IPA : rémunération et reconnaissance insuffisantes !

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Cette enquête réalisé par l’Union nationale des infirmiers en pratique avancée (Unipa) dresse un état des lieux des conditions salariales des IPA en France. La question de la rémunération reste une préoccupation majeure. Ansi dans le fonction publique hospitalière, seuls 5,5 % des IPA sont satisfaits de leur rémunération, avec une augmentation moyenne de 94 € par rapport à leur ancien salaire d’IDE.

La profession d’Infirmier en Pratique Avancée (IPA) a connu un développement croissant ces dernières années, marqué par une extension récente des compétences1. Pourtant, la question de la rémunération reste une préoccupation majeure pour ces professionnels, quel que soit leur mode d’exercice. Afin d’apporter des données concrètes et de porter une voix collective dans les discussions avec les instances décisionnaires, l’Union Nationale des Infirmiers en Pratique Avancée (UNIPA) a lancé une grande consultation nationale sur la rémunération des IPA. Les résultats de cette consultation* permettent d’apporter un éclairage précis sur les différences de traitement entre les IPA en fonction de leur statut (privé, libéral, fonction publique hospitalière, fonction publique territoriale, fonction publique d’État).


Résultats pour la Fonction publique hospitalière (FPH) 

– 51 % de tous les répondants exercent en FPH. 13 % ne sont pas encore intégrés en tant qu’IPA, avec une attente moyenne de 8,3 mois.
Seuls 5,5 % sont satisfaits de leur rémunération, avec une augmentation moyenne de 94 € par rapport à leur ancien salaire d’IDE. 27% perdent ou ne gagnent pas d’argent.
– 65 % estiment que leurs compétences sont reconnues, hors considération financière.
– 84 % considèrent améliorer l’accès aux soins.
– Près de 50% estiment que le directeur des soins devrait être leur supérieur hiérarchique direct.
– 33 % n’envisagent pas de rester en FPH, 31% ne se prononcent pas. 25% envisagent une reconversion (soit quitter la profession).

Ces résultats mettent en évidence les attentes des répondants :

Refonte des grilles indiciaires : reconnaissance des compétences et des responsabilités, dans le cadre d’une profession intermédiaire, et en accord les modèles étrangers, avec un salaire de 3 000 euros net en début de carrière. Les répondants estiment que l’écart salarial entre IDE et IPA devrait être de 530 euros.
Respect des règles d’intégration et homogénéisation : utilisation de l’intégration directe pour ceux qui y sont éligibles et respect de la notion de reprise des services publics effectifs.
Utilisation de primes : même si un certain nombre n’est pas favorable au prime, au profit du traitement indiciaire, un grand nombre de répondants souhaite l’attribution d’une nouvelle bonification indiciaire (NBI), ainsi que le recours à des primes comme celle d’exercice multisite.
Revalorisation de la fonction dans l’institution : prise en compte de l’ensemble des compétences des IPA au sein de l’institution.

Résultats pour le secteur privé 

-142 répondants exercent dans le privé.
– Pas de grille IPA, impliquant des négociations de salaire, donc une variabilité importante.
Augmentation salariale moyenne de 290 euros, avec une médiane à 257 euros.
– 60% ne sont pas satisfaits de la rémunération. Ils estiment que l’écart de salaire entre IDE et IPA devrait être de 671 euros.

Ces résultats mettent en évidence les attentes des répondants :
Rémunération à la hauteur des responsabilités et du niveau d’études : demande d’un salaire à 3000 euros en début de carrière, intermédiaire entre IDE et médecin. Reconnaissance salariale des diplômes et formations complémentaires.
Prise en compte de l’ancienneté et de l’expérience : Les professionnels sont souvent pénalisés lors de leur recrutement car leur ancienneté dans leur exercice n’est pas reconnue.
Création de grilles salariales et harmonisation : demande d’une création de grille salariale unifiée sur le territoire. Inclusion des IPA dans les conventions collectives spécifiques. Création de primes spécifiques .

Résultats pour le secteur libéral 

– 139 IPA en libéral répondants : 65 % en exercice exclusif, 35 % en mixte.
– 70 % étaient IDEL avant de devenir IPAL.
Perte de chiffre d’affaire moyenne de 29 926 €. Seuls 5 IPAL ont connu une augmentation de chiffre d’affaires (CA) vis-à-vis de leur ancien CA d’IDEL.
– Aide à l’installation perçue en totalité par 49.2 %, partielle pour 32.3 %.
– 60.3 % jugent le modèle de rémunération actuel inadapté. 76.5 % refusent un paiement à l’acte à 20 €.

Ces résultats mettent en évidence les attentes des répondants :
Adaptation et révision des forfaits : créer des forfaits mieux adaptés à la réalité de certaines pratiques (psychiatrie, parcours complexes), augmenter le nombre de forfaits cotables, revoir les facturations des parcours ponctuels. Introduire des majorations spécifiques pour certains contextes.
Paiement à l’acte : permettre la facturation d’actes spécifiques en sus des forfaits, notamment pour des consultations répétées. Valoriser les consultations d’éducation thérapeutique, de coordination et de prévention dans les cotations. Introduction de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP).
Amélioration de l’installation : systématiser l’aide installation via les ARS, de manière équivalente aux médecins généralistes.
Formation et sensibilisation : sensibiliser le les professionnels de santé et la population à l’exercice IPA. 

Résultats pour les étudiants infirmiers en pratique avancée

– 175 répondants : 62% ont un financement employeur, 20% financent personnellement leurs études, 18% ont un financement mixte. Pour ceux qui ont eu un financement ARS, l’aide est en moyenne d’un montant de 45 465 euros pour l’ensemble des deux années.
– 50% connaissent une perte financière durant leurs études.
– 60% se destinent à un exercice dans la fonction publique hospitalière, 16% en libéral, 15% dans le privé et 7% dans le milieu associatif.
– A leur retour d’étude, ils s’attendent à une augmentation salariale moyenne de 137 euros. Ils estiment qu’une augmentation juste serait de 593 euros en moyenne.

Quelles attentes ? Les étudiants se destinant à tout type de modes d’exercice, leurs réponses sont donc variées, et se centrent surtout sur la rémunération de leur futur type d’exercice (l’exercice libéral est largement considéré comme non viable). les répondants se destinant à un exercice au sein de la fonction publique hospitalière souhaitent que l’intégration directe soit utilisée sur tout le territoire, et appliquée selon la bonne lecture des textes réglementaires.

« Ces chiffres saisissants doivent amener à une prise de conscience des pouvoirs publics, quant à leur action pour le développement d’une profession censée aider la population dans l’accès aux soins. » Emmanuel Hardy, Président de l’Unipa,

En conclusion

Les résultats montrent une insatisfaction générale des IPA concernant leur rémunération et leur reconnaissance. La difficulté d’intégration et la rémunération en FPH, l’absence de grilles adaptées en FPT et FPE, ainsi que la baisse de revenus en libéral sont des points critiques. Une refonte des modèles de rémunération et une meilleure reconnaissance des compétences des IPA apparaissent comme essentielles pour l’avenir de la profession. 

Une clarification du statut de la profession apparaît indispensable, afin de la positionner en tant que profession médicale intermédiaire, ce qui pourra permettre de résoudre à la fois des problèmes organisationnels, mais aussi de retravailler la reconnaissance salariale. Il est également frappant de constater l’inertie administrative et institutionnelle qui freine considérablement le déploiement des IPA en France. Depuis la création du statut en 2018, les avancées législatives ont été lentes et parsemées d’obstacles

Du côté de l’Assurance Maladie, le blocage persiste. L’accès direct n’a toujours pas été intégré à la convention nationale des infirmiers, empêchant ainsi les IPA de facturer les nouveaux patients, et d’améliorer l’accès aux soins.

Quant à la proposition de Loi infirmière, actuellement en discussion au Parlement, elle doit intégrer de nouvelles avancées pour les IPA, afin d’assurer la pérennité de la profession. 

*La consultation a réuni 1058 répondants, représentant environ 25 % de la population des IPA et des étudiants en pratique avancée. Cette participation significative reflète l’importance du sujet et la nécessité d’agir pour obtenir une rémunération plus juste et alignée avec les responsabilités accrues des IPA. Profil des répondants : 77 % de femmes et 23 % d’hommes ; prédominance des 31-50 ans (80 % des répondants) ; expérience moyenne de 10 à 15 ans comme IDEavant d’être IPA.
1- Nouvelles prérogatives des IPA : ce qu’il faut retenir, Santé mentale, Jordan Jolys, 5 février 2025.

• Vous pouvez consulter les résultats complets de cette « Grande consultation des Infirmiers en Pratique Avancée (IPA) sur la rémunération » sur le lien suivant .