Passer d’un décret d’actes à un décret de missions, favoriser l’évolution professionnelle des soignants par des passerelles en cours de formation ou par la validation des acquis, prévoir davantage d’accompagnement au cours des études et également sur les lieux de stage… S’appuyant sur les résultats d’une consultation des professionnels, l’Ordre national infirmier (ONI) émet des propositions pour faire évoluer la formation des infirmiers.
« L’ouverture des travaux sur le décret infirmier doit conduire à une refonte de la formation infirmière davantage en adéquation avec la réalité du terrain », selon l’Ordre national infirmier (ONI). Afin de recueillir les avis des professionnels, l »Ordre a réalisé une consultation du 8 au 22 décembre 2023 à laquelle 35 339 infirmiers (dont 10 337 diplômés depuis moins de 10 ans) ont répondu. L’objectif était de permettre aux infirmiers de s’exprimer sur la formation actuelle et les changements pouvant être envisagés. Les résultats sont publiés, assortis de 7 propositions de l’Ordre, en 3 grands axes.
• Adapter la formation aux réalités du terrain.
1 infirmier sur 2 estime que les missions qui lui sont confiées sur le terrain vont au-delà du contenu de l’enseignement théorique délivré pendant leur formation – un sentiment partagé par 63% des infirmiers diplômés depuis moins de dix ans. Par ailleurs, seuls 37% des professionnels recommanderait leur métier à une personne de leur entourage, pourcentage encore plus élevé (47%) chez les jeunes diplômés.
Les propositions de l’Ordre sont :
> Réformer le décret infirmier en passant d’un décret d’actes à un décret de missions. Il reflètera l’activité
réelle et quotidienne des infirmiers auprès des patients.
> Diversifier les lieux de stages selon le projet professionnel en modulant et en adaptant les périodes dédiées. Cela améliorera la connaissance des différentes structures existantes, de leur champ d’intervention et de leurs missions pour les futurs professionnels.
> Renforcer les passerelles, notamment en cours de formation, afin de décloisonner les différents parcours santé et favoriser l’évolution professionnelle.
> Chargé par la loi du tableau des infirmiers et donc disposant d’une cartographie fine du nombre de professionnels sur chaque territoire, intégrer l’Ordre national des infirmiers aux discussions concernant l’ouverture du nombre de places en Institut de formation en soins infirmiers (Ifsi) pour qu’elle soit en adéquation avec les besoins de la population du bassin de vie d’implantation de l’établissement.
• Accompagner et reconnaître
41% des répondants disent avoir songé à abandonner leurs études, un taux plus élevés chez les plus jeunes : 67% chez les diplômés de moins de 5 ans, 61% chez les diplômés de moins de 10 ans. 7 infirmiers sur 10 auraient souhaité un accompagnement plus important au cours de leurs études et près de 30% des infirmiers (41% chez les diplômés de moins de 10 ans) déclarent s’être sentis insuffisamment soutenus dans leurs premiers contacts avec les patients. Par ailleurs, on relève une forte motivation au tutorat : 69% des répondants seraient prêts à s’y investir.
En réponse, l’ONI propose :
> Lancer une réflexion sur le système de tutorat actuellement en place, qui ne permet pas de prendre correctement en charge l’ensemble des étudiants en formation faute de professionnels disponibles. Celle-ci pourrait porter sur la mise en place de modules de formation dédiés, sur une meilleure reconnaissance des missions et surtout l’organisation de temps dédiés à cet accompagnement des étudiants, déterminant pour la suite de leur parcours. Cette réflexion pourrait parfaitement s’inscrire dans la même dynamique que celle lancée par Stanislas Guerini sur le sujet du mentorat.
> Prévoir un accompagnement plus personnalisé des étudiants au cours de leur stage (visite régulière sur site, temps d’échange et d’écoute) afin de s’assurer que leurs conditions d’accueil soient satisfaisantes.
• Maintenir la qualité et la sécurité des soins
Enfin, une large majorité des soignants (87%) estiment que les acquis professionnels doivent être davantage pris en compte.
Dans cette perspective, l’ONI suggère de renforcer la validation des acquis de l’expérience (VAE) et la validation des acquis professionnels (VAP) pour les infirmiers tout au long de leur parcours et déployer la certification périodique des professionnels de santé, dispositif de validation régulière des compétences, en vue de leur donner accès à un programme individuel de formation. Celui-ci permettra l’amélioration des compétences et des connaissances, contribuer au renforcement de la qualité des pratiques, et améliorer la relation avec les patients. En outre, ce programme permettra un meilleur suivi de leur santé personnelle tout au long de leur carrière.