Tensions d’approvisionnement en quétiapine : nouvelles conduites à tenir

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Depuis plusieurs semaines, les médicaments à base de quétiapine, essentiels pour les traitements des troubles schizophréniques et bipolaires, sont en rupture totale sur l’ensemble du territoire français. Alors que Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) précise les alternatives possibles, les acteurs du monde de la psychiatrie appellent le Gouvernement « à réagir urgemment » pour la sécurité des usagers.

Actualisation du 10 mars 2025 
La dispensation à l’unité ou à la plaquette de quétiapine 50 mg LP est obligatoire, afin d’adapter la quantité dispensée à la durée de traitement.
Il est possible de dispenser en une fois la quantité exacte de quétiapine prescrite, dans la limite d’un mois de traitement.
Les pharmaciens peuvent dispenser, en dernier recours, en l’absence d’autres dosages de préparations magistrales plus adaptés, des préparations magistrales de quétiapine de 50 mg à libération immédiate, en remplacement de la forme à libération prolongée, sans que les patients présentent une nouvelle ordonnance. Les pharmaciens doivent se référer au tableau d’équivalence mis à jour et prévenir le médecin prescripteur de ce changement.
La recommandation de remplacement et le tableau d’équivalence seront réévalués mensuellement.
Par ailleurs, le 27 février 2025, l'ANSM a réuni des représentants des associations de patients, des professionnels de santé et des acteurs de la chaîne du médicament. Cette réunion a permis d’échanger sur les perspectives d’approvisionnement en quétiapine, sur la mise en œuvre des recommandations et les difficultés rencontrées. Des échanges réguliers se poursuivront jusqu’au retour à la normale de la situation.

La situation de tension d’approvisionnement qui touche le marché des spécialités de quétiapine – Xéroquel et ses génériques, dure depuis plusieurs mois. Ces tensions sont consécutives à un problème de production rencontré par le fabricant Pharmathen International, qui produit la quétiapine pour plusieurs laboratoires. « Dès la déclaration par les laboratoires concernés des difficultés d’approvisionnement, nous avons mis en place des mesures de distribution plafonnée de ces médicaments pour éviter une rupture », explique l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Dans ce contexte, elle demande aux prescripteurs de ne plus initier aucun traitement par quétiapine, sauf pour les patients présentant un épisode dépressif caractérisé dans le cadre d’un trouble bipolaire. 

Dans les autres indications, les prescripteurs doivent privilégier d’autres médicaments. L’ANSM les présente indication par indication
– traitement de la schizophrénie .
– traitement des épisodes maniaques modérés à sévères dans les troubles bipolaires ;
– prévention des récidives des épisodes maniaques ou dépressifs chez les patients présentant un trouble bipolaire, ayant déjà répondu au traitement par la quétiapine ;
– traitement adjuvant des épisodes dépressifs majeurs chez des patients présentant un trouble dépressif majeur (TDM) et ayant répondu de façon insuffisante à un antidépresseur en monothérapie.

L’ANSM écarte la rispéridone, la palipéridone, l’amisulpride et les dérivés de valproate (divalproate de sodium et valpromide), en raison des tensions d’approvisionnement dont ils font actuellement l’objet. Ils ne doivent pas être prescrits en remplacement de la quétiapine. L’ANSM rappelle également que la quétiapine « ne doit pas être utilisée en dehors des indications prévues par son autorisation de mise sur le marché et que la prise en charge de l’insomnie ne fait pas partie de ces indications ».

L’ANSM et les laboratoires étudient d’autres pistes pour permettre la continuité des traitements déjà en cours : le recours aux préparations magistrales de quétiapine à libération immédiate et l’importation de spécialités de quétiapine à libération prolongée ou à libération immédiate (forme galénique non disponible en France).

« Une situation intolérable »

Le Pr Antoine Pelissolo, chef de service à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne), s’est exprimé par communiqué sur cette une situation intolérable. « La rupture actuelle de quétiapine (Xéroquel) crée une situation inédite et vraiment très problématique. Ce médicament, commercialisé en France depuis environ 15 ans, est très prescrit dans plusieurs types de troubles psychiques durables : la schizophrénie, le trouble bipolaire et certaines dépressions. Au total, ces pathologies concernent plusieurs millions de personnes en France. La quétiapine fait partie des molécules permettant souvent de bien soigner et de stabiliser au long cours ces troubles potentiellement graves, qui peuvent altérer fortement la qualité de vie et le « fonctionnement » de la personne dans sa vie quotidienne. Avec notamment un risque vital en cas de symptômes suicidaires, les troubles de l’humeur et la schizophrénie étant les deux pathologies les plus en cause dans les morts par suicide« . Antoine Pelissolo appelle le ministère de la santé à réagir urgemment « aussi bien pour trouver des solutions à ces problèmes de pénurie, en particulier pour les molécules essentielles en psychiatrie, que pour obliger les laboratoires à informer le public sur les ruptures et leurs durées prévisibles ».

Même inquiétude du côté de l’Unafam qui interpelle le ministre de la santé dans une lettre ouverte, lui demandant une action immédiate pour prévenir les risques qu’entraîne cette pénurie. « Pour les personnes concernées, interrompre un traitement peut tripler le risque de rechute et doubler le risque d’hospitalisation en psychiatrie. Pour les aidants, témoins directs des conséquences de l’interruption d’un traitement, il est crucial de trouver des solutions, afin de les sortir de l’incertitude. Cette situation met en lumière une crise récurrente : en 5 ans, les pénuries de médicaments essentiels ont augmenté de 80% en France. Une réponse urgente est indispensable ! La santé et la vie de nombreuses personnes en dépendent. »

Fortes tensions d’approvisionnement en quétiapine (Xeroquel LP et génériques) : premières conduites à tenir, ANSM, 6 février 2025.
Indisponibilité des spécialités de quétiapine LP : premières consignes et plan d’action de l’ANSM, Communiqué du Vidal, 4 février 2025.

• « Ruptures d’approvisionnement de médicaments en psychiatrie : une situation intolérable« , Antoine Pelissolo, 28 janvier 2025.