Psychiatrie : le Comité Consultatif National d’Éthique alerte

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Face à la crise que traverse la psychiatrie, le Comité Consultatif National d’Éthique pointe les enjeux éthiques et met en exergue trois priorités d’action pour l’exécutif : un accès équitable aux soins, la lutte contre la stigmatisation et les discriminations et le renforcement de la formation des professionnels.

Alors que le système de soins psychiatriques traverse une crise sans précédent – marquée par des moyens insuffisants, des inégalités d’accès et une saturation généralisée –, le Comité Consultatif National d’Éthique pour les sciences de la vie et de la santé (C.C.N.E.) souligne dans son Avis 147 publié le 27 janvier 2025, « que la prise en charge des troubles psychiatriques constitue un enjeu d’éthique, social et humain majeur« . Aujourd’hui, plus de 13 millions de Français (soit 1 français sur 5) souffrent de troubles psychiatriques, avec des répercussions qui s’étendent bien au-delà du domaine médical pour affecter le tissu social dans son ensemble.

"La fragilité de la psychiatrie révèle un paradoxe insoutenable : alors que les besoins augmentent, les moyens restent insuffisants, amenant à une saturation complète du système de soins. Cette crise dépasse la question des soins, c’est un signal d’alarme pour une société qui sous-estime encore l’impact de la souffrance psychique". Angèle Consoli, PU-PH psychiatre, co-rapporteure de l’Avis 147 et membre du C.C.N.E.

Trois priorités stratégiques pour un Plan Psychiatrie ambitieux

Dans cet Avis intitulé « Enjeux éthiques relatifs à la crise de la psychiatrie : une alerte du C.C.N.E. », le Comité appelle à une réforme urgente et propose un cadre structuré autour de trois axes principaux :
garantir un accès équitable à des soins psychiatriques de qualité pour tous comportant une meilleure coordination des expériences multiples de terrain ;
lutter contre la stigmatisation et les discriminations. Il est temps de promouvoir une éthique d’intégration, en mettant fin à l’exclusion des personnes vivant avec des troubles psychiatriques et à l’isolement des patients ;
renforcer la formation et la recherche dans toutes les disciplines liées à la psychiatrie. Former les professionnels et soutenir les innovations scientifiques sont des conditions indispensables pour mieux répondre aux défis posés par les troubles psychiatriques.
Ces priorités, portées par une mobilisation collective urgente, nécessitent des moyens financiers significatifs et une volonté politique forte.

"La psychiatrie est le miroir des fractures sociales et des tensions de nos sociétés. Réaffirmer son rôle, c’est reconnaître que la santé mentale est une responsabilité collective, au croisement de la précarité, des inégalités et des vulnérabilités contemporaines."    
Fabrice Gzil, professeur associé de philosophie et d'éthique à l'Université Paris Saclay, co-directeur de l'Espace de réflexion éthique d'Île-de-France co-rapporteur de l’Avis 147 et membre du C.C.N.E

Une crise qui dépasse le domaine médical

Loin de se limiter à une problématique strictement médicale, la crise de la psychiatrie est aussi le reflet de tensions sociales et de fractures économiques qui marquent nos sociétés contemporaines. Comme le souligne le C.C.N.E., « la psychiatrie est une responsabilité collective« . Elle doit être réaffirmée comme un pilier essentiel de la prise en charge des souffrances psychiatriques et comme un indicateur des fragilités sociétales.

Un appel à agir maintenant

Face à l’ampleur de cette crise, le C.C.N.E. insiste « sur l’urgence d’investir dans un Plan Psychiatrie ambitieux, à la hauteur des défis actuels« . Il s’agit non seulement d’une exigence sanitaire, « mais aussi d’un enjeu d’éthique, visant à préserver la cohésion sociale et à construire une société plus solidaire et résiliente« .

"Répondre à la crise de la psychiatrie exige bien plus qu’un simple ajustement des moyens. Il faut une mobilisation coordonnée, portée par une volonté politique forte, qui fédère les institutions, les professionnels et la société civile autour d’un projet clair : replacer la dignité humaine et la santé mentale au cœur de nos priorités." 
Sophie Crozier, praticien hospitalier neurologue, co-rapporteure de l’Avis 147 et membre du C.C.N.E.

« Enjeux éthiques relatifs à la crise de la psychiatrie : une alerte du C.C.N.E. », Avis 147, 27 janvier 2025.
• Communiqué du C.C.N.E. du 27 janvier 2025 « : Crise de la psychiatrie : l’urgence nationale«