Après la Seconde Guerre mondiale, la psychiatrie s’est orientée vers une approche plus humaine grâce à la psychothérapie institutionnelle et, plus tard, à la psychiatrie de secteur. Malheureusement, les principes humanistes qui devraient être au cœur de cette discipline ont été abandonnés au bénéfice d’une perspective scientifique qui appréhende l’homme comme une simple combinaison de ses éléments organiques. Au cours des trois dernières décennies, dans mon parcours professionnel, j’ai observé et vécu la déconstruction progressive et inéluctable du service public dans les structures psychiatriques. Les idéaux humanistes ont subi un revers significatif, laissant place à des préoccupations de management et de rentabilité. Les notions d’efficacité et de gestion sont devenues les nouvelles priorités dictées par le néolibéralisme.
Dans un souci d’optimisation des ressources, l’établissement où j’exerçais a mis en place un centre de soins intersectoriels, destiné à centraliser les activités de médiation au sein d’un espace unique. Il s’agissait de mutualiser les moyens ! Dans les faits, cette démarche a entraîné une réduction des effectifs dans les différents services, ce qui a conduit inévitablement à un appauvrissement de l’offre de soins. Par la suite, ce sont les services eux-mêmes qui ont commencé à fermer.
Dans ce contexte, les désaccords persistants, la distinction entre activités d’occupation et celles à visée thérapeutique se sont intensifiés. Les interactions entre les deux groupes de soignants, bâties sur des bases artificielles, n’ont pas permis d’atteindre un résultat satisfaisant, sapant ainsi l’esprit de la psychothérapie institutionnelle. Une dichotomie s’est ainsi installée entre des soins jugés valorisants et ceux perçus comme de simples mesures palliatives. Au fil du temps, les activités se raréfient dans les services. Les ordinateurs occupent tout l’espace et les dossiers de soins numérisés engourdissent la pensée, réduisant le patient à une succession de cases à remplir, comme un simple formulaire sans âme.
Pourtant, selon le décret de compétences infirmier, les activités occupationnelles sont primordiales pour assurer la satisfaction des besoins fondamentaux (1). Il serait donc temps de valoriser leur rôle indéniable dans nos pratiques de soins.
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