Le Plateau d’appui psychiatrie-violence (PAPV) : une unité ressource transversale

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Au Vinatier, le pôle de Soins intensifs et sécurisés (SIS) s’est doté d’un dispositif ressource pour soutenir les équipes de secteur dans la prise en charge de patients souffrant de troubles psychiatriques sévères avec des comportements « problématiques » (risques de violence, agressivité, fugues…) : le Plateau d’appui psychiatrie-violence (PAPV). Cette unité dédiée propose une expertise et participe aux prises en charge.

Depuis décembre 2021, le Plateau d’appui psychiatrie-violence (PAPV) a été déployé au sein du Pôle de soins intensifs et sécurisés (SIS) du Vinatier psychiatrie universitaire Lyon métropole (Bron), Issu d’une réflexion approfondie sur les besoins spécifiques de patients dits « complexes » (voir infra), il dispense des conseils basés sur son expertise et participe directement aux soins.  

Des profils complexes

Le principal critère d’admission des patients au PAPV est la présence de troubles ou comportements à problèmes (impulsivité, agressivité, risques de fugue) qui rendent temporairement incompatible la prise en soins sur les dispositifs ambulatoires de secteur. Ils peuvent ainsi être à l’origine d’une destructivité significative pour les services, générant une surcharge de travail pour les équipes soignantes, entraînent des perturbations importantes dans la dynamique des unités et nécessitant des ajustements constants des stratégies de soins pour garantir la sécurité de tous.

Ces patients souffrent de troubles psychotiques majeurs et résistants et un fort pourcentage d’entre eux présentent des aménagements de personnalité pathologique avec dimension antisociale et des poly-addictions. Dans leur grande majorité, ils ont un parcours de soins émaillé de nombreuses hospitalisations, très souvent sans leur consentement, avec des isolements fréquents et des recours aux hospitalisations en soins intensifs et sécurisés. Une part non négligeable a par ailleurs un parcours mixte, psychiatrique et judiciaire, avec des antécédents d’incarcérations ou de mesures d’irresponsabilité pénale.

En pratique

Le PAPV regroupe une équipe pluridisciplinaire (médecins, infirmiers, psychologues, ergothérapeutes, aides-soignants et animateurs) et bénéficie de locaux dédiés. Une partie de son activité s’effectue également de façon mobile au sein des services de secteur.

Ce dispositif décline trois axes d’intervention complémentaires :

• La mission Évaluation, conseil et orientation (ECO)

Cette activité s’adresse aux services de psychiatrie générale de la région Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) confrontés à des patients présentant des comportements problématiques, à risque de violence ou non. L’équipe du PAPV apporte un soutien sous forme d’évaluation spécialisée, de conseils et d’aide à l’orientation, permettant ainsi aux équipes de bénéficier d’un regard extérieur sur des situations particulièrement complexes.

• Une prise en charge ambulatoire contractuelle

Le PAPV assure un prise en charge ambulatoire des patients via des entretiens individuels et des médiations thérapeutiques lors de séquences d’hôpital de jour. Cette offre repose sur un coportage avec le service adresseur, garantissant la continuité des soins. Cette collaboration vise à préserver une dynamique inclusive et à maintenir le lien entre le patient et son secteur d’origine. Cet accompagnement débute par une synthèse complète des hospitalisations antérieures du patient, offrant ainsi un regard neuf sur son parcours institutionnel et permettant une approche plus adaptée à ses besoins.

• Un soutien aux services et une prise en charge des transitions

Le PAPV apporte un soutien actif aux services de psychiatrie ou aux centres médico-psychologiques (CMP) impactés par la destructivité des patients, sans toutefois se substituer à eux. Il s’agit d’instaurer un maillage entre les différents acteurs du soin, notamment lors des transitions critiques, comme le passage de l’hospitalisation au retour à domicile, où un renforcement de l’accompagnement ambulatoire est souvent nécessaire.

Pour exemple, Monsieur M. souffre d’un trouble schizophrénique sévère évoluant depuis plus dix ans. Son parcours a été émaillé de nombreux épisodes de violence. Après plusieurs années d’hospitalisation, une orientation en logement autonome est proposée. Le PAPV participe à plusieurs réunions avec l’association responsable de ce logement, puis met en place des visites à domicile pour accompagner l’installation de Monsieur M. dans cet appartement, et instaurer un suivi ambulatoire.

Une prise en charge groupale et souple

L’accompagnement ambulatoire au PAPV met l’accent sur la prise en charge groupale, qui joue un rôle clé dans la gestion de l’anxiété et l’engagement dans le soin. En effet, les groupes permettent de réduire la charge d’angoisse liée aux rencontres et d’activer des processus identificatoires. Ce cadre d’étayage social renforce le sentiment d’appartenance, essentiel dans le processus thérapeutique.

Les médiations sont centrales dans ces prises en charge groupales : jardinage, jeux, médiations artistiques, cinéma, groupes émotionnels, repas thérapeutiques… Le soin au PAPV est essentiellement relationnel, s’appuyant sur la création d’une réalité partagée à travers ces activités, qui facilitent la rencontre et l’alliance thérapeutique entre patients et soignants.

Une grande partie des patients du PAPV étant soigné sous contrainte, il est souvent difficile de susciter une demande de soins active. C’est pourquoi l’accent est mis sur l’accueil et la création d’un cadre souple. Le groupe « permanence collective » a ainsi été instauré, permettant aux patients de venir à des moments spécifiques selon leurs besoins et de s’approprier leur prise en charge. Ouvert et flexible, accessible à tous les patients suivis par le PAPV, ce groupe offre un espace où chacun peut s’impliquer selon son propre rythme.

Evaluation et perspectives

L’évaluation de l’efficience des soins proposés repose sur des synthèses régulières avec les services de secteur, avec pour objectifs la réduction des réhospitalisations, la diminution des recours aux services hospitaliers de soins intensifs et sécurisés, la réduction des temps d’isolement et de contention, ainsi que la baisse des ruptures de soins et des rechutes chez les patients.

Contacts : Clémence Bied, psychiatre et cheffe de service, Clemence.BIED@ch-le-vinatier.fr, Léonore Schmitt, psychologue, PAPV.

Voir aussi le poster « Plateau d’appui psychiatrie-violence, C. Bied, F. Renault, Congrès de l’Encéphale, 2023.