Alors que la santé mentale des jeunes est préoccupante à plus d’un titre, l’Association hospitalière Sainte-Marie (AHSM) a conduit une étude sur un sujet précis : leur expression sur les réseaux sociaux. Les résultats pointent des contenus centrés majoritairement sur les troubles anxio-dépressifs, sur le témoignages, et dans lesquels les acteurs de santé ou les parcours de soin sont invisibles.
Un quart des jeunes de 15 à 29 ans expriment souffrir de dépression
En cette rentrée, l’Institut Montaigne, la Mutualité Française et l’Institut Terram présentent également une enquête de terrain inédite sur la santé mentale des jeunes, menée auprès de 5 633 personnes de 15 à 29 ans au printemps 2025, en métropole et dans les Outre-mer (DROM). Elle se distingue par son approche à la fois transversale et ancrée dans les territoires croisant les déterminants sociaux, économiques, culturels, numériques et environnementaux du bien-être psychique. L’étude explore aussi bien les freins à l’accès aux soins et les lacunes en matière de prévention que les ressources mobilisées, les formes de soutien disponibles et les attentes exprimées par les jeunes.
• Santé mentale des jeunes de l’Hexagone aux Outre-mer, septembre 2025, Voir tous les résultats sur le site de l'Institut Montaigne
La santé mentale s’impose aujourd’hui comme un sujet majeur sur les réseaux sociaux. TikTok et Instagram, en particulier, sont devenus des espaces privilégiés où les jeunes expriment leurs émotions, leurs difficultés et leur vécu personnel. Mais derrière cette effervescence numérique, plusieurs questions se posent : qui prend réellement la parole ? Quels thèmes dominent les conversations ? Et surtout, quels sujets restent invisibles ? L’Association hospitalière publie les résultats d’une étude inédite sur ce sujet. Ils permettent de mieux comprendre les codes de communication de cette population. Selon l’association, ils révèlent un double enjeu : soutenir l’expression des jeunes, qui trouvent dans les réseaux un espace d’écoute et de visibilité, identifier les manques, afin d’ouvrir la voie à une communication plus inclusive et plus proche de la réalité des parcours de soins.
Basée sur une analyse de près de 2 800 publications et 46 comptes spécialisés, ce travail met en lumière un
phénomène émergent : les jeunes parlent de santé mentale, mais dans un écosystème où les institutions sont
quasiment absentes. Avec des créateurs de contenu cumulant plus de 8 millions de followers, les réseaux sociaux
sont aujourd’hui l’espace privilégié par les jeunes pour parler de santé mentale. Leur discours s’ancre dans l’intime,
abordant la confiance en soi, la gestion des émotions et les relations aux autres.
Une forte hausse des publications depuis l’automne 2024
Entre octobre 2024 et mars 2025, le volume de publications consacrées à la santé mentale a doublé, avec une
prédominance de formats bruts, émotionnels, souvent incarnés par de jeunes femmes. L’analyse sémantique
révèle une santé mentale perçue avant tout comme un travail sur soi, intimement liée à la confiance, aux émotions
et aux relations aux autres. Les jeunes s’expriment principalement à travers des témoignages personnels, centrés
sur des troubles abordés par le prisme du quotidien. Une parole incarnée, sincère, mais rarement accompagnée ou
orientée vers des ressources professionnelles.
Des créateurs omniprésents, des institutions invisibles
Les créateurs de contenu concentrent plus de 75 % de l’audience totale étudiée, contre seulement 0,4 % pour les
institutions publiques. Cette invisibilité des acteurs institutionnels, pourtant garants de l’information fiable et de
l’accès aux soins, laisse le champ libre à une parole désinstitutionnalisée, parfois approximative, et rarement
orientée vers des solutions concrètes.
Cette étude montre que les jeunes ne demandent pas seulement à être écoutés. Ils attendent des réponses. À nous, acteurs du soin, de les leur apporter dans leurs espaces d’expression », souligne Agnès Marie-Egyptienne, Directrice Générale de l’AHSM
Une parole genrée
L’étude révèle un biais genré fort : 88 % des créateurs de contenu identifiés sont des femmes. Les jeunes hommes
s’expriment peu, souvent dans des formats encadrés (interviews, sport, prévention ciblée), tandis que les jeunes en
situation de précarité ou porteurs de handicaps sont quasi absents des récits.
Méthodologie
L’étude repose sur l’analyse de près de 2 800 publications TikTok et Instagram publiées entre octobre
2024 et mars 2025, identifiées via des mots-clés liés à la santé mentale. 46 comptes spécialisés, ciblant les 13–25 ans, ont été sélectionnés pour leur régularité et leur engagement sur ces sujets. L’analyse combine trois approches :
– Quantitative : fréquence, audience, typologie des comptes
– Qualitative : formats, tonalité, posture éditoriale
– Sémantique : lexiques communautaires et mots-clés émergents
• Les jeunes et la santé mentale : quels discours sur les réseaux sociaux ? Une étude de l’AHSM, voir la présentation détaillée sur le site.