Un programme original de remédiation cognitive dans la schizophrénie obtient des résultats encourageants. Il intègre une méthode d’apprentissage collectif de la musique qui s’appuie sur le corps.
Selon une étude pilote, un programme de remédiation cognitive basé sur une pédagogie originale d’apprentissage collectif de la musique obtient des résultats prometteurs, en particulier sur les symptômes négatifs de la schizophrénie, l’attention et l’anxiété. Coordonnés par les psychiatres Tudy Gozé, (CHU de Toulouse) et Étienne Bally (Paris), et soutenus par la Fédération régionale de recherche en psychiatrie et santé mentale (Ferrepsy), ces premiers travaux (1) pourraient déboucher sur un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC).
Dans la schizophrénie, les symptômes négatifs (apragmatisme, repli social, émoussement affectif…) et les troubles cognitifs impactent fortement le fonctionnement au quotidien et la qualité de vie des patients. Les traitements médicamenteux sont peu efficaces voire délétères sur ces dimensions. Les approches non médicamenteuses sont recommandées notamment la remédiation cognitive (RC), qui rencontre à ce jour deux défis majeurs : l’acceptabilité des programmes à long terme pour les patients et la transférabilité des compétences acquises à des situations réelles. Pour y répondre, l’équipe de recherche a fait l’hypothèse qu’un programme de RC par apprentissage musical, rythmique, vocal et corporel serait une piste intéressante. La méthode, qui consiste à pratiquer la musique sans instrument ni solfège, mais en jouant avec son corps, sa voix et les sons, a été développée par F. Cholat, professeur de pédagogie musicale au Conservatoire pour des publics a priori éloignés de la musique. « Nous avons fait le pari qu’une méthode “non soignante”, “écologique”, car largement diffusée dans la cité, pourrait soigner, tout en contribuant à déstigmatiser les personnes concernées », souligne T. Gozé.
En pratique, des séances hebdomadaires d’apprentissage musical collectif sur une période de 6 mois ont été proposées à 20 patients atteints de schizophrénie et stabilisés. Les séances étaient assurées par un professeur de musique en dehors de l’hôpital (au théâtre de la Cité, Toulouse). L’évaluation des déficits d’attention, des capacités d’inhibition, des symptômes négatifs et d’anxiété a été effectuée avant et à la fin de programme, et 3 mois plus tard.
Les résultats ont tout d’abord montré la faisabilité du programme : 55 % des participants ont suivi l’intégralité des séances. Par ailleurs, les chercheurs pointent une augmentation significative de la capacité de concentration, ainsi qu’une diminution significative des symptômes négatifs et de l’anxiété générale. Cette méthode originale, qui s’appuie sur une cognition incarnée dans le corps, ouvre des perspectives thérapeutiques, dont l’efficacité sur une plus large population va être prochainement évaluée..
• Étude pilote évaluant la faisabilité et les effets préliminaires d’une méthode de remédiation cognitive par apprentissage musical rythmique, vocal et corporel pour des patients schizophrènes stabilisés (ARCoS). Article en cours. Contact : goze.t@chu-toulouse.fr