situation de prostitution – reconnue comme une violence en France par la loi du 13 avril 2016, restait méconnu ou peu mesuré dans sa globalité. Cette recherche – rapport Aspire* – menée en partenariat avec une chercheuse de l’Inserm et de la Sorbonne Université, coconstruite avec les équipes associatives du Mouvement du Nid, une psychologue et des survivantes de la prostitution, entend en présenter un état des lieux général.
Des résultats qui appellent à un sursaut collectif
Les résultats édifiants de cette recherche appellent à un sursaut collectif. Ils mettent en évidence le continuum de violences – systémiques – dont elles sont victimes, en écrasante majorité des femmes d’origine d’Afrique subsaharienne, mères de famille en grande précarité et en errance résidentielle. 95% des répondant(e)s au questionnaire ASPIRE déclarent avoir subi au moins une violence en dehors de leur situation prostitutionnelle, et pour 85% il s’agissait de violences sexuelles. Véritable facteur d’entrée en prostitution, les violences subies en amont agissent en catalyseur de l’exploitation sexuelle – au profit des prostitueurs, qui multiplient les sévices. 65% des personnes interrogées rapportent ainsi avoir été violentées physiquement et forcées par un(e) proxénète à des actes dont elles n’avaient pas envie. Un déferlement de violences que les clients alimentent : 85% des participant(e)s affirment avoir été forcées par un client au moins une fois, 79.5% ont subi des violences physiques, 93% des violences verbales (insultes, menaces, propos dégradants)…
« Une vie marquée par les violences, qui s’imbriquent et se cumulent, surexpose les personnes connaissant ou ayant connu la prostitution aux problèmes de santé, physiques et mentaux ».
La détériorisation de la santé mentale
Pour autant, les violences ne sont pas toujours conscientisées, mais au contraire banalisées, et les mécanismes de dissociation à l’œuvre (voir notre dossier) ont pour effet d’invisibiliser leurs conséquences, conduisant à une relativisation de leur état général de santé, bien que des douleurs (physiques) soient nommées. Néanmoins, le constat est sans appel : en majorité, la santé mentale des personnes qui sont ou ont été prostituées est (très) détériorée :
– 62.5% des répondant(e)s présentent des symptômes de stress post-traumatique ;
– 51% des symptômes dépressifs et 72% ont un sommeil troublé voire très agité ;
– l’écrasante majorité fait aussi état de grande fatigue, de tristesse, et de troubles alimentaires (72%).
Les urgences de prises en charge sont cependant entravées par les obstacles conséquents auxquels sont confrontées les personnes dans leur accès aux soins (précarité économique, violences institutionnelles, médicales, freins psychologiques…). Leurs besoins, nombreux, évoluent quant à eux en fonction de leur temporalité, qui reste mal appréhendée. Si certains enseignements peuvent surprendre – tels que la fréquence des dépistages ou encore le faible recours aux usages addictifs, les principales recommandations du présent rapport s’attachent à placer l’importance de la posture au cœur de la relation avec la personne, en rappelant la nécessité, entre autres, de questionner et de prendre le temps, afin de libérer la parole et avec elle, les maux.
Les auteurs de cette étude soulignent « qu’en cette année 2025 où la santé mentale a été érigée en grande cause nationale, les conséquences concrètes des violences dans la vie quotidienne des personnes prostituées et survivantes doivent impérativement nous alerter et être traitées pour ce qu’elles sont : des enjeux de santé publique.«
*Rapport ASPIRE (Accès aux soins, Santé et Prostitution) : « Santé et prostitution : comprendre pour mieux soigner », Mouvement du Nid, publié le 25 novembre 2025, Journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes ; une étude inédite menée par le Mouvement du Nid en partenariat avec l’Inserm et la Sorbonne Université sur les réalités et les urgences des personnes prostituées et survivantes.
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