Fréquents en psychiatrie, les troubles de la personnalité restent difficiles à diagnostiquer. Leur prise en charge est complexe, longue et peu étudiée. Dans cet ouvrage, le psychiatre D. Servant propose une approche basée sur les thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles. Publirédactionnel.
• Pouvez-vous préciser quelques notions de base : personnalité, troubles de la personnalité et trait de personnalités ?
La personnalité peut être définie comme un ensemble complexe de caractéristiques psychologiques profondément ancrées, en grande partie non conscientes et difficilement modifiables et qui s’expriment automatiquement dans presque toutes les facettes du fonctionnement. La personnalité présente un caractère normal mais peut conduire à une souffrance pour la personne ou son entourage. On parle alors de personnalité pathologique ou de trouble de la personnalité. Les traits de personnalité décrivent les façons de se comporter, de percevoir et de penser son environnement. Ils ne constituent des troubles que lorsqu’ils sont rigides et inadaptés et qu’ils provoquent une souffrance ou une détérioration du fonctionnement.
Le trouble de la personnalité est caractérisé par une façon stable et inadaptée de percevoir soi-même et les autres, de se comporter, de réagir affectivement et émotionnellement et d’entretenir des relations avec les autres. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) décrit 10 troubles de la personnalité répartis en trois groupes ou « clusters » :
– le cluster A (attitude étrange ou excentrique) : schizotypique, schizoïde et paranoïaque ;
– le cluster B (comportement impulsif et instabilité émotionnelle) : borderline, antisociale, histrionique et narcissique ;
– le cluster C (attitude anxieuse ou craintive) : dépendante, évitante et obsessionnelle-compulsive.
En pratique, les choses sont parfois compliquées car les patients ne répondent pas toujours à l’ensemble des critères requis pour porter le diagnostic et on peut trouver différentes dimensions ou traits de personnalité diversement associés.
• Comment est conçu cet ouvrage ?
L’objectif est d’apporter une aide concrète au clinicien pour le diagnostic et la prise en charge thérapeutique. Le repérage diagnostique des troubles de la personnalité est un temps crucial, pour informer le patient (qui n’a pas toujours conscience du trouble), établir une alliance thérapeutique et lui proposer la thérapie la mieux adaptée.
Les différents chapitres abordent les troubles de la personnalité à partir des descriptions parfois anciennes et des classifications diagnostiques actuelles mais aussi via certaines dimensions (perfectionnisme, timidité, jalousie pathologique, stress et anxiété, hypersensibilité, dépendance affective, perversions, narcissisme…).
Un chapitre est consacré aux cas complexes où se mêlent différents troubles et traits, rendant compte de tableaux qui n’entrent pas dans des cases diagnostiques simples. L’ouvrage présente aussi les cas où les troubles de personnalité s’associent aux troubles dépressifs, aux violences, aux tentatives de suicides, aux conduites addictives… De courtes vignettes cliniques et des références empruntées à l’art illustrent le propos.
• Quelle est l’approche psychothérapeutique privilégiée dans ce manuel ?
Plusieurs thérapies abordent les représentations mentales, les émotions, les comportements mais aussi l’enfance, le milieu éducatif, les expériences et les stratégies d’adaptation mises en place qui se rejouent au cours de la vie. J’ai donc proposé une approche en 6 étapes basée sur les thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles (TCCE), qui est détaillée pour chaque trouble de la personnalité :
– la psychoéducation et l’information sur le trouble de la personnalité ;
– la thérapie cognitive centrée sur les croyances sur soi-même, sur les autres et sur ce que les autres pensent de soi. Elle cherche plus à moduler et à assouplir les schémas en tenant compte de leur rôle fonctionnel qu’à en changer radicalement le contenu ;
– l’identification des stratégies d’adaptation conduisant à leur meilleure utilisation face aux vicissitudes de l’existence ;
– les schémas affectifs et émotionnels construits au cours de la vie qui s’expriment à travers des dimensions subjectives, expressives et sensorielles ;
– l’évolution de relations et interactions interpersonnelles du patient tout au long de sa vie et les liens familiaux, amicaux, affectifs afin de réduire sa souffrance et trouver de nouveaux systèmes de valeur ;
– les interactions au cours de la thérapie, souvent complexes, sont explorées autant du point de vue du patient que du thérapeute.
• Vous avez également créé des supports destinés aux patients. Quelle utilisation ?
Le thérapeute peut accéder, à partir de l’ouvrage, à des compléments en ligne à proposer au patient tout au long de la thérapie. Pour la psychoéducation, il s’agit de tests originaux et de fiches d’information pour l’aider à reconnaître ses troubles et traits de personnalité et à identifier les éléments qui serviront de cible à la thérapie. Au cours de l’accompagnement, il peut ainsi mobiliser des exercices thérapeutiques centrés sur les différents troubles mais aussi sur l’estime de soi, le perfectionnisme, l’hypersensibilité, l’affirmation de soi, la gestion des émotions (colère et impulsivité) et pour développer de nouvelles attitudes et stratégies d’adaptation plus flexibles.
• À lire : Les troubles de la personnalité. Évaluation et prise en charge par les TCCE, D. Servant, Édition Elsevier Masson, coll. Pratiques en psychothérapie, juin 2024, 424 pages.
