Les 5 et 6 février 2025, la 13e édition des Journées Cinéma et Psychiatrie de Lyon, avait pour titre « La vie et la mort aux trousses ». Compte-rendu.
Les Journées Cinéma et Psychiatrie sont portées par les trois établissements de soins psychiatriques du Rhône : Le Vinatier – Psychiatrie Universitaire Lyon Métropole, les CH Saint-Jean de Dieu et Saint-Cyr au Mont d’Or. Initialement pensé pour la formation professionnelle, cet événement s’est progressivement ouvert à une participation citoyenne, dans un objectif de promotion de la santé mentale et de lutte contre la stigmatisation des troubles psychiques.
La programmation de ces journées est thématique, il ne s’agit pas d’un festival. Ainsi, tout au long de l’année, le comité d’organisation collecte des films, pour la plupart des documentaires, supports à des temps d’échange. Le public vient d’horizons variés : professionnels en lien avec les questions de santé mentale (secteur sanitaire, social et médicosocial), usagers des soins, associations de familles, grand public mais aussi réalisateurs, dont le regard particulier interroge les représentations et les préoccupations de notre société en matière de troubles psychiques. Des tables rondes croisent expériences et points de vue et donnent lieu à des échanges avec la salle.
En parallèle, les participants peuvent découvrir des films issus d’ateliers vidéo en lien avec le soin ou des dynamiques sociales (Groupe d’entraide mutuelle, services d’accompagnement à la vie sociale). La mise en lumière de ces productions locales encourage la venue d’équipes invitées à présenter leur projet et permet aux personnes concernées de se glisser dans la peau d’un acteur ou d’un réalisateur.
Les 5 et 6 février 2025, la 13e édition des Journées Cinéma et Psychiatrie de Lyon, avait pour titre « La vie et la mort aux trousses », deux thèmes ont émergé :
- La fin de vie a été beaucoup questionnée par des réalisations traitant du grand âge et des projections qu’elle suscite en termes de dépendance, de souffrances et de mort, mais également en résonance aux débats actuels autour de l’aide active à mourir.
- Le film belge Les mots de la fin sur l’euthanasie a particulièrement retenu notre attention. D’une sobriété nécessairement subtile, compte-tenu des controverses soulevées en France par cette question, ce film invite le spectateur à la consultation de fin de vie du Dr Damas (Hôpital de Liège). La narration respecte, comme le montage, une juste distance, découvrant avec pudeur une panoplie de situations les plus complexes, exprimées souvent avec des mots simples à propos de souffrances intolérables. La présence de la réalisatrice Agnès Lejeune, pour la circonstance ambassadrice d’une Belgique qui a fêté le 20e anniversaire de sa loi Euthanasie (1), a permis à des participants d’exprimer leur soutien à l’idée d’une aide médicale à mourir, tandis que certains professionnels, bousculés dans leur vocation de soignants, avouaient leur crainte de devoir envisager une telle révolution.
Du côté de la vie, cette édition a été l’occasion de promouvoir un genre documentaire en plein essort, les films « autobiopathographiques ». Il s’agit de réalisations originales où l’auteur va chercher dans son histoire familiale l’origine d’une souffrance psychique, manifestement transmise, dont il est le symptôme. Autre grand moment de cette 13e édition : la projection du film 4801 nuits de Laurence Michel. Remontant sa généalogie, méconnue dans sa valence pathologique par le poids du secret et de l’angoisse de mort, la réalisatrice a opéré un travail méthodique de correspondances générationnelles. A partir d’archives, elle suit le fil du symptôme alcool dont elle a longtemps souffert et qui a été un véritable frein à sa réalisation personnelle. Le public enthousiaste a été très sensible à la poésie qui émane de ce magnifique autoportrait, remarquable par le choix d’une mise en scène de la dégradation par l’alcool en parallèle d’une expédition polaire à la recherche d’une aurore boréale, fugace et magnifique dans sa représentation de la relativité de l’existence.
Dr Nicolas JANAUD, psychiatre
(1)En 2002, la Belgique a adopté trois lois qui ont considérablement marqué le droit médical : la loi dépénalisant l’euthanasie, celle consacrant l’accès universel aux soins palliatifs et enfin la troisième relative aux droits du patient. L’application de ces trois lois a permis une réappropriation par le patient des décisions médicales qui le concernent, tout au long de sa vie certes, mais aussi à son terme.
Les Journées Cinéma et Psychiatrie de Lyon ont lieu chaque année pendant deux jours au Centre Culturel et de la Vie Associative et à la Maison du Livre, de l’Image et du son, à Villeurbanne (69).