Avec le procès Pélicot, l’actualité a brutalement mis en lumière le fléau de la soumission chimique. Alors que les signalements pour suspicion de soumission chimique ont augmenté de 69% en 2022, l’ANSM annonce de nouvelles mesures pour réduire le risque du détournement d’usage des médicaments.
L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) annonce dans un communiqué qu’elle va engager en 2025 de nouvelles mesures afin de réduire le risque du détournement d’usage des médicaments. Il s’agira notamment de travailler avec les laboratoires pour qu’ils modifient l’aspect des médicaments incriminés (odeur, amertume, coloration…), afin qu’ils soient plus facilement repérables.
Pour rappel, la soumission chimique désigne « l’administration d’une substance psychoactive à une personne, sans qu’elle en ait connaissance ou sous la contrainte, dans le but de commettre un délit ou un crime, comme un vol, une agression sexuelle, un viol…. » D’après l’enquête soumission chimique, cette substance est le plus souvent un médicament (antihistaminique, sédatif, benzodiazépine, antidépresseur, opioïde, kétamine…) mais cela peut aussi être une substance non médicamenteuse (MDMA, cocaïne, 3-MMC, GHB et ses dérivés ou l’alcool). Elle peut être ajoutée à une boisson, à de la nourriture, ou encore injectée avec une seringue.
Augmentation significative des signalements en 2022
Depuis 2003, l’ANSM missionne le CEIP-A de Paris pour réaliser une enquête annuelle d’addictovigilance “soumission chimique” qui permet notamment d’identifier les substances en cause, le contexte de survenue et d’évaluer les conséquences cliniques sur les victimes. Cette enquête est conduite à partir des signalements remontés par les 13 centres d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance-addictovigilance et avec l’aide du réseau des toxicologues experts.
Les résultats de la dernière enquête rapportent un total de 1 229 signalements de soumission chimique suspects en 2022, contre 727 en 2021 et 539 en 2020, soit une augmentation de 69 % par rapport à 2021. Parmi les signalements analysés en 2022, 97 cas sont considérés comme vraisemblables. La part des médicaments psychoactifs s’élève à 56,7 % des substances impliquées.
Nouvelles mesures pour 2025
Dans ce contexte, l’ANSM annonce « engager un travail avec les laboratoires qui commercialisent des médicaments susceptibles d’être détournés à des fins de soumission chimique, afin de mettre en place des mesures appropriées pour alerter et protéger les potentielles victimes ». Cela peut consister à rendre le détournement de l’usage de la substance plus difficile ou à alerter les victimes potentielles en modifiant la formule du médicament. Ces changements peuvent porter sur l’aspect visuel (colorant ou texture inhabituelle), ou l’ajout d’un goût ou d’une odeur identifiables. Sur ce plan, l’agence a « d’ores et déjà échangé avec les représentants des laboratoires dans le cadre de notre comité d’interface (CI) car (…) le sujet repose sur une démarche volontaire de leur part. » Il s’agit de modifier les Autorisations de mise sur le marché (AMM), puis les médicaments effectivement mis sur le marché, sur la base des propositions des industriels et des discussions collégiales qui suivront. Par ailleurs, des solutions à long terme sont recherchées pour que « les nouveaux médicaments qui seront mis sur le marché intègrent d’emblée ces caractéristiques permettant de rendre leur détournement plus détectable. »
L’ANSM précise également avoir sollicité ses homologues européens « pour connaître leurs initiatives à des fins de partage de bonne pratique ».
Durant cette période de fêtes, elle rappelle également les mesures de prévention, en particulier en milieu festif, et l’importance de la vigilance solidaire.
• Prévention de la soumission chimique : l’ANSM engage de nouvelles mesures afin de réduire le risque du détournement d’usage des médicaments, communiqué, décembre 2024.