Suivant leur sexe et leur apparence ethnique, les patients seront évalués différemment par les soignants des urgences, selon une étude réalisée au CHU de Montpellier. Ainsi les un homme blanc aurait 50% de chances supplémentaires qu’une femme noire d’être considéré comme une urgence vitale. Les chercheurs proposent des pistes pour remédier à ces discriminations.
L’équipe du Pr Bobbia, chef des urgences du CHU de Montpellier, qui s’investit dans la lutte contre les inégalités en santé, a réalisé, avec le soutien de la Société Française de Médecine d’Urgence (SFMU), une étude sur les différences de prises en charge liées au sexe et à l’origine ethnique des patients dans les services d’urgence. Les résultats confirment une approche différenciée selon le sexe et l’origine.
Dans le cadre de cette étude, la description d’un cas clinique habituel d’un patient qui se présente aux urgences à cause d’une douleur thoracique a été envoyée à des soignants qui travaillent en service d’urgence en Europe francophone.
Les soignants devaient donner le niveau de gravité (priorisation) de ce cas clinique. Le cas clinique était toujours le même mais la personne présentait des caractéristiques différentes (sexe et apparence ethnique). Cette image de patient était construite par un logiciel de construction de photo virtuelle réalistes basée sur de l’IA et représentait un personnage debout, la main sur la poitrine, simulant la douleur.
L’étude a été réalisée auprès de 1563 soignants de 4 pays (France, Suisse, Belgique et Monaco). Parmi eux, il
y avait : 50% de médecins urgentistes, 11% d’internes en médecine d’urgence et 39% d’infirmiers en médecine
d’urgence.
• Dans 62% des cas, le cas clinique a été considéré comme une urgence vitale quand l’image associée était une
image d’homme contre 49% quand c’était une femme (différence 13%).
• Dans 58% des cas, le cas clinique a été jugé urgence vitale quand l’image associée était une image d’apparence ethnique blanche contre 47% quand c’était une apparence noire (différence 11%).
• Enfin, dans 63% des cas, l’urgence vitale a été considérée quand l’image associée était une image d’homme
blanc contre 42% quand c’était une apparence de femme noire (différence 21%).
« Autrement dit, un homme blanc aurait 50% de chance supplémentaire qu’une femme noire d’être considéré comme une urgence vitale quand il consulte dans un service d’urgence pour une douleur thoracique ».
La conclusion de l’étude et de cet article est que l’évaluation de la gravité des malades aux urgences est soumise à la discrimination. Par rapport aux patients blancs, les patients noirs sont moins susceptibles de recevoir un traitement d’urgence. Il en va de même pour les femmes par rapport aux hommes.
Pour sa part, le CHU de Montpellier a engagé un plan d’actions pour lutter contre les inégalités. Pour exemple, dans une optique d’innovation, et afin de minimiser les biais discriminatoires, une étude multicentrique visant à élaborer un outil d’IA permettant d’évaluer la gravité des patients consultants pour douleur thoracique est en cours.
• Voir le communiqué du CHU. L’article en accès libre dans l’European Journal of Emergency Medicine