Dans une tribune conjointe, les ergothérapeutes, via leurs représentants, demandent à exercer leur métier « sans être entravés par des prescriptions évitables dans le cadre d’exercices coordonnés ou équipes pluridisciplinaires« . Communiqué.
Les ergothérapeutes sont des professionnels de santé qui contribuent au maintien ou à la restauration de l’autonomie en permettant à la personne, quel que soit son âge et sa situation de santé, de continuer à réaliser ses activités de vie quotidienne dans son environnement. Comme pour les autres rééducateurs, les interventions des ergothérapeutes sont soumises à prescription médicale (article L4331-1 du code de la santé publique). Or, depuis plusieurs années déjà, bon nombre d’ergothérapeutes sont contraints d’intervenir sans prescription en raison du manque de présence médicale. De nombreux ergothérapeutes salariés dans les établissements et services médico-sociaux n’ayant pas de médecins au sein de la structure (EHPAD, FAM, SSIAD etc.) exercent ainsi hors cadre réglementaire. Plusieurs dispositifs innovants faisant intervenir les ergothérapeutes ne font pas intervenir un médecin : c’est le cas des équipes d’accompagnement sur les aides techniques (EQLAAT) et du dispositif d’évaluation et aménagement du domicile MaPrimAdapt.
Selon une étude réalisée en 2023 par l’ANFE, seuls 35% des ergothérapeutes ont systématiquement une prescription médicale pour exercer leurs soins. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, aujourd’hui, 65% des ergothérapeutes seraient donc hors la loi.
Depuis juin 2023, les ergothérapeutes prescrivent des aides techniques ce qui a constitué une avancée importante en matière de prévention de la perte d’autonomie, de réduction des délais d’attribution du matériel et des coûts liés aux consultations médicales évitables. Cette expertise trouve tout son sens dans le contexte actuel, réaffirmé par le premier ministre dans son discours de politique générale, de voir rembourser intégralement les coûts liés à l’achat d’un fauteuil roulant. Pour autant, l’exercice de ce droit reste soumis à la prescription médicale de l’acte d’ergothérapie ce qui annihile son intérêt en termes de facilitation et d’accès aux soinspour tous !
Nous assistons donc aujourd’hui à une situation absurde où les ergothérapeutes qui exerçaient sans prescription médicale, incitent les usagers à une surconsommation de consultations médicales afin de pouvoir eux-mêmes prescrire dans le but de… soulager les médecins !
La fluidification de l’accès aux soins, la prévention et l’optimisation économique souhaitées se trouvent ainsi entravées. Or cette prescription relève la plupart du temps d’une formalité dans le cadre d’exercices coordonnés ou pluridisciplinaires. Au regard de ces difficultés, beaucoup d’ergothérapeutes renoncent à exercer leur droit à la prescription des aides techniques, générant ainsi des inégalités d’accès aux soins et au matériel. La situation est en passe de devenir particulièrement délétère en raison du développement des nombreux dispositifs nationaux intégrant des ergothérapeutes.
A l’heure où notre système de soins doit nécessairement être optimisé, et réfléchi en termes d’efficacité et de diminution des coûts pour répondre aux besoins de la population, à l’heure où le temps médical est devenu une denrée rare et où le manque de médecins généralistes et spécialistes atteint un seuil critique, nous demandons que les ergothérapeutes puissent exercer leur métier sans être entravés par des prescriptions évitables dans le cadre d’exercices coordonnés ou équipes pluridisciplinaires.
– Arnaud Schabaille, Président de l’Association nationale française des ergothérapeutes (ANFE)
– Cyril Vigouroux, Président de l’Association française des ergothérapeutes en gériatrie (AFEG)
– Justine Carmona, Présidente du Syndicat National des Ergothérapeutes Libéraux (SYNFEL-ERGOLIB)
• Communiqué de presse « Réformer l’exercice de l’ergothérapie : il y a urgence ! », ANFE, AFEG, SYNFEL-ERGOLIB.